analyse linéaire acte 1 scène 5 du Malade imaginaire
Publié le 16/04/2024
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Commentaire de l'acte I scène 5 du Malade imaginaire,
extrait
Dernière pièce de Molière, Le Malade imaginaire, créée en 1673 est une
comédie-ballet mettant en scène un bourgeois hypocondriaque, Argan, qui veut à
tout prix que sa fille épouse un médecin.
Mais Angélique est amoureuse de
Cléante.
Heureusement, la vive et insolente servante Toinette sert les intérêts
des amoureux contre son maître dont elle voit avec désapprobation et inquiétude
l'hypocondrie et l'aveuglement.
La prise de position de la domestique ne se fait
pas sans heurt compte-tenu du caractère despotique d'Argan.
La tension entre
les deux ne peut mener qu'au conflit que le spectateur attend, voire espère, tant
la dispute est synonyme de comique farcesque dans la comédie.
Problématique: En quoi le comique de cette scène topique de querelle entre
maître et valet est-il révélateur du caractère des personnages présents?
I- Un affrontement verbal d'égal à égal lignes 1 à 6
II- Une dispute aux allures de farce lignes 7 à 22
I- un affrontement verbal d’égal à égal lignes 1 à 6
Argan a une conception très conservatrice du mariage et du rôle que le
père doit jouer dans la vie de sa fille " Je lui commande absolument de se
préparer à prendre le mari que je dis." l 1.
Pour lui il est normal qu'il s'agisse
d'une relation inégalitaire, où le père détient l’autorité et donne des ordres
comme le verbe "commande" l 1 et le pronom personnel sujet "je" en
témoignent.
L’adverbe "absolument" l 1 produit un effet d'incontestabilité de sa
parole, et participe de cette conception conservatrice.
La proposition
subordonnée relative "que je dis" l 1 indique bien là encore le rôle autoritaire que
joue Argan dans la vie maritale de sa fille : il est normal qu'il choisisse pour elle.
Le pronom personnel de troisième personne "lui" l 1 désigne sa fille.
Cet emploi
est a priori surprenant car la jeune fille est présente, la deuxième personne du
singulier aurait par conséquent dû être employée.
La troisième personne du
singulier indique ici qu'il ne s'adresse pas à elle et qu'elle n'a en rien voix au
chapitre sur cette question qui la concerne directement.
Maître et servante se
disputent à propos du sort d’Angélique comme si cette dernière n’était pas là.
En
s’adressant directement à Toinette pour discuter de l’avenir de sa fille, il
reconnaît néanmoins implicitement l’autorité de la servante.
Dans la réplique suivante, Toinette défie son maître et ose lui répondre.
Nous pouvons observer un parallélisme de construction dans la réparti de
Toinette : elle reprend la phrase de son maître avec la même structure
syntaxique initiale: sujet à la première personne du singulier "je" l 2, pronom
personnel de la troisième personne qui renvoie à Angélique "lui" l 2, verbe
conjugué qui s'oppose sémantiquement à celui employé par Argan "défends" l 2
contre "commande" l 1 et reprise de l'adverbe "absolument l 2".
Cela crée un
effet de parallélisme comique car elle reprend le phrasé d’Argan.
Ainsi, elle se
place sur le même plan que lui, parodie sa manière de parler et défie son
autorité paternelle et de maître en s'insérant dans une question familiale et en se
permettant de le contredire.
Puis, par deux interrogations directes à valeur rhétorique l 3 et 4, Argan
manifeste toute l'indignation que génère en lui l'insolence de Toinette.
L'adjectif
péjoratif "coquine" l 3 attribué à la domestique va également dans ce sens.
Le
substantif "audace" l 3 lui caractérise bien Toinette, que ce soit dans l'extrait
étudié ici ou dans la pièce en général.
L'emploi du déterminant possessif "son" l
4, qui produit par définition un effet de possession, et du substantif "servante" l
3, qui insiste sur sa condition sociale et l'infériorité hiérarchique qui est la sienne,
est une manière de la rappeler à l'ordre en lui remettant à l'esprit le rapport de
sujétion qui l'unit à lui.
Le défi et l’audace de Toinette contraste avec la servitude
qu’elle lui doit.
La réplique de Toinette l 5-6 est lourde de défi et d'insolence.
Une question
rhétorique en effet n'appelle pas de réponse.
En faisant semblant de ne pas
l'avoir compris et en reprenant la parole, Toinette refuse indirectement de se
soumettre à Argan.
