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L'élaboration du plan

Vous voici arrivés au moment d'organiser les matériaux accumulés jusqu'ici en un plan rigoureux et convaincant. Si vous avez mené à bien l'approche du texte et la recherche des centres d'intérêt, vous allez pouvoir regrouper vos différentes remarques dans un ordre logique et d'intérêt croissant, susceptible de rendre compte le mieux possible de la page qui vous a été proposée. Votre démarche comporte deux étapes : la détermination du plan d'ensemble, qui sert à trouver l'ordre général de la démonstration (car c'est bien de cela qu'il s'agit), et le plan détaillé, qui a pour objet d'ordonner les idées secondaires à la suite des idées principales.

A - LE PLAN D’ENSEMBLE

a) Il doit correspondre à la démarche annoncée à la fin de l'introduction du commentaire composé (pour le texte 2 : un poème original, lyrique et militant) ou encore aux différentes conclusions d'une explication linéaire. Étant donné la variété des textes proposés, plusieurs cas de figure sont envisageables. Le plan peut : - classer dans un ordre expressif les centres d'intérêt (voir le texte 2); - aller du plus extérieur au plus intime (voir le texte 1), - reconstruire les étapes successives de la lecture et de fa découverte (ce pourrait être le cas de l'ébauche de commentaire consacré au portrait de Diphile, texte 6); - selon la nature du texte, s'inspirer de ses structures mêmes et de sa composition (voir plus loin le poème en prose de Baudelaire, texte 8). Dans ce dernier cas, comme certains professeurs jugeaient bon de mettre en garde leurs élèves contre une composition qui s'inspirerait des structures du texte à commenter, l’inspection générale des Lettres a fourni, dans les précédentes instructions, les précisions suivantes : «Le texte du B.O. ne contient aucun piège. La notion de composition y est définie de façon objective comme exigence fondamentale d’ordre dans l’argumentation, ce qui n’exclut aucun type d’organisation et ne saurait privilégier aucune construction stéréotypée. L’enjeu de l’exercice est une lecture littéraire pertinente et personnelle, qui justifie ses démarches par un discours ordonné et efficace. Il ne peut y avoir un modèle obligatoire de composition. »

b) Si vous avez choisi les centres d’intérêt avec discernement, ils constitueront logiquement les grandes parties du plan. En effet centres d’intérêt et parties présentent des caractères communs : ils renvoient à un aspect capital du texte, ils se situent à un même niveau de généralité, ils ont une unité, ils n’interfèrent pas. Mais il arrive souvent que l’un des centres d’intérêt n’ait pas répondu à vos espérances (ce serait le cas du réalisme dans le texte de Maupassant) ou qu’il soit trop ou trop peu étoffé, ou encore qu’il en recoupe en définitive un autre. Alors une restructuration s’impose, surtout si vous vous apercevez en chemin que vous avez laissé de côté une question importante ou si un nouveau problème a surgi au cours de vos investigations. Précision essentielle : la Note de service du 17 janvier 1996 rappelle que « les opérations de repérage préalable et d’examen méthodique » qui constituent la première partie de l’épreuve « n’épuisent évidemment pas le travail d’observation nécessaire à l’élaboration du commentaire ». Votre plan de commentaire composé ne devra donc jamais se réduire à une organisation des observations de la première partie ; il comportera des réflexions nouvelles et montrera votre capacité à dégager une problématique et à organiser des axes d’étude.

c) S’il est aisé de vous rappeler quelles sont les démarches à proscrire (séparation fond / forme, explication au fil du texte, catalogue de remarques), il est impossible de vous fournir un plan passe-partout car chaque texte (comme chaque lecture) est unique. Voici cependant les qualités d’un bon plan admises par tout le monde : - il est simple : l’idéal est de pouvoir le résumer en une phrase, dont chaque élément corresponde à une partie, phrase qui constituerait la troisième étape de l’introduction, c’est-à-dire l’annonce de la démarche adoptée; - il est structuré et comporte un nombre de parties acceptable. Ne soyez pas esclave de la composition tripartite, même si elle est depuis longtemps appréciée dans notre tradition scolaire et universitaire; mais n’oubliez pas que s’il comporte deux parties, un plan laisse souvent échapper une idée ou des nuances importantes (il pèche par manque d’analyse), et qu’au-delà de quatre, il devient une sorte de catalogue inorganisé (il pèche par manque de synthèse) ; - il est équilibré (les thèmes abordés sont d’importance équivalente, les parties ont une longueur analogue) ; - il obéit à un mouvement continu : les parties doivent être présentées selon une gradation, du moins important au plus important pour des raisons logiques, et du moins original au plus élaboré pour des raisons esthétiques. D’ailleurs votre bilan de lecture ne saurait donner force au jugement personnel qu’il prépare et qu’il justifie, s’il se réduit à une mosaïque de remarques juxtaposées ; - il est le plus complet possible à l’intérieur d’un cadre déterminé - toute lecture supposant un choix.

