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Une Charogne: explication lineaire

Publié le 09/10/2023

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« EXPLICATION LINÉAIRE : Baudelaire, « Une Charogne » (1857) Lecture expressive du texte INTRODUCTION (Présentation de l’auteur et de l’œuvre) Selon Yves Bonnefoy, poète majeur du XXe, le recueil des Fleurs du mal est « le maître-livre de notre poésie ».

En effet, depuis sa 1 e parution en 1857, qui a valu à Baudelaire un procès pour outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs, les FDM a révolutionné la poésie en renouvelant les thèmes et en introduisant la modernité dans la tradition lyrique occidentale. (Présentation du texte) Dans « Une Charogne », 27e poème de la section « Spleen et Idéal » des Fleurs du mal, Baudelaire ose s’attaquer à des thèmes peu habituels en poésie.

Il réalise ici le projet des Fleurs du mal (qui explique son titre) : faire du beau avec du laid.

Le poème reflète bien cette double tendance du poète à se diriger à la fois vers la fascination mélancolique pour le mal et le laid (le « spleen ») et à tenter de s’élever plus haut vers une Beauté transcendante, « idéale ».

Ce poème raconte la rencontre, pendant une promenade amoureuse, avec une charogne.

Le poème mêle le lyrisme amoureux à la découverte de ce cadavre pourrissant.

À partir d’un thème morbide, celui d’une « charogne » (corps en décomposition), le poète parvient toutefois à écrire un poème d’amour en 12 strophes (ici réduit à 9 strophes) dans lequel Baudelaire fait alterner alexandrins et octosyllabes et utilise des rimes croisées. (Problématique) Comment le poète parvient-il à transformer l’immonde carcasse en objet poétique ? Nous démontrerons comment le laid, l’horrible devient objet poétique et source de création. (Mouvements du texte) 3 mouvements : - Vers 1 à 16 : la découverte de la charogne - Vers 17 à 24 : le cadavre en décomposition - Vers 25 à 36 : les pouvoirs de la poésie Mouvement 1 : la découverte de la charogne, v.1 à 16 1ère strophe  Le poète s’adresse à la femme aimée : « rappelez-vous » (impératif), sur un ton amoureux « mon âme » (apostrophe et déterminant possessif) => il invite tendrement sa dame à se souvenir d’un moment passé ensemble => cela laisse penser qu’il s’agit d’un poème qui traite d’amour (galant ou précieux).

Mais le passé simple « nous vîmes » annonce la surprise à venir.  V.2 : le cadre est enchanteur propice à l’amour (« beau » - « si doux » => adjectifs mélioratifs et adverbe d’intensité « si »).

Mais la promenade amoureuse va contraster avec l’arrivée choquante d’un cadavre au vers suivant.  V.

3 : cette charogne apparaît avec le repère spatial « Au détour d’un sentier » montrant que la découverte est soudaine et inattendue.

« une charogne infâme » => l’apparition contraste volontairement avec le début grâce à l’adjectif « infâme » qui montre le dégoût du locuteur.  Des antithèses apparaissent alors dans les rimes : « âme/infâme » ; « doux/cailloux » => il y a confrontation du beau et du laid.  V.4 « lit » : peut désigner le lit de la rivière mais aussi le lit dans la chambre : il prépare la personnification de la carcasse en femme allongée sur le dos qui va être développée à la strophe suivante. 2ème strophe  V.

5 : personnification et comparaison = la charogne est associée à la femme et à sa sexualité « les jambes en l’air » et cette sexualité est débridée, comme le montre l’adjectif « lubrique ».  V.6 « brûlante et suant » : évoque la fièvre amoureuse ou la maladie (l’amour/la mort) dans une cascade de termes péjoratifs « poisons » + « nonchalante et cynique » au V.7.

La carcasse est ainsi personnifiée et associée au mal, au pêché.  V.7-8 : « ouvrait … son ventre » : l’imparfait « ouvrait » est le premier d’une longue série qui va structurer la description.

Le ventre évoque les viscères de la charogne mais fait aussi penser à la grossesse, et sa position à l’accouchement.

Il y a là une image paradoxale de la mort et de la fécondité.  Vocabulaire des sens : « brûlante » et « exhalaisons » => Baudelaire donne à voir, toucher, sentir la mort.

Elle n’est plus abstraite mais prend une forme très concrète, et scandaleuse. 3ème strophe  V.9 : les antithèses qui mêlent le haut et le bas, le beau et le laid se poursuivent : « soleil » / « pourriture » => le soleil (hauteur) renvoie ainsi à la mort / la pourriture (bas) = il y a fusion du laid et du beau.  V10 par ailleurs, « cuire à point » est une métaphore culinaire qui vise à choquer.  V.11 : « grande Nature » : la Nature est personnifiée, grandie, glorifiée par l’adjectif grande et par la majuscule.  V.12 : « ensemble, elle avait joint » : la nature (la vie) unit alors que la mort décompose. 4ème strophe  V.13 : il y a à nouveau antithèse entre le haut « le ciel » et le bas « carcasse ».

L’oxymore « carcasse superbe » : marque l’union de la beauté (de l’or = « superbe ») et de l’immonde (de la boue = « carcasse »).

Par cette oxymore, l’opposition du haut et du bas se retrouve, comme mise en abyme, dans la charogne elle-même.  V.14 : « comme une fleur » comparaison => le cadavre devient fleur, vie, beauté (La boue est transformée en or).

Cette comparaison renvoie au titre du recueil Les Fleurs du Mal.

Il y a opposition entre le ton précieux « comme une fleur s’épanouir » et le sujet = la charogne et la « puanteur » V15.  V14 et V16 Antithèse à la rime « s’épanouir » / « s’évanouir » + paronymes (mots de sens différents mais de forme voisine) => union des contraires.  V15 et V16 l’odeur pestilentielle est mise en avant par l’adverbe d’intensité « si forte ».

Elle provoque un malaise chez la femme aimée qui manque de « s’évanouir » ce qui est un motif amoureux traditionnel dont Baudelaire semble ici se moquer…  Le poème est provocateur car le lyrisme amoureux traditionnel (une promenade, dans la nature, au soleil, la femme aimée.... »

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