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Dissertation Manon Lescaut: comment le roman Manon Lescaut peut plaire aux lecteurs alors que ses personnages sont immoraux.

Publié le 02/01/2024

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« Le roman est le seul genre qui n’a pas été défini par Aristote dans sa Poétique, d’où son impopularité pendant plusieurs siècles.

Cependant, le roman est le genre littéraire montant au XVIIIe siècle, gagnant en popularité dans la classe bourgeoise qui est la classe dominante à cette époque-ci. Les romanciers cherchent à écrire une histoire la plus réaliste possible, c’est ce qu’on appelle “l’effet de réel”.

L’Abbé Prévost se prête à l’écriture de romans, dans une série intitulée les Mémoires d’un homme de qualité qui s’est retiré du monde.

Il s’agit d’une série de romans-mémoires, donc des romans où l’on retrouve les mémoires d’un personnage fictif, le marquis de Renoncour.

Prévost publie en 1731 le septième et dernier tome de cette série, sous le titre L'histoire du chevalier Des Grieux et de Manon Lescaut.

Comme son nom l’indique, ce dernier tome relate l’histoire du chevalier Des Grieux, noble promis à un grand avenir militaire.

Celui-ci s’éprend de Manon Lescaut, qu’il rencontre par hasard à Amiens.

Mais Manon le trompe bien vite, l’entraînant dans une lente descente aux enfers.

Ils enchaînent rapidement les péripéties, et Des Grieux multiplie les recours au vice. Montesquieu lit ce roman en 1734, et suite à sa lecture, il écrit dans ses Pensées : “J’ai lu ce 6 avril 1734 Manon Lescaut, roman composé par le P.

Prévost.

Je ne suis pas étonné que ce roman, dont le héros est un fripon et l’héroïne une catin qui est menée à la Salpêtrière, plaise, parce que toutes les actions du héros, le chevalier Des Grieux, ont pour motif l’amour qui est toujours un motif noble, quoique la conduite soit basse.

Manon aime aussi, ce qui lui fait pardonner le reste de son caractère.”.

En d’autres termes, Montesquieu estime que bien que Manon Lescaut soit un roman en principe immoral, il est normal qu’il plaise, notamment parce que les exactions des personnages sont motivées par l’amour, qui est selon lui un motif noble. Ainsi, pour l’étude de cette œuvre, nous pouvons nous demander comment le roman Manon Lescaut peut plaire aux lecteurs alors que ses personnages sont immoraux. Pour répondre au problème posé, nous verrons tout d’abord qu’il s’agit d’un roman avec des personnages immoraux, avant de constater que le plaisir de la lecture provient avant tout des liens entre les différents personnages.

Pour finir, nous étudierons les autres éléments du récit qui font la popularité du roman. Tout d’abord, nous pouvons dire que Manon Lescaut relate l’histoire de personnages en marge de la société, rongés par le vice. A cet effet, on remarque en premier lieu que les personnages principaux sont vicieux.

C’est le cas du personnage éponyme, Manon.

Et pour cause, il s’agit d’une prostituée, le chevalier Des Grieux parlera même à de multiples reprises de son “penchant au plaisir”.

Il l’appelle d’ailleurs de nombreuses fois dans le roman “perfide”, en référence à toutes les fois où elle l’a trompé et délaissé alors qu’il lui restait fidèle.

De plus, Manon se révèle en marge de par le fait qu’elle ne correspond pas à ce qu’on attend d’une jeune femme de l’époque, à savoir docilité, pudeur et chasteté.

Quant à Des Grieux, il s’agit également d’un personnage marginalisé par la société.

C’est à la base un chevalier issu d’une ancienne famille noble, et il est promis à un grand avenir au sein de l’ordre de Malte.

Cependant il quitte tout et sombre dans le vice lors de sa rencontre avec Manon.

On note une gradation dans les vices de Des Grieux : il commence par mentir à son ami Tiberge, puis il se fait proxénète de Manon, avant de recourir au meurtre pour s’échapper de prison.

Cela fait donc bien des deux personnages principaux des personnages en marge de la société. Par ailleurs, on retrouve autour des héros d’autres personnages eux aussi en marge de la société, tout comme Manon et Des Grieux.

On pense par exemple au frère de Manon.

Son arrivée dans la vie des deux amants est synonyme pour eux de nouveaux malheurs.

