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BERGSON ou La mémoire de la vie par Gérard Guest

Publié le 17/06/2020

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« Cet Un est totalité sympathique, est comme est un être vivant : le plus éloigné y est proche Car, dans un être vivant, qui tend à l'unité, rien n'est à ce point éloigné qu'il ne soit proche, de par la tendance naturelle de l'unité vivante à la sympathie. Plotin, Ennéades, IV, 4, 32. L'absolu : mode d'accès Quelle est la voie, naturelle et sans artifice, qui seule nous conduirait au cœur de l'être ? En quel sens le « cœur de l'être » ne peut-il être conçu comme philosophiquement accessible que si l'on en vient à pouvoir supposer, avec quelque présomption de plausibilité, non seulement qu'il y a quelque chose comme un « cœur » de l'être, mais encore que le nôtre bat, pour ainsi dire, avec lui, d'une « vie » dont, non seulement le rythme discret, discontinu, mais l'intensité, l'élan concret et continu, sont avec ceux du Tout lui-même dans une relation d'harmonie et comme de sympathie analogique ? Comment trouver la voie d'une telle coïncidence (qui ne soit pas seulement de juxtaposition, mais de fusion) avec l'être du Tout, en dehors de la supposition métaphysique d'une « vie » du Tout qui esquisserait dès toujours dans l'intimité de la nôtre comme la prescience naturelle et intuitive d'une telle voie ? Comment discerner une telle voie si elle ne s'était pas toujours déjà ouverte en nous, dans l'intimité d'une «mémoire» et d'une «intuition» où s'exprimât dès toujours l'«élan» présupposé d'une « vie » de l'être ? — Telle est, diversement formulée, l'unique question qui meut (et, pourrait-on dire, émeut), puis oriente méthodiquement la quête philosophique de Bergson, dans l'effort continu qui fut le sien pour conférer à cette question métaphysique la forme qui pourrait lui permettre — à partir du terrain des faits positifs, de la science, et de l'introspection psychologique — de recevoir une réponse susceptible de vérification. — Ce que Bergson présentait comme constituant l'un des objets de son grand ouvrage de 1907, L'Evolution créatrice, peut être considéré comme l'objet essentiel de tout cet effort inlassable d'expression d'une question, en quoi consiste sa philosophie : « montrer que le Tout est de même nature que le moi, et qu'on le saisit par un approfondissement de plus en plus complet de soi-même ». Tout se passe comme si la question d'un accès possible au cœur des choses n'était correctement formulée que si elle portait inscrite en elle la présupposition d'une réponse possible : la seule qui puisse rendre compte de la légitimité philosophique de l'« intuition » comme méthode. La question d'un accès intuitif possible au cœur des choses n'a de sens que si l'on suppose l'identité absolue de l'être et de la vie, identité qui institue la vie du moi, au sein de l'être, comme méthode et comme voie privilégiée par l'être, jusqu'à l'intimité du Tout. La vie, à supposer qu'elle puisse, par l'intuition, prendre conscience de l'intimité d'être qui en est le secret, se révèle être la voie royale qui conduit au cœur du Tout. L'intuition de la vie est ainsi, pour qui sait de nouveau coïncider avec le mouvement qui la caractérise, la méthode même de l'être. La philosophie est alors essentiellement cet exercice spirituel qui, par-delà les représentations schématiques et spatialisantes du langage et de l'intelligence, consiste à ressaisir « de l'intérieur» le mouvement même de la vie, pour se laisser conduire par les voies qui sont les siennes jusqu'au foyer même de la vie. La méthode est alors le « bon usage » de la vie, celui-là même qui sait utiliser, aux fins d'une connaissance irréductible à la seule intelligence, l'énergie (spirituelle) déployée par la vie dans son insondable dépense, afin d'en remonter, et comme d'en contracter le cours dans la mémoire, jusqu'à atteindre intuitivement aux sources vives où l'« élan » de la vie est supposé puiser lui-même. Le temps et la « durée » « Je m'aperçus, à mon grand étonnement, que le temps scientifique ne dure pas. » Cette intuition fondamentale gouverne de l'intérieur la pensée de Bergson. Elle en fonde la démarche dans une critique de la spatialisation du temps par l'« éléatisme » de l'intelligence. — Lorsque la science de la nature prétend mesurer le temps, elle doit nécessairement en convertir la donnée immédiate en une projection médiate qui est spatiale : elle ne saurait jamais donner la mesure objective que de l'espace parcouru par un mobile dont le mouvement est supposé uniforme. Ce qui revient à dire qu'elle ne mesure jamais le « temps qui passe » entre deux événements, que par ce procédé indirect qui consiste à compter la quantité dénombrable de « périodes » d'un mouvement supposé « isochrone » (par exemple de « tours d'horloge »), qui pourraient « avoir lieu » et « trouver place » dans l'intervalle entre le premier et le second événement, eux-mêmes supposés accomplis et figés. C'est ainsi que procède la mesure du temps, alors même qu'elle se propose de mesurer combien un mouvement ou un état de choses ont « duré ». Pour les dispositifs de mesure objective du temps, ce que « dure » un mouvement n'est jamais exprimable qu'en termes de quantité de mouvements supposés constants. Aristote