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MARC AURELE ou L'empire sur soi-même par Léon-Louis Grateloup

Publié le 16/06/2020

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« Un Romain qui écrit en grec Que la philosophie soit grecque de naissance, — sinon d'essence — on en trouverait une illustration dans le fait suivant : quand l'empereur romain Marcus Aurelius Anto-ninus (Marc Aurèle), au cours de ses campagnes sur les rives du Danube où il a conduit ses légions, trouve quelques instants pour noter ses « Pensées », ce n'est pas en latin qu'il écrit, mais en grec. Le grec est la langue des philosophes et en particulier celle d'Epictète, dont l'empereur a pu lire les Entretiens, grâce à son conseiller stoïcien Rusticus qui lui a ouvert jadis sa bibliothèque (Pensées, I, 7). Un empereur disciple d'un esclave . Que la philosophie ignore les cloisonnements socio-économiques, quelle meilleure preuve pourrait-on en donner que cette rencontre magistrale d'un esclave affranchi dénué de ressources, et d'un empereur élevé dans les avenues du pouvoir ? Marc Aurèle marqua d'un caillou blanc, selon la coutume romaine, le jour où il connut les leçons d'Epictète, dont il devint le disciple. Considéré par certains comme un simple imitateur de son maître en stoïcisme, dont il reprend en effet l'essentiel de la doctrine et des thèmes, l'empereur nous présente en réalité, à travers ses Pensées, une autre figure du Portique. Un livre unique L'ouvrage que Marc Aurèle écrit, à la fin de sa vie, dans la boue des armées, est à bien des égards un livre unique, dont le titre grec : ta eis éauton, généralement traduit par Pensées, désigne plus exactement des « Notes personnelles » (« A moi-même » ou « Pour moi-même ») par opposition aux pièces officielles, qui faisaient également partie de la cassette impériale. Ce sont des notes prises au petit jour, ou à la fin d'une rude journée, pour son usage personnel, par un empereur que son pouvoir isole eLqui ne trouve finalement à s'entretenir qu'avec lui-même, dans son « arrière-boutique », comme dira plus tard Montaigne (Essais, I, 39). Ainsi, avec les Pensées de Marc Aurèle, nous ne sommes pas dans le monde lointain d'un mythe : celui du philosophe qui serait roi, — mais bien dans la confidence d'un empereur qui est réellement philosophe et que son humanité nous rend proche. Les insomnies durant les longues campagnes auxquelles se voit obligé cet empereur qui n'aimait pas la guerre, son mépris de la gloire si souvent affirmé, l'exercice d'un pouvoir au sujet duquel il n'entretient aucune illusion, expliquent la tonalité particulière des Pensées et l'audience qu'elles ont trouvée chez tant de lecteurs qui, sans être empereurs ni sages, étaient simplement des prokoptontés, c'est-à-dire des hommes « s'avançant vers » la vérité et la sagesse. Royauté du présent L'homme que nous découvrent les Pensées est un ascète qui joue son rôle d'empereur avec une extrême distance et une constante application. Concevant sa tâche comme un devoir quotidien, Marc Aurèle refuse de céder à l'illusion d'un temps qui ne serait pas celui de l'action présente. Entre ces deux infinis que sont le passé et l'avenir, sur lesquels nous n'avons aucune prise, seul le présent offre à l'action vertueuse un moment qui ne doit pas être différé : « Si tu ôtes du temps tout ce qui est à venir et tout ce qui est déjà écoulé, tu feras de toi, comme dit Empédocle, “une sphère parfaite, fière de sa rondeur bien équilibrée” » (XII, 3). Rien n'est plus éloigné de Marc Aurèle que l'idée d'investir dans cette vie pour récolter au centuple dans une autre. Le temps est vidé de toute capacité de rapport pour le sage qui trouve dans l'exercice même de la vertu sa récompense toujours actuelle : on ne s'étonnera donc pas que, sous le règne de Marc Aurèle, aient eu lieu les persécutions de Lyon, où sainte Blandine et l'évêque saint Pothin « eurent la gloire de cueillir la palme du martyre », comme l'écrit le R.P. Gazeau (Histoire de France, Paris, 1870, t. I, p. 30). En effet, aux yeux de l'empereur, les chrétiens ne sont pas seulement des agitateurs en expansion contre la « paix romaine », mais des « acteurs tragiques » dont la sincérité est suspecte (XI, 3), des insensés qui ne s'appartiennent plus et qui voudraient changer l'ordre du monde, ignorant qu'une seule tâche appelle le philosophe : se changer soi-même et devenir tranquillement maître de soi. Tous les fanatismes naissent ainsi d'une ignorance fondamentale, relative à la nature du temps. Une méprise significative Dans ces conditions, on pourrait s'étonner, en revanche, que l'admirable statue équestre de Marc Aurèle, en bronze doré, qui se dresse sur la place du Capitole, au cœur de la chrétienté, soit si exceptionnellement parvenue intacte jusqu'à nous, depuis le second siècle. A vrai dire, les chrétiens du Moyen Age avaient pris ce chef-d'œuvre, — que Michel-Ange, plein d'admiration, restaura lui-même en 1538, — pour l'effigie de Constantin, premier empereur chrétien. Au-delà de l'anecdote, cette méprise est significative des rapports ambigus que n'ont cessé d'entretenir la philosophie stoïcienne et la religion chrétienne, deux conceptions de l'existence à certains .. .»

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