Il s’agit d’un garde du corps, que Des Grieux présente comme un “être brutal et sans principe d’honneur”.

En effet, il triche aux jeux et vit aux crochets des héros.

Il exerce aussi une mauvaise influence sur Des Grieux, le poussant à devenir le proxénète de Manon pour subvenir à ses besoins, et le faisant entrer dans une association de tricheurs.

C’est donc un personnage qui incarne les bas-fonds de la société de l’époque, lui aussi en marge.

Un autre bon exemple est M.

de T., qui bien qu’il semble être un modèle de vertu, se révèle lui aussi un personnage immoral.

M.

de T.

est le fils d’un des directeurs de l’Hôpital.

Manon est enfermée à l’Hôpital après avoir tenté de se servir de M.

de G.

M.

pour subvenir à ses besoins, en se prostituant et en faisant passer Des Grieux pour son frère.

Cependant M.

de G.

M.

a découvert la supercherie, et a fait enfermer Des Grieux à Saint-Lazare et Manon à l’Hôpital.

Des Grieux s’évade de Saint-Lazare avec l’aide du frère de Manon, puis il fait la connaissance de M.

de T..

Et bien qu’il s’agisse d’un noble, et qu’il paraisse vertueux, il va aider Des Grieux à faire évader Manon de l’Hôpital, en la faisant passer pour un homme, ce qui fait de lui un personnage aussi immoral que les autres. Enfin, si le roman met en scène des personnages immoraux, il dépeint surtout une société corrompue.

En effet, Manon Lescaut prend place dans un cadre réaliste, très proche de celui dans lequel vivait l’Abbé Prévost au XVIIIe siècle.

Ce siècle, bien qu’étant celui du bouillonnement intellectuel des Lumières, est aussi celui où la société française a connu un grand relâchement de ses mœurs, dû à la mort de Louis XIV en 1715.

Cela a notamment ouvert la voie au libertinage, et c’est ce que relate Manon Lescaut.

Ce roman fait donc une critique de la société, entièrement rongée par le vice.

Ainsi, lorsqu’il se justifie auprès de son père, Des Grieux lui dit : ”une maîtresse ne passe point pour une infamie dans le siècle où nous sommes”.

Et pour cause, tous les hommes entretiennent des maîtresses, et même les grands aristocrates tels que M.

de B.

et M.

de G.

M. paient Manon.

En fait, Manon et Des Grieux servent de révélateurs de la corruption de la société, en perte de repères moraux. Ainsi, Manon Lescaut met en scène des personnages immoraux, mais simplement pour montrer que c’est toute la société qui est corrompue et rongée par le vice. Dans un second temps, nous constaterons que le plaisir de la lecture de ce roman provient des liens qui lient les différents personnages. Cela s’explique premièrement par le fait que l’amour est celui qui mène les péripéties. Effectivement, toutes les actions de Des Grieux sont motivées par l’amour qu’il ressent pour Manon. Il dit d’elle que “jamais fille n’eut moins d’attachement qu’elle pour l’argent.

Mais elle ne pouvait être tranquille un moment avec la crainte d’en manquer”.

Et c’est justement pour pouvoir payer tous ces divertissements auxquels Manon est si attachée qu’il triche aux jeux et vole.

C’est également par amour pour elle qu’il suivra le convoi jusqu’au Nouvel-Orléans alors qu’il aurait pu rester en France.

On remarque donc bien que c’est l’amour qui mène les actes de Des Grieux, dans son extrême fidélité.

Par ailleurs, Manon, bien que relativement volage, a quand même l’air d’aimer le chevalier en retour.

En effet, dans la deuxième partie, elle éconduit le prince italien en le ridiculisant devant Des Grieux.

Elle parle de Des Grieux comme de l’homme qu’elle a “juré d’aimer toute sa vie”.

C’est donc bien une preuve de fidélité et d’amour de la part de Manon, et là aussi, l’amour a mené les péripéties et a conduit Manon à renvoyer le prince italien. D’autre part, dans l’œuvre, l’amitié est une relation très présente qui a de nombreuses incidences sur l’histoire.

Ainsi, Des Grieux est entouré d’amis, qui font beaucoup de bien pour lui. C’est notamment le cas pour Tiberge, l’ami d’enfance de Des.... »

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