définit en ce sens dans sa Physique le temps (chro-nos) comme «nombre du mouvement» (arithmos kinè-séôs). — Mais la périodicité supposée « isochrone » d'un mouvement ne suppose-t-elle pas déjà, pour pouvoir prétendre s'y régler, une expérience et une conscience « intimes » du temps qui passe ? Comment puis-je assurer sans cela que telle période révolue de tel mouvement a « duré » exactement autant de temps que telle autre ? La vérification de la régularité de nos mouvements d'horlogerie, fondée sur la division mathématique en parties rigoureusement égales entre elles, des grandes révolutions cosmiques (telle l'année solaire), accomplit encore la même présupposition de régularité, invérifiable à rigoureusement parler. Comment puis-je savoir, sauf à faire l'expérience intime de la constance du temps, que telle heure a duré autant que la précédente, telle année astronomique autant que telle autre ? On pourrait très bien concevoir qu'une accélération supposée des mouvements du monde demeure à jamais insensible à nos procédés de mesure les plus sophistiqués. La vitesse des mouvements, que sont ces instruménts de mesure, croissant selon le même rapport, les unités périodiques de ces mouvements continueraient d'entrer un même nombre de fois dans l'intervalle de temps des mouvements qu'ils mesurent. Supposés constants alors qu'ils ne le seraient pas, ces mouvements continueraient à être tenus pour « synchrones » à un mouvement du monde qui ne le serait ni plus ni moins. — Seul, dans ces conditions, notre sens subjectif de la «durée» intime, à supposer qu'il puisse faire l'épreuve qualitative d'une forme de « constance » qui lui fût propre, nous ferait peut-être encore « trouver le temps long », ou éprouver le sentiment que le temps « passe étrangement vite ces derniers temps »... Mais sans même présupposer un tel dérèglement cosmique, nous éprouvons couramment combien une heure, pourtant comptée au rythme d'horloges dont nous ne contesterions pour rien au monde la régularité supposée, peut nous « paraître longue » ou nous « sembler brève », lorsque, le plus naturellement, nous nous confions à cette conscience intime, qualitative, irréductible à toute mesure quantitative, du temps vécu et subjectivement éprouvé : à cette conscience vive du temps qualitatif, que Bergson nomme la « durée intérieure ». La découverte de la « durée » C'est parce que la notion de nombre suppose la saisie simultanée d'une juxtaposition d'objets, que toute entreprise de mesure du temps en réduit le flux et la succession purs à des représentations d'intervalles coexistants et jux-taposables. Mais l'analyse fait apparaître deux espèces distinctes de multiplicités dénombrables. Si les objets matériels peuvent être dénombrés dans l'espace même où ils se présentent, distincts et juxtaposés, les « états purement affectifs de l'âme », qui ne sont point donnés dans l'espace, mais bien dans la « durée » propre au sens intime, doivent, pour devenir dénombrables, être projetés dans l'espace d'une figuration symbolique, où l'espacement de leur représentation fasse coexister leurs moments successifs. Par là seulement la succession propre aux états de conscience devient objectivement dénombrable. Ainsi, lorsque nous parlons du temps, pensons-nous le plus souvent à quelque milieu homogène (telle une ligne) où nos états de conscience viendraient s'aligner et se juxtaposer (dans un espace de coexistence qui en abolit le mouvement et la succession sut generis) pour former une « multiplicité distincte », ou « simultanée ». De même, nous ne parlons de I'« intensité » plus ou moins « grande » d'un état de conscience, que par une artificielle transposition de la « qualité pure » selon laquelle il est irréductiblement vécu, dans l'ordre de la quantité spatiale. — Mais demandons à la conscience de s'isoler du monde extérieur, de faire abstraction de toute référence à une extériorité spatiale, de rentrer en elle-même pour coïncider avec le sens intime de sa « durée intérieure ». Cette « vraie durée » a-t-elle en elle-même le moindre rapport avec l'espace ? avec aucune quantité dénombrable ? N'est-elle pas, au contraire, un temps, une « durée», qui n'a rien d'un milieu où nos états de conscience se succéderaient d'une succession arrêtée, distincte, discontinue, dénombrable, telles des quantités discrètes ? — L'« intuition » de la « pure durée » nous la fait éprouver comme tout autre que cette succession et ce temps discontinus et dénombrables, dont la conscience réfléchie, le langage, la science et l'intelligence donnent une représentation toujours spatialisante. Même successifs, les faits de conscience ont l'étrange propriété de s'interpénétrer, de se réfléchir mutuellement, exprimant qualitativement le « progrès » de la vie indivise de l'âme. La représentation du temps comme milieu homogène, celle de la vie intérieure comme consécution linéaire d'événements demeurant extérieurs les uns aux autres, sont donc dues à « l'intrusion de l'idée d'espace dans le domaine de la conscience pure». Seule cette intrusion (et la représentation corrélative d'un « déroulement » de la vie de la conscience « dans » un temps conçu comme milieu homogène) introduit l'extériorité, la juxtaposition partes extra partes, qui lui sont pro ...»

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