Databac

LA PHILOSOPHIE PATRISTIQUE par Jean PÉPIN

Publié le 18/06/2020

Extrait du document

Ci-dessous un extrait traitant le sujet : LA PHILOSOPHIE PATRISTIQUE par Jean PÉPIN. Ce document contient 2523 mots soit 5 pages. Pour le télécharger en entier, envoyez-nous un de vos documents grâce à notre système gratuit d’échange de ressources numériques. Cette aide totalement rédigée en format pdf sera utile aux lycéens ou étudiants ayant un devoir à réaliser ou une leçon à approfondir en Philosophie.

« Mais ces ressemblances dans la matérialité de la phrase du Timée sont elles-mêmes de peu de prix au regard des analogies dans l'interprétation; car les chrétiens, on vient de le voir, entendaient du Dieu unique ce que le dialogue écrit de 1' « auteur et père de l'univers »; or une telle, assimilation se révèle peu conforme à l'intention même de Platon, qui traite ici du démiurge, et non pas du Dieu suprême qu'il identifie au Bien; mais elle ne résulte pas d'une initiative chrétienne, puisqu'on peut déjà l'observer chez les moyens platoniciens, qui, à la différence de Platon (et, plus tard, du néoplatonisme), attribuaient la fonction créatrice au . Dieu suprême. Une autre péricope platonicienne vouée à une grande fortune appartient au Thêétète, 176 ab : « Il faut s'efforcer de fuir au plus vite d'ici-bas vers là-haut. Fuir, c'est devenir semblable à Dieu autant qu'il est possible; devenir semblable à Dieu, c'est se rendre juste et saint en esprit. » On sait que, dans son traité Sur le beau (Ennéade, I, 6, 8), Plotin s'est souvenu de ce passage, en l'amalgamant au symbolisme d'Ulysse regagnant sa patrie d'Ithaque : Enfuyons-nous dans notre chère patrie, voilà le vrai conseil qu'on pourrait nous donner. Mais qu'est cette fuite? Comment remonter? Comme Ulysse, qui échappa, dit-on, à Circé la magicienne et à Calypso, c'est-à-dire qui ne consentit pas à rester près d'elles, malgré les plaisirs des yeux et toutes les beautés sensibles qu'il y trouvait. Notre patrie est le lieu d'où nous venons, et notre père est là-bas. Que sont donc ce voyage et cette fuite? Ce n'est pas avec nos pieds qu'il faut l'accomplir; car nos pas nous portent toujours d'une terre à une autre; il ne faut pas non plus préparer un attelage ni quelque navire, mais il faut cesser de regarder et, fermant les yeux, échanger cette manière de voir pour une autre, et réveiller cette faculté que tout le monde possède, mais dont peu font usage (traduction Bréhier). Mais la postérité du texte du Théétète, qui a été bien étudiée par Merki, commence bien avant Plotin. Le moyen platonicien Albinus avait rapproché cette invitation à « devenir semblable à Dieu » du précepte stoïcien de « vivre en suivant la nature », et cette assimilation est bien symptomatique de l'éclectisme qui inspirait le platonisme du temps. C'est d'Albinus que Clément d'Alexandrie doit tenir l'idée du même rapprochement, qui ne pouvait guère lui venir spontanément à l'esprit; de plus, le recours à la notion stoïcienne d'akolouthia (« vivre en suivant la nature ») permet à Clément de comparer à la formule de Platon un précepte du Deutéronome, xiii, 5 sur la « marche à la suite de Dieu »; la citation de la page de Clément (Stromate, II, 19, 100; 3-101, 1) permettra de se rendre mieux compte de cette confrontation subtile, dans laquelle l'auteur chrétien laisse entendre que Platon pourrait lui-même dépendre de Y Ancien Testament ; la voici : Platon le philosophe, proposant comme fin le bonheur, dit qu'il consiste à « ressembler à Dieu autant que possible » peut-être se rencontre-t-il ainsi avec le principe de la Loi; (...) peut-être aussi s'est-il laissé enseigner en son temps par certains savants, puisqu'il avait toujours soif d'apprendre. La Loi dit en effet : « Marchez derrière le Seigneur votre Dieu, et gardez mes commandements. » La Loi appelle, en effet, l'assimilation une « marche à la suite »; et celle-ci rend semblable autant qu'il est possible (...). C'est pourquoi les stoïciens ont décrété que la fin de l'homme est de vivre conformément à la nature, intervertissant ainsi les noms de Dieu et de la nature d'une manière indécente, puisque le domaine de la nature, ce sont les plantes, les semences, les arbres et les pierres (traduction Mondé-sert). Mais il est un autre texte biblique, infiniment plus important, avec lequel les Pères ont confronté la sentence du Théétète, 176 ab; c'est la Genèse, I, 26, où on lit : « Puis Dieu dit : « Faisons l'homme à notre image et selon notre ressemblance. » De ces deux mots, « image » et « ressemblance », le second (kath'homoiôsin) se trouve être celui-là même que Platon employait en parlant de « devenir semblable » à Dieu. ,11 était inévitable que les Pères,, pénétrés comme ils l'étaient de philosophie platonicienne, songeassent à comparer les deux formules ; il fallait pour cela introduire, dans le texte. de la Genèse, une différence de sens entre la création « à l'image » et la création « à la ressemblance », en entendant par la première expression l'ébauche d'une relation entre l'homme et Dieu dont la seconde expression marquerait la plénitude. Il est intéressant de noter que les Pères apologistes, Tatien en particulier, ne voient pas de différence entre l' « image » et la « ressemblance », les deux mots leur paraissant formuler la même participation surnaturelle de l'homme à la vie divine; ils s'abstiennent aussi de tout rapprochement avec Platon. Mais la situation, change du tout au tout avec Clément d'Alexandrie, comme on peut le voir par le texte du IIe Stromale, 22, 131, 5-6 que voici : « Quand Platon nomme bonheur une vie qui est en accord et en harmonie avec elle-même, et parfois aussi la perfection dans la vertu, il rapporte cela à la science du bien et à la ressemblance avec Dieu, ressemblance (homoiôsin) qui consiste, déclare-t-il, à « être juste et saint en esprit ». N'est-ce pas ainsi que, d'après l'interprétation de certains des nôtres, l'homme a reçu aussitôt à sa naissance « l'image », et qu'il va plus tard, à mesure qu'il devient parfait, accueillir en lui « la ressemblance » (kath'homoiôsin)? » (traduction Mondésert). « D'après l'interprétation de certains des nôtres », dit Clément; c'est la preuve qu'il n'est pas le premier à entendre différemment, dans le texte biblique, la mention de l'image et celle de la ressemblance; on pense généralement que les prédécesseurs auxquels il fait allusion désignent au premier chef saint Irénée, qui introduit en effet une distinction entre la création « à l'image », appliquée par lui à la constitution matérielle de l'homme, et la création « à la ressemblance », qu'il comprend comme un don de l'Esprit. Mais rien ne permet de croire que ce n'est pas à Clément que reviendrait l'initiative d'avoir rapproché les paroles de la Genèse de la formule du Thêêtète. L'aristotélisme Les œuvres que composa Aristote appartiennent, on le sait, à deux genres assez différents par l'inspiration philosophique, la forme littéraire, la destination et le retentissement. Dans la première partie de sa carrière, se trouvant encore sous l'influence de Platon, le philosophe avait publié un grand nombre d'ouvrages, souvent en forme de dialogues, écrits dans un style brillant à l'intention d'un large public; ils constituent ce que l'on appelle son œuvre « exotérique ». Plus tard, en possession d'une pensée personnelle en grande partie hostile au platonisme, devenu à son tour chef d'école, il composa des traités dits « acroamatiques »; étroitement liés à son enseignement qu'ils préparaient ou dont ils résultaient, ces ouvrages austères et techniques s'adressaient à ses disciples, eux-mêmes philosophes professionnels, et n'étaient point destinés à être divulgués. Le fait est que, pour diverses raisons, ils ne le furent pas avant le Ier siècle avant notre ère : ce sont les grands traités qu'on lit aujourd'hui encore, la Physique, la Métaphysique, les diverses Morales, etc. En revanche, les écrits exotériques sont perdus pour nous, qui n'en connaissons que de maigres fragments et des témoignages indirects ; mais une grande partie de l'Antiquité les avait en main, et même, jusqu'au Ier siècle avant Jésus-Christ, ils formaient la seule partie de l'œuvre d'Aristote que l'on connût généralement. C'est dire qu'ils ont exercé une influence considérable sur la pensée ancienne, avant que celle-ci ne fût en mesure d'avoir accès aux traités scolaires. Cette dualité de l'œuvre aristotélicienne se reflète assez bien dans l'ancienne littérature chrétienne. Les Pères du IIe siècle n'ignorent pas entièrement l'Aristote scolaire; Clément d'Alexandrie se montrera informé de la distinction entre ouvrages exotériques et ésotériques; mais, comme les philosophes contemporains dont ils sont tributaires, c'est ...»