B - LE PLAN DÉTAILLÉ

a) Le plan n’est pas achevé quand on a déterminé deux, trois ou quatre parties. Chacune d’elles en effet constitue à son tour un développement en raccourci, comportant une phrase d’introduction, des paragraphes (leur nombre pose le même problème que celui des parties) ainsi qu’un bref bilan provisoire. Supposons par exemple qu’à propos du poème de Supervielle (texte 4) vous consacriez une première partie à l’impression de transparence que donne au départ, sous la plume d’un poète attentif aux moindres frémissements des créatures, le «mouvement» de l’animal. Vous pourriez avoir un schéma de ce type : - on croit entendre un chant du monde plein de fraîcheur dont témoigne la simplicité de l’évocation ; - 1re sous-partie : un texte au caractère concret et précis ; - 2e sous-partie : un monde solide et fermé; - la scène fait penser aux grands espaces de cette Amérique que le poète, partagé entre deux pays, la France et l’Uruguay, connaissait bien.

b) Mais comment déterminer ces sous-parties? Quand vous avez approfondi chacun des centres d’intérêt, vous les avez étoffés à l’aide de citations et de remarques faites au fil du texte. Il vous faut à présent regrouper les unes et les autres, en procédant par conséquent à une démarché inverse de celle de l’explication linéaire : vous partez des idées (qui vous servent d’arguments) et vous les étayez par des passages du texte (qui vous tiennent lieu de preuves) au lieu de déduire du texte vos idées.

Dans l’exemple ci-dessus, après ce travail de synthèse, la première sous-partie graviterait autour de l’idée que le poème présente un caractère concret et précis et vous vous appuieriez sur les éléments suivants : - le titre : court, simple et suggestif ; - « l'argument » : un cheval découvre un fragment de l'invisible ; ne pouvant nous faire voir ce que l’anima 1 a vu, le poète nous suggère avec discrétion quelque chose au-delà de la sensation ; - le vocabulaire : noms concrets abondants, verbes de sens précis, démonstratifs qui à la fois désignent et imposent. Chacune de ces indications serait étayée, bien sûr, par des citations pertinentes et précises.

D’un point de vue théorique, les regroupements à l’intérieur de chaque partie s’opèrent de plusieurs façons, et notamment : - par ressemblance : ainsi dans le texte 2 la 1re partie (un poème a la facture très particulière) ; - par opposition : voir dans le même texte la 2e partie (une évocation sensuelle/ une évocation angoissée) ; à partir de variations stylistiques sur un même thème : par exemple La Bruyère dépeint son maniaque de façons diverses (mouvements courts ou complexes, ironie* ou indignation, .etc.).

c) À cette étape du travail, vous avez intérêt : - à étoffer le plan auquel vous avez abouti, en y intégrant des indications qui donneront à votre exposé... * plus de clarté : par exemple des phrases d’introduction et de conclusion dans les sous-parties (comme ci-dessus à propos du texte 4) ; * plus de «liant» : par exemple des transitions entre les éléments successifs, qu’il s’agisse de l’ensemble ou même du détail (ainsi, à propos du même poème, entre la première et la deuxième partie : le titre de la section du recueil, «Matins du monde», suggère une exploration cosmique, qui entrouvre, mais sans vertige, les portes du mystère, de sorte que nous passons de la transparence à l’opacité); * plus de force : par exemple à l’aide de formules frappantes (Supervielle rend le fabuleux familier) ou de rapprochements qui vous sont venus à l’esprit au cours de vos recherches («Mouvement» peut faire songer à des tableaux de Salvador Dali ou de Giorgio de Chirico) ; - à choisir les citations les plus intéressantes, car il est impossible de mentionner, à propos de telle ou telle idée, toutes les références, et à les classer chronologiquement (dans l’ordre où ces phrases et expressions apparaissent dans la page) ou logiquement (dans un ordre croissant d’importance le plus souvent).

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