THÉODORIC le Grand
Roi des Ostrogoths (493/526). Après avoir battu Odoacre (v.) sur l'Isonzo (28 août 489), à Vérone (30 sept.) et sur l'Adda (été 490), il prit Ravenne le 26 févr. 493 et fit exécuter Odoacre (15 mars). Devenu ainsi le maître de l'Italie, à laquelle il joignit la Rhétie, la Norique, la Pannonie, l'Illyrie, Théodoric se révéla bientôt comme le plus grand des chefs germaniques.
Il favorisa la renaissance de l'empire d'Occident, fit revivre les anciens cadres de Rome, notamment le Sénat, partagea les responsabilités politiques entre Romains et Barbares et choisit comme ministres de grands représentants de la culture latine : Cassiodore, Boèce, Symmaque ; l'Italie y retrouva une prospérité oubliée depuis plus d'un siècle. Théodoric tenta d'exercer son autorité sur les autres nations barbares, maria ses filles à des princes wisigoths ou burgondes et épousa la sur de Clovis. Nommé en 507 tuteur de son petit-fils Amalric, roi des Wisigoths, il régna de fait, chassa l'usurpateur Gésalic, et conserva la Septimanie aux Wisigoths malgré les attaques des Francs. Mais son effort de rapprochement entre les Romains, hostiles à l'hérésie arienne, et la caste militaire des Goths ariens, exclus des emplois civils et du gouvernement, était voué à l'échec. À partir de 524, lorsque Justin, empereur de Byzance, commença à persécuter les ariens, Théodoric se crut menacé par ses propres sujets et usa de représailles : Boèce, accusé de complot, fut exécuté (524) et le pape Jean Ier mourut en prison.
Théodoric le Grand (453-526) ; roi des Ostrogoths, régent de l’Empire romain d’Occident [493-526].
Les chansons de geste allemandes célèbrent le vassal germain héroïque en « Dietrich von Bern » ; le pape Grégoire le Grand le maudit comme hérétique et persécuteur des chrétiens orthodoxes, enfin l’empereur Charlemagne révérait en lui le précurseur de son propre Empire chrétien : il fit transporter à Aix-la-Chapelle, devant son propre palais impérial, la statue de T. qui se trouvait à Ravenne. Qui était cet homme dont l’image présente une aussi grande variété de facettes ?
Il naît à cette époque troublée où les Ostrogoths retrouvent leur indépendance à l’égard des Huns qui les dominaient. En effet, sous le règne d’Attila, des Ostrogoths, dirigés par les frères Valamer, Thiudimer et Widimer du clan royal des Amales, se montrèrent fidèles vassaux des Huns. Appréciés dans l’empire d’Attila comme troupes de combat, ils profitent de l’effondrement de l’Empire hunnique pour entrer au service de l’Empire romain d’Orient en tant que « fédérés ». Cette nouvelle situation consécutive à un traité (455) les oblige, en échange de versements annuels et de l’attribution d’une zone de territoire de l’Empire (la région du lac Balaton), à servir militairement l’Empire. Elle permet au jeune T., le fils du roi Thiudimer et d’une concubine catholique, d’aller en 461 à la cour impériale de Constantinople comme otage. Aussi, pendant neuf ans, de 8 à 17 ans, il assimile la culture de l’Empire romain d’Orient et apprend à en connaître la structure et la direction politico-militaire. Peu après le retour de T. dans sa patrie (470), les Ostrogoths se divisent en deux, une partie se joint aux Wisigoths en Gaule, tandis que l’autre se tourne vers les Balkans sous la direction de Thiudimer, qui meurt et à qui succède T. (471). En s’appuyant sur la force armée de son peuple goth fédéré, le jeune roi participe durant les années suivantes à la lutte pour le pouvoir, qui, sous le règne de l’empereur Zénon, se déroule entre les chefs militaires rivaux pour acquérir une position dominante dans l’Empire romain d’Orient. Tantôt allié du nouvel empereur, tantôt brouillé et agissant contre lui, T. réunit à son peuple les diverses bandes gothiques des Balkans et mène sa carrière : il s’élève à la fonction de maître de la milice d’Orient avec le titre de patrice et même de consul ordinaire en 484.