« 1 / 2 LA PHILOSOPHIE PATRISTIQUE par Jean PÉPIN LES PÈRES DE L'ÉGLISE ET LES COUR.A:NTS DE LA PHILOSOPHIE GRECQUE , Le platonisme D'une façon très générale, ce que l'on peut appeler la philosophie .patristi que apparaît comme le résultat d'une synthèse tentée entre la tradi!ion philosophi que grec que et les exigences doc�)C1S de !'Ecriture.

L'importance prise par le premier de ces composants est variable selon les auteurs; du moins n'est-il jamais totalement absent, même èhez les Pères qui font profession de rompre_ avec la culture païenne.

Aussi, pour qui veut esquisser les grandes li gn es de la philosophie .patristi que, la première démarche doit-elle être de caractériser les principaux courants doctrinaux que.

le paganisme offrait concrètement aux Pères de l'Église.

C'est sans aucun doute le platonisme qui les a le plus séduits.

Mais il faut savoir que le platonisme anti que ne coïncide pas exactement avec le système doctrinal que les historiens d'aujourd'hui s'accordent plus ou moins à définir à partir de la lecture des dialogues de Platon, Au cours de la très longue période qui s'étend de la mort du philosophe, vers 348 avant noire ère, à la fermeture de l'école d'Athènes par Justinien, en 529 après Jésus-Christ, le platonisme fait, 2 / 2. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles