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Commentaire - Arrêt CEDH K.A et A.D c/ Belgique (06/07/05)

Publié le 17/05/2020

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Ci-dessous un extrait traitant le sujet : Commentaire - Arrêt CEDH K.A et A.D c/ Belgique (06/07/05) Ce document contient 4816 mots soit 11 pages. Pour le télécharger en entier, envoyez-nous un de vos documents grâce à notre système gratuit d’échange de ressources numériques. Cette aide totalement rédigée en format pdf sera utile aux lycéens ou étudiants ayant un devoir à réaliser ou une leçon à approfondir en Droit.

« Commentaire - Arrêt CEDH K.A et A.D c/ Belgique (06/07/05) L'affaire K.A et A.D c/ Belgique est une affaire qui s'est déclenchée indirectement : alors que la police belge menait une enquête dans un club sadomasochiste, il a étédécouvert une cassette vidéo sur laquelle un juge malinois accompagné d'un médecin s'exerçaient à des pratiques sadomasochistes d'une extrême violence sur unefemme « esclave » consentante (en l'occurrence la femme du juge).

Il était convenu d'un code entre les intéressés pour mettre fin aux opérations dès que la femme leprononcerait.

La souffrance infligée à cette femme a été telle que cette dernière a fini par prononcer ce code.

Mais les requérants, en état d'ébriété manifeste, n'ont pastenu compte de ces règles et ont continué à lui infliger leurs sévices.Le magistrat et le médecin ont alors été poursuivis par l'autorité publique et condamnés pour coups et blessures volontaires, infligés sur une tierce personne (30septembre 1997).

La cour d'appel d'Anvers s'est référée aux articles 392 et 398 du Code Pénal.

La Cour d'appel a également condamné le premier requérant (lemagistrat) pour incitation à la débauche et à la prostitution (au titre de l'article 392 CP).

En ce qui concerne la condamnation pour coups et blessures, la Courd'Appel d'Anvers a retenu trois éléments.

Un élément moral puisque la Cour estime que le délit de coup et blessure comporte une intention générale (être conscientque les actions que l'on fait sont éventuellement interdites).

La Cour d'Appel a également pris en compte l'élément matériel : il y a eu des lésions corporelles et le faitqu'elles n'ont été que superficielles n'y change rien.

Le consentement de la victime n'est pas non plus un argument pertinent.

Par ailleurs, il n'y a pas d'excuse ou decause exonératoire de la peine.

En effet, en droit pénal, lorsqu'il y a cause d'excuse, il y a bel et bien délit pénal mais le juge ne punit pas en cas de bonne excuse.

Il ya cause d'excuse lorsque les actes incriminés ou punis sont permis explicitement ou implicitement par la loi.

C'est ce qui donne une immunité pénale à des activitésacceptées telles que la chirurgie esthétique, les sports violents (boxe) et les activités de tatouages et de piercing.La Cour de Cassation a rejeté le pourvoi des requérants le 6 janvier 1988 et confirme de ce fait le jugement rendu par la Cour d'Appel d'Anvers.

La Cour deCassation estime en effet qu'il n'y a pas eu violation de la loi.

La Cour confirme qu'il ne faut pas nécessairement que les lésions soient durables pour appliquer lesarticles 392 et 398 du Code Pénal mais il faut juste qu'il y ait eu atteinte à l'intégrité de la personne physique.

De plus, pour les juges belges, la sexualité tombe biensous le joug de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme mais ils considèrent que toutes les conditions ont été remplies pour justifier uneingérence légitime de l'autorité publique.Les requérants ont alors établi une requête auprès de la Cour européenne des droits de l'homme au motif de la violation de trois articles établis dans le Conventioneuropéenne des droits de l'homme.

Les requérants estiment tout d'abord qu'il a eu violation de l'article 6 de la Convention au sujet de la non communication despièces relatives au dossier.

Néanmoins cet article relève de l'ordre de l'appréciation procédurale d'autant plus que les parties n'étaient pas présentes lors de l'audience àla Cour de Cassation alors qu'elles auraient pu tenter d'ajourner l'audience ou de répliquer … Les requérants ont également invoqué une violation de l'article 7 de laConvention revendiquant le fait que nulle peine ne peut être donnée sans une disposition législative.

Et enfin, les requérants affirment une violation de l'article 8§1 etdonc du droit au respect de la vie privée.

En effet, ils estiment que les pratiques sadomasochistes se sont déroulées dans un local privé avec le consentement de lavictime et que par conséquent l'autorité publique n'avait pas à intervenir.

La Cour européenne des droits de l'homme a rendu son arrêt définitif le 6 juillet 2005 et ellea confirmé le jugement de la Cour de Cassation.Deux questions majeures se posent alors au travers de cet arrêt.

Tout d'abord, il faut se demander si l'ingérence de l'Etat dans la sphère privée est légale ? Cela revientà se demander si le respect de la vie privée a été violé ? En effet, les pratiques sexuelles sadomasochistes se sont déroulées dans un lieu privé, spécialement réservé àcet effet avec normalement une obligation de garder les pratiques sexuelles secrètes.

