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Le pouvoir technique est-il sans limite ?

Publié le 16/05/2020

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« La technique désigne l'ensemble des moyens inventés par l'homme pour travailler, transformer la nature et changer l'ordre du monde.

Des outils les plus simples aux machines robotiquesles plus complexes, le développement de la technique apparaît donc à travers l'histoire comme un “progrès” constant.

Du silex jusqu'à la conquête de l'espace, en passant par l'avènementde l'imprimerie, de la machine à vapeur, des instruments de la chirurgie moderne, jusqu'à l'apparition de l'informatique, la technique, prolongement de l'intelligence humaine, semble êtrel'expression d'une victoire, celle de la puissance humaine sur le réel, et chaque découverte technique (maîtrise de l'électricité par exemple, invention des médicaments …) semble apporter àl'humanité les éléments d'une vie meilleure.

Cependant, malgré le nombre important de bienfaits évidents nés du développement de la technologie, il semble qu'aujourd'hui on s'inquiète del'accélération de la “technicisation” de notre existence et que certains s'attachent à faire le procès de la technique en soulignant qu'elle produit autant de possibilités de destruction et derégression que de progrès, autant de menaces et de risques que d'amélioration.

Parler d'une limite du pouvoir technique, c'est immédiatement évoquer de manière implicite les dangers qu'ilreprésente et auxquels elle peut conduire.

Face à tous ces développements, on instaure parfois des moratoires ou on va jusqu'à interdire certaines recherches et certains développements.Dès lors est-il possible de faire la part des choses entre risque et progrès ? On ne peut empêcher les chercheurs de travailler, on ne peut empêcher la technique de se développer et même sion pointe du doigts ces dangers, il n'en demeure pas moins que la technique continue à avancer et que les applications continuent à se développer.

En ce sens, parler de limites de latechnique n'est-il pas illusoire ? En outre, peut-on faire de la technique la responsable des maux qu'elle rend possibles ? Quel sens cela a-t-il de parler de limites ici ? Que serait unelimitation de la technique ? La technique est au départ un formidable moyen d'adaptation pour l'homme, animal démuni de défenses naturelles, lui permettant de créer ce dont il a besoin pour subsister face à unenature hostile, et par là même, de sortir de son animalité.

La technique fut donc à l'origine, non seulement le moyen fondateur de notre propre survie, par l'intermédiaire de la maîtrise dufeu, du bois et de la pierre, puis plus tard des métaux, mais fut aussi à l'origine de l'apparition de la culture (cuisine, art, vêtement…etc.).

Ainsi, la technique qui montre que l'homme futd'abord un “Homo faber” **avant d'être un “homo sapiens” est bien le domaine d'activité duquel a pu émerger notre humanité.

La main, premier “outil”, premier instrument technique dont l'homme dispose fut bien la condition de possibilité de l'apparition même de son intelligence.

La technique comme outil et produit du travail atteste de la rationalité propre à l'homme.Condition d'apparition de notre culture, et du développement de nos sociétés, la technique, à l'échelle des siècles passés, a permis de délivrer l'homme des travaux pénibles et semble doncavoir donné à nos sociétés le moyen de vivre mieux.

Depuis l'âge de pierre, l'homme vit mieux et dispose de plus de confort: transport, santé, condition de travail, communication, cultureet science, industrie…etc.

Tous les domaines de la vie pourraient être analysés pour démontrer les bienfaits indéniables de la technique.

La technique n'apparaît donc pas à première vuecomme un danger mais au contraire comme la chance même de l'homme.

Notre culture s'est alors orientée vers une sorte d'idolâtrie de la technique, le progrès technique apparaissantcomme le but essentiel recherché par l'homme.

Le progrès devient alors lui-même une fin au lieu de rester un moyen: c'est là que commence l'ambivalence du progrès technique.

*Le XXème* siècle restera un paradoxe : il est le siècle du progrès technique mais aussi celui du totalitarisme, des camps de concentration.

Y a-t- il un rapport entre ces deux choses, entrele progrès technique et la barbarie de l'holocauste ? Pour la première fois dans son histoire l'homme a inventé une mort industrielle : il s'agit d'ailleurs non pas seulement de tuer des êtresmais de nier le fait qu'ils soient jamais nés en effaçant les traces de leur existence.

Ce qui a rendu possible un tel massacre, ce n'est pas seulement l'idéologie nazie : les camps relèventd'abord d'un mécanisme fordien, qui est celui là même qui fonde notre société occidentale dont nous étions si fiers, celle du rendement, de la productivité, de l'efficacité, du progrèstechnique.

A partir de 1942, l'usine, cet instrument moderne, va devenir l'arme de la solution finale et la fureur nazie n'a pu se réaliser qu'à travers les derniers perfectionnements del'industrie (le ziklon b provenait de I.G.

