Lettre à Albert Camus

« Lettre à Albert Camus Monsieur Camus ou bien plutôt cher Albert, Si vous me le permettez je m’adresserai à vous de cette manière car dans mon quartier il est peu commun d’appeler un de ses frères par son nom de famille malgré l’immense respect que nous lui portons.

Les rencontres sont incalculables au long d’une vie mais certaines sont plus marquantes que d’autres.

Il y a maintenant des années, j’ai eu la chance de croiser le chemin d’un artiste.

Un artiste auquel je me suis identifié de par son histoire, un artiste auprès duquel j’ai appris l’importance de la culture et du savoir, un artiste à qui je dois le bouleversement de la vie d’un banlieusard.

Cet artiste c’est vous Albert. Vous avez écrit les romans qui ont changé à jamais la vie d’un petit dealeur de drogue qui a compris à travers vos paroles le sens de la justice.

Je ne suis plus un homme frustré dans un monde absurde.

Je ne suis plus un homme révolté dans un monde de haine.

Je suis un homme juste dans un monde harmonieux.

J’insiste sur le mot homme, mot auquel vous avez donné un sens.

Les enfants de banlieue manquent de réels modèles pour pouvoir se bâtir des avenirs stables.

Ils grandissent souvent sans repères pour les guider.

Mais au bout de quelques pages d’un livre ils peuvent se sentir portés et soutenus par des mots, des idées, des métaphores.

Les livres ne servent pas qu’à raconter des histoires, ils sont capables de changer un homme.

La lecture de votre livre « L’envers et l’endroit » m’a montré le chemin afin que je puisse pousser droit.

J’ai cet étrange sentiment d’avoir grandi à vos côtés alors que ma vie a commencé soixante-deux années après la vôtre. « On a traité de rêveurs et d’utopistes tous ceux qui, dans l’histoire, ont fait bouger les choses ».

Cette phrase je l’ai écrite en pensant à vous. Vous avez refusé de vivre dans un monde qui vous paraissait absurde. Pour le changer, vous avez mené de nombreux combats.

Votre plus belle victoire fut celle contre l’ignorance et la bêtise.

Vous avez gagné une bataille et signé un traité d’amour.

Le but d’une révolte n’est-il pas d’accéder à l’amour, sentiment vital pour tout être humain.

Je me suis aussi battu sans changer le monde peut-être mais j’ai tout de même changé le mien.

Mon succès fut celui d’être capable d’aimer.

Cette force d’aimer est la plus belle chose que je possède, elle est plus importante que le talent qui fait de moi un artiste.. »