Le droit est-il antérieur au devoir ?
Publié le 15/05/2020
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«
Rapports du droit et du devoir.
Le droit est-il antérieur au devoir ?
A.
— Rapports intimes.
— Il existe entre le droit et le devoir les rapports les plus intimes : — a) Ilsappartiennent l'un et l'autre â la catégorie des choses morales, purement rationnelles ; ils sont par conséquentsupérieurs à la réalité qu'ils dominent et jugent.
— b) Ils sont l'un et l'autre absolus et universels.
— c) Quoiquedistincts ils sont inséparables et se supposent mutuellement.
Montrer, en effet, qu'ils ont un principe commun,envisagé seulement sous des points de vue différents : le bien prescrit par la loi morale.
Ainsi que nous l'avonsdit, le devoir est la loi morale en tant qu'elle oblige la liberté ; le droit est la loi en tant qu'elle la protège.Mais une question se pose : lequel des deux dépend logiquement de l'autre et, comme tel, doit lui êtresubordonné ?
B.
— Priorité du devoir.
— On a quelquefois supposé que le droit est le fondement du devoir (Proudhon) ; et ilexiste en effet toute une classe de devoirs qui consistent dans le respect du droit d'autrui et dont la notionest par conséquent postérieure à celle de droit : ce sont les devoirs de justice.
Mais alors: une autre questionse pose : d'où dérive ce droit lui-même ? Qu'est-ce qui rend la personne respectable, inviolable et sacrée ? —C'est qu'elle conçoit un idéal moral qu'elle a le devoir de réaliser : elle doit donc en avoir le droit.
Le devoir estdonc logiquement antérieur au droit, dont il est la raison et la règle.
Objection.
— Mais alors, dira-t-on, si le droit n'est que le pouvoir de faire son devoir, il ne saurait avoir plusd'étendue que le devoir lui-même : lorsqu'on agit en dehors du devoir on n'est plus couvert par le droit.
Or, ilest certain que le droit déborde beaucoup le devoir : il nous est loisible de faire une foule de choses auxquellesnous ne sommes nullement tenus.
C.
— Il faut remarquer que le devoir doit être entendu ici non pas au sens étroit d'action actuellementobligatoire, mais au sens large, de loi nous ordonnant de tendre a notre fin.
Or, en nous imposant une fin àatteindre, la loi nous donne le droit non seulement de faire ce qu'elle commande strictement, mais encore toutce que l'on juge nécessaire ou utile à la lin qu'elle propose.
C'est ainsi que le droit se trouve en t'ait toujoursplus étendu que le devoir strict, car il s'étend à tout se qui n'est pas actuellement défendu, à tout exercice del'activité susceptible de contribuer à notre progrès moral.
Il n'a pour limite, dans le permis.
que le droit de lapersonnalité voisine.
On voit dès lors dans quel sens- il faut entendre cette formule d'A.
Comte : « L'homme n'ad'autre droit que de faire son devoir.
».
»
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