Farben, fleuron de l'industrie chimique).

En prenant en charge l'administration de l'horreur, la logique industrielle, et son organisation, parviennent àocculter chez tous les “exécutants” la véritable portée de leurs actes ; elle divise les tâches et accoutume à leur travail tous ceux qui, à quelque niveau que ce soit prennent part à lasolution finale.

Cette gestion est directement responsable de la banalisation du mal, de ce génocide.

Hannah Arendt dénonce dans Le système totalitaire, **la **parfaite connaissance descrimes du régime nazi par la population.

Ni ignorance, ni manipulation mentale, quoi alors ? Comment une population entière se rend-t-elle complice de tels crimes ? Quel rapport entre latechnique et le totalitarisme ? Le mouvement technique du système est toujours là, tout fonctionne et son mouvement est assumé par la logique de la technique, par cette cohésion qu'assurent des milliers deprofessionnels consciencieux.

Tous les éléments du système sont à leur juste place ; ça marche, les trains partent à l'heure.

Et du coup, il ne viendrait à personne l'idée de remettre encause toute la logique du système qui marche si bien : c'est ce que nous appellerons la logique aveuglante de la technique.

et la finalité globale du système n'est jamais vraimentquestionnée.

On ne demande pas à l'être humain de se référer à lui-même mais d'être en conformité avec le système.

La technique emprisonne donc l'individu dans un système cohérentqu'il a du mal à.

Il y a comme un pouvoir de la structure, une force du système technicien, dans lequel l'individu n'est qu'un relais qui réagit mécaniquement : la technique produitl'automatisation de l'existence et la disparition de la conscience : tendu vers l'objectif qui lui a été fixé (conduire le train), l'agent ne voit plus la portée de ses actes.

La technique nousdonnerait donc l'illusion de la maîtrise et du pouvoir : en fait, elle nous dépossède. Partant de ce constat d'échec, celui de l'homme face au pouvoir technique, on peut se demander quel sens peut avoir une limitation de la technique.

Quel rôle et même quel devoirl'homme a-t-il envers lui-même, conscient des risques de ce développement outrancier de la technique ? Mais finalement l'homme n'est-il pas le premier de ces dangers, par sa volonté depuissance toujours plus grande, ses choix… ? *Maîtriser le pouvoir de la technique c'est une manière de la limiter.

*La technique semble faire peser une menace sur le sens de notre vie, traduisant ce qui jusqu'alors avait été considérécomme une source de progrès évident pour l'homme en une menace.

Nous nous demandions autrefois comment protéger l'homme de la nature, aujourd'hui c'est l'inverse.

Et lesscientifiques, au lieu d'être les sauveurs du genre humain redeviennent alors subitement des “apprentis-sorcier”, comme l'exprime le mythe de Frankenstein.

Manière de dire que latechnique nous échappe de sorte que nous craignons de ne plus maîtriser notre propre maîtrise.

Aujourd'hui la crainte de voir la technique détruire notre environnement, menacer l'emploi,du fait que le travail humain est progressivement remplacé par l'usage des machines.

Le monde semble alors effectivement être “en danger de technique”: avec la pollution de la nature parexemple, l'épuisement des ressources énergétiques, mais aussi, avec la consommation galopante qui fait de nous des esclaves de la modernité, du confort.

En outre, la menace atomiquepèse aussi sur nos têtes, épée de Damoclès de l'humanité, instaurant à l'échelle planétaire un équilibre de la terreur et il semble que ce ne soit pas la paix définitive qui soit advenue maisque ce soit plutôt la guerre généralisée et la catastrophe mondiale qui n'ont pas encore eu lieu.

Le progrès technique est aussi l'histoire de la délégation à des machines de la capacitéd'action, de calculer, de savoir faire humain… Sera-t-il aussi la délégation de la capacité de penser, de sentir, de vouloir ? A priori, il n'y a pas de limites aux interventions techniques surl'homme et sur le monde, si l'homme ne se considère que comme un moyen et non comme une fin.

Aujourd'hui, l'apparition de problèmes tels que la génétique et la pollution, témoigned'un manque de prise de conscience des sociétés par rapport à ces questions.

Si l'homme ne détermine pas pourquoi il agit, quel monde il souhaite, où il veut parvenir, et quelles limites ildoit assigner à la technique, le “progrès” pourrait bien l'anéantir.

Mais ne fait-on pas porter à la technique des problèmes qui ne relèvent pas d'elle ? La technique aurait un double visage : elle est capable d'engendrer des dangers et des peurs relatifs à ce qu'il y a d'artificiel et d'envahissant en elle.

