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HEGEL ou L'universelle vie de l'esprit par Philippe Choulet

Publié le 17/06/2020

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« Le besoin de philosophie Hölderlin eut cette chance d'expérimenter in vivo ce que nous ne pouvons plus que désirer à travers une écriture et une philosophie : Hegel est bien ce philosophe de la réconciliation et de l'apaisement des tensions. Est-ce à cela, dès lors, que sert la philosophie ? Pourquoi philosopher ? D'où vient l'urgence de penser ? Elle vient de la situation de scission dans laquelle le vivant en général, et l'homme en particulier, se trouvent pris : tous les modes de la séparation, de la division, du déchirement, sont générateurs de malheur et de tensions que la conscience essaie de résoudre et de réduire par la réflexion. La pensée est donc vouée à une première tâche, la cicatrisation des plaies de l'âme. En ce qui concerne les choses de l'esprit, il ne peut s'agir alors que de comprendre et de connaître, pour réduire les effets catastrophiques de ce malheur des hommes qui n'est que la traduction affective de leur condition. Aussi bien, il s'avère que le malheur est à la fois signe et cause de la pensée des hommes, de leurs récits, de leurs narrations : « S'il n'y avait pas de malheur, il n'y aurait rien à raconter», écrit l'hégélien Queneau (Une histoire modèle, N.R.F.-Gallimard, chap. VII). Le malheur fait entrer la conscience dans le langage abstrait, qui commence par l'indiquer et le décrire : «Tout le narratif naît du malheur des hommes» (ibid., chap. XIII). Nous entrons ici dans un des plus puissants leitmotive de la modernité philosophique : l'histoire, la religion, le rêve, l'idéologie sont des productions déterminées par l'entrée de la conscience dans l'hétérogène : « Autrement dit, le bonheur est homogène, le malheur est divers » (ibid., chap. VII). La philosophie, selon Hegel, en se voulant fin de l'histoire de ce malheur universel, se définit comme prose du monde, plus encore : prose de l'histoire du monde. Elle se doit, par suite, de répondre à la tâche assignée par la conscience déchirée : réconcilier le subjectif avec l'objectif. La scission La question du besoin de philosophie, toute prosaïque, est celle de l'utilité : à quoi la philosophie peut-elle servir ? A quel homme ? La philosophie se veut ici anthropologie, c'est-à-dire théorie de la culture humaine, de la Bildung, de la formation et de l'éducation de la conscience humaine. Notre homme, concerné par l'exigence philosophique, est défini par Hegel comme lieu de la scission (Entzweiung), de l'aliénation (Entaüsserung, Entfremdung), du devenir-autre. Pour faire l'inventaire des effets de cette condition fondamentale, il faudrait sans doute un Prévert ! Le drame, la folie, le désir, l'expérience du manque, la conscience de l'ignorance, la recherche d'une identité, la relation à l'autre, toujours polémique d'emblée, tout cela fait autant de témoignages et de raisons qui amènent à penser que l'homme n'est jamais ce bloc unitaire et homogène qu'il voudrait être. En quoi Hegel reprend, mais sur un autre plan, celui de l'esprit, l'ancienne thématique que Platon présente sous la forme du mythe, dans le discours d'Aristophane (Banquet 189a et suiv.), thématique de la coupure-en-deux, qui provoque instantanément chez l'une et l'autre partie le désir de fusion, de réconciliation avec soi-même dans une totalité harmonieuse. La philosophie peut-elle vraiment « recoller les morceaux » ? Peut-elle surmonter cette négativité, cette révélation et cette expérience de la contingence et de la finitude, de cette détresse qui « révèle la fmitude et, par suite, la contingence à la fois du droit et du bonheur » (Principes de la philosophie du droit, p. 166) ? La réponse de Hegel est positive, dans la mesure où il essaie de montrer la liaison organique qui détermine le rapport entre scission et philosophie : « Lorsque la puissance de la réunion disparaît de la vie des hommes et que les opposés ont perdu leur vivante relation et interaction, et acquièrent une subsis-tance-par-soi, naît le besoin de philosophie. » (Encyclopédie des sciences philosophiques, p. 22). Par suite : « La scission est la source du besoin de philosophie. » (ibid., p. 20). A Hegel revient le travail d'interprétation de cette relation généalogique, dont nous suivrons les principales étapes. La raison dans ses manifestations A ce malheur des hommes, il y a plusieurs façons de réagir : on peut maudire, se lamenter, se réfugier dans la volonté de Dieu, s'en remettre à la Providence. Hegel tente, lui, de rendre raison à la fois de l'essence et de l'existence de la scission, de son mode d'apparition et de son fait historique. Si le premier regard, certes empirique et naïf, que nous jetons sur le monde nous convainc aisément de son absurdité, de sa folie ou de sa déraison, le regard philosophique veut par contre pénétrer « l'océan des singularités empiriques », « ce vaste empire de l'être-là intérieur et extérieur », ce « désordre apparent de la masse infinie du contingent ». La philosophie veut saisir conceptuellement la raison en œuvre dans les phénomènes, dans cette richesse infinie du monde dont l'allure baroque et protéiforme semble nous menacer de son arbitraire. Seul l'esprit philosophique peut réduire le malheur venant de la scission, en redressant ce « chemin du doute » et du « désespoir » (La Phénoménologie de l'esprit, p. 69), par la puissance de sa lucidité et son exigence d'unité ; l'esprit ne se plaît pas dans le désordre (Encyclopédie des sciences philosophiques, p. 472), la raison a pour essence de ne jamais se décourager devant la diversité. Il s'agit alors de saisir le noyau rationnel de tout ce qui apparaît et se manifeste. Le phénomène, qu'il soit guerre, Etat, œuvre d'art, n'est plus de l'ordre de l'apparence, ni de celui du semblant ou du faux-semblant ; il est le mode unique et exclusif de réalisation, d'effectuation d'une plus profonde rationalité. La tâche de la philosophie est donc de reconnaître la raison dans ses manifestations, la raison qui est sujet de ce qui est. La philosophie a raison contre toute déraison et contre les moindres raisons : « La science seule est la théodicée ; elle nous gardera tout autant de l'étonnement animal devant les événements que de l'attitude plus intelligente qui les attribue aux hasards de l'instant ou au talent d'un individu, qui fait dépendre le destin des empires d'une colline occupée ou non occupée ; elle nous gardera de nous lamenter sur la victoire de l'injustice ou la défaite du droit. » (Correspondance, I, p. 129). ...»

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