La seconde question qui se pose alors est de savoir si, à partir du moment où l'onestime que l'ingérence de l'Etat est légale, est-elle pour autant légitime dans le cas présent ? Comment la Cour européenne des droits de l'homme a-t-elle réussi àdonner une légitimation à cette ingérence étatique ? Est-ce la bonne légitimation ? Au final, la question générale soulevée par cet arrêt est de savoir dans quellemesure l'autorité publique a-t-elle la possibilité de s'introduire dans la sphère privée, dont le respect est pourtant un droit essentiel.

Comment apprécier la question duconsentement de la victime en droit pénal ? Il convient dans un premier temps de s'intéresser à la légalité de l'ingérence de l'Etat avant d'analyser l'appréciation de lalégitimité faite par la Cour européenne des droits de l'homme dans le cas présent. I- Existe-t-il une légalité de l'ingérence de l'Etat dans la sphère privée ? La notion de vie privée est consacrée dans différents textes législatifs nationaux et internationaux.

Le droit à la vie privée a tout d'abord été consacré par l'article 12de la Déclaration universelle des droits de l'Homme des Nations unies de 1948 qui stipule que : « Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, safamille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation.

Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtionsou de telles atteintes ».

L'article 8 al.

1 de la Convention européenne consacre également le respect à la vie privée (« toute personne a droit au respect de sa vie privéeet familiale, de son domicile et de sa correspondance »).

Dans les textes nationaux, le droit au respect de la vie privée a une consécration constitutionnelle enBelgique (article 22 de la Constitution belge) tandis qu'en France, qui a presque le même système juridique que la Belgique, le droit au respect de la vie privée esténoncé par l'article 9 du Code Civil.

Ainsi, la notion de sphère privée est fondamentale même si elle est difficile à définir (A) ce qui renvoie à la question de lalégalité de l'ingérence du droit pénal dans cette sphère (B). A) Définition de la sphère privée La vie privée, ou pour être plus précis, « le droit à l'intimité de la vie privée » fait partie des droits civils.

Les composantes de la vie privée n'ont pas fait l'objet d'unedéfinition ou d'une énumération limitative afin d'éviter de limiter la protection aux seules prévisions légales.

L'expression de la vie privée est donc très large et elle ne« se prêtent à aucune définition exhaustive », comme l'affirme la Cour européenne des droits de l'homme dans son arrêt.

Initialement, la vie privée était considéréecomme le contraire de la vie publique.

Comme cette notion n'est pas explicitement détaillée dans les textes ; les juges ont donc du déterminer ce qui relève de la vieprivée et ce qui relève de la vie publique.

Le droit de la vie privée se définit comme étant une protection contre toute intervention arbitraire.

C'est donc un droit de nepas être troublé par autrui, ni chez soi (c'est à dire au domicile) ni dans son « quant-à-soi » (c'est à dire dans sa sphère d'intimité propre).

Le droit à la vie privée peutse décliner selon une triple dimension : intégrité physique et morale, l'identité et l'intimité.

Les aspects les plus courants que revêt ce droit sont la protection dudomicile (la police ne peut y pénétrer que dans certains cas réglementés par la loi) ; le secret professionnel ou médial ; la protection de son image (interdiction de lareproduction de l'image d'une personne sans son autorisation) et la protection de son intimité (éléments concernant les relations amoureuses ou préférences sexuellesd'une personne ne peuvent être révélés).Mais la Cour de Strasbourg a également ajouté une dimension quant à la qualification de la vie privée.

En effet, le droit au respect de la vie privée protège le droit àl'épanouissement individuel que ce soit sous la forme du développement personnel ou sous l'aspect de l'autonomie personnelle.

L'autonomie personnelle sous-entendl'interprétation des garanties offertes par le droit au respect de la vie privée.

L'autonomie personnelle équivaut à l'aptitude de l'homme à se donner sa propre loi, àexprimer sa volonté sous une forme quelconque.

A titre d'exemple, le droit de disposer de son corps fait partie intégrante de la notion d'autonomie individuelle.

Or laCour de Strasbourg a souligné que les relations sexuelles composent cette liberté de disposer de son corps et donc de son libre-arbitre.

En conséquence, le choix desrelations sexuelles relève de la vie privée.

Pour illustrer cette conception, il convient de reprendre la décision rendue par la CEDH lors de l'arrêt Pretty c/ Royaume-Uni (du 29 avril 2002).

Dans cet arrêt, la Cour a indiqué qu'il existe une faculté pour chacun de mener sa vie comme il entend : « la notion d'autonomie personnellepeut s'entendre au sens du droit d'opérer des choix concernant son propre corps ».

De ce fait, il apparaît clairement que certains éléments constitutifs de l'identitépersonnelle et donc de la vie personnelle tels que le sexe, l'orientation sexuelle ou les pratiques qui lui sont liées, font partie intégrante de la vie privée et sont protégésen tant que tel.

D'ailleurs, le paragraphe 79 de l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme le confirme : « Des éléments tels que le sexe, l'orientation sexuelleet la vie sexuelle sont des composantes importantes du domaine personnel protégé par l'article 8 ».

Ainsi, pratiquer des actes sexuels relève de la sphère de la vieprivée, et est donc considéré comme un « droit de l'homme » protégé par la Convention européenne.Le droit au respect de la vie privée est donc un principe essentiel, régissant notre société.

Mais le droit à l'intimité de la vie privée pose le problème de l'équilibre qui. »

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