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VERLAINE Paul 1844-1896

VERLAINE Paul 1844-1896
1. Vie et œuvres. - 2. La théorie poétique. - 3. La technique. Poète, né à Metz. Vie et œuvres Employé de la compagnie « L'Aigle et le Soleil réunis», puis fonctionnaire à l'Hôtel de Ville, il est surtout assidu aux assemblées des poètes dits du« Parnasse » (lesquelles se tenaient dans les cafés). Aussi l'esthétique de ses premiers recueils (Poèmes saturniens, 1866; Fêtes galantes, 1869) est-elle encore fidèle à l'école « parnassienne »: descriptive, et guère encline à expression du sentiment. Pourtant le deuxième recueil apparaît déjà très personnel, par son libre caprice et son humour:
- Je voudrais être petit chien! - Embrassons nos bergères, l’une Après l'autre. - Messieurs, eh bien? - Do, mi, sol. - Hé! bonsoir la Lune!
Dès cette époque, il s'adonne à l'absinthe. Il malmène sa mère qui n'a cessé (et ne cessera) de subvenir à ses besoins. Un mariage inattendu avec une jeune fille de seize ans détermine une série de « bonnes résolutions », dont son art même subit le contrecoup ; volontiers subtil jusqu'alors, il devient soudain simple et d'une fraîcheur franciscaine : La Bonne Chanson (1870). La Commune, qu'il accueille avec sympathie, lui vaut de perdre sa place de fonctionnaire à l'Hôtel de Ville ; et, bientôt (dès septembre 1871), Rimbaud multiplie les visites au foyer conjugal. Ils s'enfuiront ensemble en Angleterre, puis en Belgique (1872), et les Romances sans paroles (1874, écrites dès 1872) révèlent parfois l'influence d'une personnalité plus accusée que la sienne. En 1873, il tire sur son ami deux balles de revolver, et le blesse. Dans sa prison, à Mons, on lui apprend que sa femme demande la séparation; il se convertit. Aucun rapport, notons-le, avec tant de spectaculaires « conversions » d'écrivains à la mode. D'abord Verlaine est presque inconnu, et sait que ses actes ne remuent guère l'opinion publique. Mais, dès l'enfance, il s'était révélé très enclin à la dévotion, sinon au mysticisme; il y a donc là, bien plutôt, un « retour à Dieu ». Il va s'assagir quelques années durant, de toutes ses forces : professorat en Angleterre et dans les Ardennes (1876-1880); publication de Sagesse (1881), un des plus beaux livres chrétiens de toute la littérature française. D'autres recueils de vers suivront sur le même thème (Amour, 1888; Bonheur, 1891; Liturgies intimes, 1892); assez inégaux, ceux-ci; et d'un zèle qui semble appliqué.
D'autant que notre néophyte déclare, avec un humour un peu suspect, en pareil matière, son intention de donner à chacun de ces recueils catholiques un complément plus mondain. De cette série « complémentaire » et profane, elle aussi fort décevante, parfois, mais inaugurée avec éclat dès 1884 par Jadis et naguère, se détache, parmi quelques œuvres aux noms trop évocateurs, bien souvent, pour pouvoir être cités ici, un chef-d'œuvre: Parallèlement (1889). Œuvre parfaite, égale d'un bout à l'autre; Verlaine y mélange sans aucune disparate des pièces récentes et des œuvres de jeunesse (comme la série des Amies qui ouvre le recueil). Ce titre, d'autre part, résume assez bien la double voie du mystique Verlaine; peut-être a-t-il sincèrement cru qu'entre deux prostituées fatiguées, où entre deux vins, il y avait un Dieu débonnaire (à tout moment disponible, comme le bateau-refuge du -clochard ou la cure de désintoxication), un Dieu qui pour sceller leur réconciliation n'exigerait jamais aucune contrepartie ni même de « ferme propos ». En 1886, sa mère, qu'il avait tenté d'étrangler l'année précédente (un mois de prison), meurt et laisse sans ressources cet homme de quarante-sept ans qu'elle n'a cessé; d'entretenir. Les poètes alors se vendent mal, et Verlaine se fera de plus en plus, pour vivre, prosateur: romancier (Louise Leclercq, qui est son autobiographie sous le nom de Pierre Duchâtelet) et « mémorialiste » (Mémoires d'un veuf, Mes prisons, Mes hôpitaux). Parmi toute cette médiocre production en prose, une œuvre pourtant se détache, qui apporte un démenti à la légende de l'« homme sans dignité » - il était, surtout, pauvre - et montre le véritable sens de l'honneur de l'écrivain : Les Poètes maudits (1884). Par ce livre dont le titre est devenu un cliché, Verlaine rappelle (ou même,- le plus souvent, révèle) aux « lettrés » de son siècle la valeur de Corbière, de Baudelaire, de Villiers de L'Isle-Adam, enfin et surtout de Mallarmé et de Rimbaud, l'un parfaitement inconnu du public, l'autre disparu du monde des lettres depuis dix ans, et dont le nom va devenir aussitôt célèbre. (On publie, dans La Vogue, les Illuminations, et Une saison en enfer.) Paul Verlaine lui-même s'inscrit parmi...


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