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Lecture linéaire: Molière, Tartuffe Acte I scène 1 Explication linéaire

Publié le 20/06/2023

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« Molière, Tartuffe Acte I scène 1 Explication linéaire Introduction : Tartuffe est la pièce que Molière a eu le plus de mal à faire représenter : elle fut attaquée par ceux qui y voyaient une critique de la religion, censurée, interdite à plusieurs reprises. Voilà pourquoi Molière se défendait dès la préface de la pièce : « J'ai mis tout l'art et tout le soin qu'il m'a été possible pour bien distinguer le personnage de l'Hypocrite d'avec celui du vrai Dévot.

» Tartuffe est absent de la première scène de la pièce, mais on perçoit déjà les effets de son hypocrisie à travers le chaos qui règne sur scène : Pernelle, furieuse, est suivie par 6 personnages qui tentent de comprendre les raisons de sa colère. Ce n’est que lorsque le nom de Tartuffe est prononcé que tout devient clair : Pernelle le considère comme un homme de bien, et refuse d'entendre les autres, qui l'accusent d'hypocrisie.

Le spectateur, qui assiste à la dispute, est amené à se faire sa propre opinion. Tout le travail de Molière consiste alors à décrédibiliser Pernelle pour dénoncer Tartuffe avant même qu’il n’arrive. Problématique Comment Molière utilise-t-il le personnage de Pernelle pour préparer le spectateur à l'hypocrisie de Tartuffe, dès la scène d'exposition ? -Premier mouvement : Une scène d’exposition dynamique -Deuxième mouvement : Une parole bloquée Troisième mouvement : La distribution des rôles Quatrième mouvement : Révélation du nœud de l’intrigue -Premier mouvement : Une scène d’exposition dynamique : La première scène d'une pièce de théâtre, c'est ce qu'on appelle la scène d'exposition.

Normalement, on est censé comprendre tout de suite la situation.

Au contraire ici, tout est fait pour surprendre le spectateur.

Le premier personnage sur scène veut déjà partir « Allons, Flipote, allons ».

Elmire formule elle-même la question que tout le monde se pose : « d’où vient que vous sortez si vite ? ». Pernelle fuit les autres personnages : « Que d’eux je me délivre ».

D'où l'effet comique : on voit arriver derrière elle toute une ribambelle d'acteurs qui tentent de la retenir.

Elmire, Mariane, Dorine, Damis, Cléante, ça fait tout de même 7 personnes en même temps sur scène. En plus, le rythme est rapide « Vous marchez d’un tel pas qu’on a peine à vous suivre ».

Tout ce désordre est assez drôle : on est en plein dans la comédie.

On est aussi plongés en plein milieu d'une intrigue en cours, c'est ce qu'on appelle un début « in medias res » on commence au milieu de l'action. Et la vivacité ne vient pas que des gestes, elle provient aussi des échanges de paroles.

Le verbe « suivre » a un double sens : on essaye de « suivre » le raisonnement de Pernelle, on essaye de comprendre ce qui ne va pas, mais le lexique utilisé est trop imprécis : « toutes mes leçons … On ne respecte rien », c’est à la fois « tout » et « rien ». Pernelle s'agite beaucoup sans expliquer, tout ce qu'elle dit est extrêmement imprécis.

Elle multiplie des présentatif : « ce sont … c'est que … c'est tout justement ...

» qui ne renvoient à rien de précis.

Pareil pour les démonstratifs « ce ménage-ci » désigne la situation de manière générale. De même quand on regarde les pronoms, rien de précis, avec une prépondérance du pronom indéfini « on » : « on ne prend nul souci … on ne respecte rien ».

Ou encore « chacun y parle haut » qui est également indéfini. Pernelle utilise le pronom adverbial « y » en abondance : « j'y suis contrariée … on n'y respecte rien … chacun y parle haut » cela ne renvoie qu'au lieu « chez vous » et donc à une situation floue, qui n'est pas définie. En plus, Pernelle bloque toute communication et toute compréhension : Presque toutes ses phrases sont négatives.