Décider si la technique permettra unmonde meilleur ou si nos grandes peurs sont légitimes, cela tient du pur pari.

Faire le procès de la technique n'est pas chose facile.

Si les appréciations portées sur la technique sont sidiverses et si variées c'est sans doute parce qu'elles se fondent sur des saisies partielles du champ illimité des techniques.

On ne se représente pas le même jugement de valeur sur latechnique selon qu'on se la représente par l'image d'une bombe thermonucléaire ou d'un stimulateur cardiaque, d'une chaise électrique ou d'un moulin à vent.

Il semble difficile de parler de“la” technique comme d'une réalité singulière.

Ainsi, “les” techniques étant inséparablement menace et progrès portent toujours en elles leur potentialité de catastrophes et d'amélioration.Face à cette double orientation, l'homme doit accéder à la conscience des risques que ses propres activités font peser sur le futur, qu'il prenne aussi la responsabilité de l'usage qui est faitde l'ensemble des découvertes scientifiques et du choix de l'utilisation des techniques.

Il ne faut pas en somme que les progrès de la technique se fassent au détriment des progrès humains,écologiques et économiques.

Ainsi, si la technique est bien un processus irréversible, se pose la question de ses limites et de son usage, c'est à dire des fins que l'homme est capable de sedonner à lui-même.

Le problème est donc de savoir si les outils politiques (principe de précaution pour lutter contre les risques technologiques par exemple) dont les hommes disposentseront suffisamment efficaces pour anticiper, prévoir et contrôler les conséquences de nos activités techniques. Il ne sert à rien de faire une critique facile de la technique qui permet un incontestable mieux être.

En réalité, ce n'est pas la technique en elle-même qui est en question (puisqu'elle seratoujours en même temps menace et progrès), mais les moyens politique et juridiques que nous avons d'avoir un pouvoir sur elle, de la maîtriser et de lui assigner des fins.

Or, dans certaincas, nous n'avons aucun pouvoir et le développement de la technique nous paraît inanticipable La question est donc celle du pouvoir de l'homme face aux grands risques et aux possiblesscénarios catastrophes (le débat sur les OGM par exemple le montre).

Il faut orienter et contrôler la technique qui n'a pas en elle-même de fins, et ceci est une question par essenceéthique, politique et non plus technique.

Le problème n'est donc pas lié uniquement à la technique qui comme phénomène total et culturel est incontestablement progrès, mais à son usagesocial qu'il faut dominer sous peine d'être nous-mêmes soumis à l'accélération de la technologie et de provoquer des catastrophes incontrôlables.

Notre siècle vient de se réveiller d'unecertaine illusion (celle du progressisme des Lumières) et du rêve d'un progrès permanent et sans risque : la science aujourd'hui n'est plus toujours un bienfait et derrière son savoir se cachedes pouvoirs qui peuvent engendrer toute une série d'inquiétudes économiques, écologiques, éthiques, sociales,… etc.

Ainsi, si un discours optimiste sur la libération de l'homme par latechnique paraît aujourd'hui manquer de lucidité, il n'en reste pas moins qu'un discours anti-technique (dans le style de l'écologie radicale) paraissent utopiques et même dangereux aussi.

Ilne s'agit donc pas de refuser la technique (et donc l'aspect essentiel de la culture de l'homme) mais de se donner les moyens de la maîtriser en dénonçant les illusions technocratiquescertes, et en légiférant dans chaque domaine concerné.

Le problème ultime touche donc bien à la question de l'organisation politique des sociétés: le pouvoir politique et démocratique sera-t-il suffisamment fort pour mettre en place une maîtrise intelligente de la technique ou bien sommes nous déjà devant un phénomène mondial dont l'auto-développement échappe aupouvoir de la volonté de l'homme ? Le pouvoir technique apparaît à priori sans limite tant il imprègne notre vie au quotidien, la modifie sans cesse, et parfois la contrôle.

Les peurs qu'il suscite semble alors légitimes : disposerde sa liberté encore et toujours est la première revendication de chacun.

Mais le vrai danger n'est pas tant celui d'une soumission ou d'une aliénation par la technique que celui qui vient del'homme lui-même, de ses propres choix, de sa volonté de puissance, de son désir d'acquérir pouvoirs après pouvoirs.

“Il est maintes choses terribles mais rien de plus terrible que l'homme”nous dit Sophocle dans Antigone.

**Le problème est donc en définitive éthique, juridique et politique : il faut que l'homme prenne la responsabilité de l'usage qui est fait de l'ensemble destechniques, des découvertes scientifiques et du choix de l'utilisation de ces techniques.

Ceci suppose une réinterrogation radicale sur notre manière de vivre et de consommer, et cetteréflexion est urgente tant sont nombreux les risques qui pèsent sur notre avenir.. »

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