De plus, elle critique indirectement son maître sous la forme
d'un aphorisme formulé au présent de vérité générale et présentant les
conditions sociales de manière générale par les déterminants indéfinis "un" et
"une".
Derrière son aspect général, la phrase désigne clairement les deux
protagonistes dans leur joute verbale.
Les deux propositions qui constituent la
phrase donnent un portrait en miroir et opposé des deux personnages: le maître
se voit attribué le manque de bon sens "ne songe pas à ce qu'il fait" tandis que la
sagesse revient à la domestique "une servante bien sensée".
L'effet produit est
bien évidemment comique.
Le défi consiste également dans le fait que Toinette
ose prendre position devant son maître et lui répondre.
Cela accentue l’effet
comique de cette dispute entre maître et servante, où cette dernière dépasse
largement les limites de sa fonction.
II- Une dispute aux allures de farce lignes 7 à 22
Cette deuxième partie reprend un motif farcesque récurrent dans la comédie (et
la farce) : la bastonnade au cours de laquelle une querelle grotesque et risible
entre deux personnages se vide à coups de bâton.
C'est l'emploi du verbe
"assomme" l 7 qui fait basculer la scène d'une habituelle dispute entre maître et
valet en scène de bastonnade, ou du moins de velléité de bastonnade.
C'est bien
entendu l'irascible Argan qui est à l'origine de cette évolution et il se pose en
sujet de l'action avec "je" l 7.
Les didascalies dans la suite de la pièce indiquent
d’ailleurs qu’ils se pourchassent.
La mise en scène participe de ce côté farcesque
de la pièce.
L’interjection "insolente" l 7 témoigne de l’indignation d’Argan face à
l'insolence
réitérée
de
Toinette.
La violence et les injures d'Argan créent par antithèse un contraste
comique avec le discours moralisateur et protecteur de Toinette qui s'exprime
avec une tournure impersonnelle l 8 "Il est de mon devoir de m'opposer aux
choses qui vous peuvent déshonorer." Le substantif "devoir" l 8 donne
l’impression que Toinette s’est investie d’une mission qu’elle se doit d’accomplir.
Elle se donne un rôle qui dépasse les limites de sa fonction, ce qui crée là encore
un effet comique et farcesque en raison de l'inversion des rôles.
De simple
domestique, Toinette endosse le rôle de censeur et de redresseur de torts.
En
revanche, la proposition subordonnée relative "qui vous peuvent déshonorer" l 8
indique qu’elle garde tout de même sa fonction de servante : quoi qu’il arrive,
elle sert son maître et ses intérêts.
Nous avons donc un portrait contrasté du
personnage: bien qu'insolente et provocatrice, elle est profondément attachée à
Argan.
C'est bien entendu ce bon fond qui explique et légitime ses écarts de
conduite et de langage.
La didascalie l 9 rappelle la dimension farcesque de la scène.
Tous les
éléments sont présents: l'état émotif d'Argan "en colère" l 9, le rythme accéléré
de l'action "court" l 9 et l'accessoire principal de la bastonnade "son bâton à la
main" l 9.
La répétition du verbe venir à l'impératif présent "Viens, viens" l 9,
plaçant ainsi la réplique sous le signe de l’injonction forte, indique que la tension
monte et qu'Argan cherche à reprendre l'ascendant sur la servante effrontée et
indocile, comme l'indique également l'emploi du verbe "apprendre" l 9 qui
implique un rapport hiérarchique.
Il commence à perdre patience et le spectateur
peut alors se demander jusqu'où ira cette explosion de colère.
Le verbe "parler" l
10 renvoie ici à la bonne façon de parler pour une servante.
Argan perd patience
et cherche à corriger sa servante qui fait mauvais usage de son langage et de sa
langue trop bien pendue.
La réplique de Toinette l 11 est précédée d'une didascalie qui reprend en
substance celle qui précédait les propos d'Argan: la servante calque le rythme
frénétique de son mettre pour s'en protéger "courant" l 11 et le complément
circonstanciel "d'un bout à l'autre" l 11 donne un aspect désordonné et
chaotique, rajoutant à la confusion de ce dialogue de sourds, et par conséquent
au comique.
Toinette rappelle par l'emploi du verbe "je dois" l 11 son obligation
morale d'intervenir pour veiller sur les intérêts de la famille qu'elle sert.
Le
substantif "folie" l 11 lui relève du lexique médical.
Ainsi, Toinette qualifie le
mariage d’Angélique avec un médecin de trouble comportemental, voire
psychologique.
Ce lexique à la connotation très forte indique clairement qu'un
tel mariage dépasserait la raison.
Les trois répliques suivantes prononcées....
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