Les allitérations en « on » font entendre « non, non ».

Alors qu’en face, Elmire essaye sincèrement de comprendre, avec beaucoup de respect : « De ce que l’on vous doit envers vous on s’acquitte » Elmire cherche la conciliation, son attitude est très mesurée. Pernelle quant à elle est tout de suite décrédibilisée par Molière.

D'abord par son nom. Pernelle est une contraction de péronelle, nom donné à une jeune fille qui dit beaucoup de sottises.

On peut aussi y entendre le verbe pérorer, discourir avec emphase, d'une manière moralisatrice. Les allitérations en P et T transforme le discours de Péronelle en succession de bruits.

C'est elle qui semble responsable de la cour du roi Pétaut.

Cette expression provient du Tiers-Livre de Rabelais, c'est une cour où chacun fait ce qu'il veut, le roi n'ayant aucune autorité.

Pétaut, évidemment, c'est presque une onomatopée, un mot qui imite un son.

On est en plein dans la farce, dans la trivialité : Mme Pernelle perd toute crédibilité. Tout ce que dit Pernelle se retourne contre elle « chacun y parle haut » alors que c'est elle qui parle surtout depuis le début de la pièce.

« Dans toutes mes leçons j'y suis contrariée » Pernelle est contrariée, mais c'est pourtant elle qui donne des leçons à tout le monde. Avec tous ces procédés, Molière crée du suspense, le spectateur va devenir très curieux de savoir l'origine de toute cette contrariété.

Comme souvent chez Molière, le problème est une question de société : un élément perturbateur trouble la bonne entente désirable dans le groupe. Deuxième mouvement : Une parole bloquée Maintenant, en face de Pernelle, trois personnages essayent de prendre la parole : Dorine, la gouvernante, et ses deux petits-enfants : Damis et Mariane.

Mais ils ne parviennent à placer qu'une ou deux syllabes.

Chacun essaye une stratégie différente.

Dorine propose, Damis s’oppose Mariane commence à émettre un avis. Mais Pernelle les interrompt en les attaquant chacun directement : « Vous êtes trop forte en gueule … vous êtes un sot, mon fils … vous menez sous chape un train que je hais fort » De cette manière Molière nous révèle indirectement les qualités de chacun dans la suite de l'intrigue.

Dorine aura le discours de la vérité contre celui de l’hypocrisie.

Damis aura assez de cran pour s’opposer quand il le faudra.

Quant à Mariane, à l’image de l’eau qui dort, elle sera capable de contourner l’obstacle. Au contraire, Pernelle est un personnage figé.

Les effets de répétition dans ses répliques donnent l’impression d’un mécanisme bloqué.

« forte en gueule ...

fort impertinente » le mot « fort » est répété deux fois.

Elle répète les adages populaires « il n'est comme on dit pire eau que l'eau qui dort ».

Le ressort comique correspond ici parfaitement à la définition que Bergson fera du rire au 19e siècle : « Le rire est du mécanique plaqué sur du vivant ». Pernelle est comme une machine à parler, avec ses nombreux verbes de parole : « dire votre avis … je vous le dis … j'ai prédit … comme on dit ».

On dirait que le verbe prédire vient préparer le verbe dire, le renforcer et le multiplier 100 fois.

C'est une hyperbole qui lui permet d'amplifier et d'exagérer son degré d’exaspération. « J'ai prédit cent fois à mon fils, votre père » Au vu des invectives qu’elle répète dans chacune de ses répliques, on peut imaginer que la centaine est en fait en-deçà de la réalité.

Pernelle souligne elle-même qu'elle est dans l'excès et l'exagération. « Vous êtes un sot en trois lettres mon fils » elle est obligée d'épeler le mot, comme si elle manquait de synonymes pour exprimer toute son indignation, qui en devient comique.

Elle perd ainsi toute crédibilité. Troisième mouvement : La distribution des rôles D'autres personnages tentent maintenant de prendre la parole : Elmire, la belle-fille de Pernelle, essaye de la prendre par les sentiments « Mais, ma mère » elle.... »

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