T. ne fait que suivre ainsi le modèle de bien d’autres chefs de l’armée germains, aussi ambitieux que dénués de scrupules. Dans la seconde partie de sa vie, il réalise le grand exploit historique qui justifie son importance. En 487, l’empereur Zénon encourage ce général remuant et devenu trop puissant à remplacer le régent d’Italie, Odoacre. T. accepte d’autant plus facilement qu’entre Odoacre et sa propre famille existait une sorte de vendetta ancestrale. Avec une armée hétéroclite d’environ 20 000 hommes, composée pour une petite partie seulement de soldats ostrogoths, T. écrase Odoacre à Vérone (30 sept. 489), occupe les campagnes de Haute-Italie et finalement, à Ravenne, le poignarde de ses propres mains (493) et fait exécuter sa famille et ses lieutenants. Il est exactement dans la situation où se trouvait dix-sept ans plus tôt l’adversaire qu’il vient de tuer : celle d’un Barbare qui a réussi. C’est alors que se révèle pour la première fois la stature d’homme d’Etat de T. Il ne se borne pas à approuver le principe du maintien de l’Empire romain d’Occident sur lequel il règne à présent, mais en reprend le modèle, après avoir reconnu la capacité de résistance des structures de pouvoir qu’avait mises en place son rival. Il comprend également qu’il faut organiser l’Italie sur une base dualiste : Goths et Romains y vivraient sous des administrations parallèles mais séparées dont le seul lien serait lui-même. D’un côté la force et l’armée gothique ; de l’autre la civilisation et le sens de l’Etat. Roi tout court (et non roi des Goths), il se fait aussi reconnaître par l’empereur Anastase (497) comme régent officiel chargé de représenter l’empereur en Occident. Une originale et audacieuse construction politique, héritée en partie d’Odoacre, est ainsi mise en place : pour son armée, T. vit et pense en roi germain ; pour les Romains d’Italie, il est un patrice barbare tout à fait admissible qui témoigne un attachement réel au passé de Rome et à ses institutions.
Sous son règne, ce qui reste de l’Empire d’Occident (l’Italie et la Sicile et les régions périphériques du Nord-Ouest, du Nord et de l’Est) connaît plus de trente années de paix complète. Le pays prospère autant que le permettent les pesantes structures sociales et économiques de l’époque ; les sciences et la culture sont encouragées, la liberté de confession garantie et il reste encore des vestiges d’une intense activité de construction. La persistance d’une situation, qui repose sur le protectorat qu’exerce sur l’Empire romain catholique un peuple de soldats germains de confession arienne et coupé de la population romaine par l’interdiction des mariages mixtes, dépend du comportement de trois acteurs : celui de l’empereur à Constantinople, celui des classes supérieures romaines en Italie et celui des Etats germains voisins. Une habile politique destinée à éviter toute expansion territoriale enferme ces derniers dans un réseau d’alliances, que domine l’Empire de T., tuteur des Barbares d’Occident. La situation change lorsque le roi des Francs, Clovis, beau-frère de T., ayant abjuré l’arianisme pour le catholicisme (498-499), échappe à ce système politique et déclare la guerre à T. au cours de plusieurs campagnes militaires contre les Wisigoths alliés de T. Lorsqu’il réussit dans un premier temps à barrer la route à l’expansion franque (507-508), deux principes différents s’opposent désormais en Occident : le principe goth de préservation de la continuité de l’Empire, fondée sur le dualisme romano-germain, et le principe franc d’une nouvelle entité politique et nationale, fondée sur la fusion des deux nationalités. L’autorité des Goths n’est en fait ébranlée que lorsque certaines catégories de la noblesse sénatoriale en Italie se rangent à la fin du règne du côté de l’empereur contre T., après le règlement d’un conflit qui avait opposé pendant une décennie l’Église romaine à celle d’Orient (519), et que, en Orient, monte sur le trône Justin Ier, résolument opposé à ce que l’Empire soit dirigé par les Germains (518). La condamnation et l’exécution de Boèce soupçonné de s’opposer à lui et du beau-père de ce dernier, Symmachus (523-526), montre que le roi est affecté par ces événements. Ce qui sera fatal à son oeuvre est que, mourant, il doit l’abandonner à son petit-fils encore mineur, placé sous la régence de sa fille Amalaswinthe. Sous les coups des Francs, le système d’alliance germanique de T. s’effondre et le neveu et successeur de Justin, Justinien, a recours au soutien d’Amalaswinthe pour faire avancer ses troupes en Italie (534). Face aux attaques simultanées des Byzantins et des Francs, les Goths ne réussissent pas à s’imposer durablement. Ce n’est qu’avec Totila (Baduila, 541-552), que les drapeaux goths renouent une fois encore avec la chance et la victoire, jusqu’à ce que, avec sa mort dans la défaite de Tadinae, les Goths perdent définitivement leur autorité en Italie. Les combats suivants, sous le règne du roi Téia, tué lui aussi
au combat en 552, ne constituent plus qu’un épilogue.
La suite montre le caractère utopique de l’idée de Justinien qui voulait restaurer l’unité de l’Empire et en exclure l’élément germain : l’Empire d’Occident, placé sous l’administration directe de l’empereur et protégé par les troupes impériales, tombe dès le début de l’invasion lombarde en l’an 568 - l’empereur romain a lui-même ouvert la voie à l’idée d’un ordre franc, étranger à l’Empire, en détruisant le seul pilier encore en mesure de soutenir l’Empire romain d’Occident. Car T. ne fut ni un persécuteur des catholiques, malgré le procès instruit contre Boèce et Symmachus, ni surtout un souverain militaire germain, mais il fut surtout ce que Charlemagne respectait en lui : un administrateur germain de l’Empire.
Bibliographie : L. Musset, Les Invasions, les vagues germaniques, 1969 ; A. Chastagnol, La Fin du monde antique, 1976.
THÉODORIC LE GRAND (v. 455-Ra-venne, 526 ap. J-C.). Roi des Ostrogoths, il fut le plus grand des chefs germaniques. Il créa en Italie un bref mais puissant royaume (488-493 ap. J.-C.) et se posa en héritier de l'Empire romain d'Occident. Retenu comme otage à Constantinople (461-471 ap. J.-C.), le jeune Théodoric y apprit le grec, le latin et s'initia à la civilisation gréco-latine. Devenu chef des Ostrogoths, il entreprit avec l'accord de Zénon (empereur d'Orient) la conquête de l'Italie (dominée depuis 476 ap. J.-C. par un chef germain, Odoacre) et y fonda un royaume qu'il agrandit ensuite de la Pannonie, de la Dalmatie puis de la Provence. Devenu roi, il s'efforça de réconcilier Ostrogoths et Romains et de conserver les institutions et la civilisation romaines. Réservant aux Goths les charges militaires, il rétablit le Sénat, s'entoura de conseillers romains (Boèce et Cassiodore), fa vorisa l'économie, imposa le droit romain et enfin encouragea les lettres et les arts, notamment dans sa capitale, Ravenne, qui devint la plus belle ville de l'Occident. Négociateur habile, Théodoric tenta d'imposer son hégémonie sur les autres royaumes barbares. Il s'allia ainsi, par mariage des membres de sa famille, avec les rois des principaux royaumes de l'époque (Francs, Wisigoths, Vandales et Burgondes) et joua souvent un rôle d'arbitre et de protecteur dans les conflits qui les opposèrent. Mais toute cette oeuvre fut compromise par la question religieuse. Adepte de l'arianisme, Théodoric s'opposa aux catholiques qu'il persécuta à la fin de son règne, empêchant ainsi la fusion entre Ostrogoths et Romains. Après sa mort, son royaume fut reconquis de 536 à 555 par les généraux de Justinien, empereur byzantin de Constantinople. Voir Bélisaire, Germains, Invasions (Grandes), Narsès.
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