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Faut-il toujours obéir à la loi

Publié le 19/04/2024

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« > PLATON, Criton (390 av.

J.-C.) Posséderais-tu un savoir qui te ferait oublier que, en regard d’une mère et d’un père et de la totalité des ancêtres, la patrie est chose plus honorable, plus vénérable [...] ? Il faut vénérer sa patrie, lui obéir et lui donner des marques de soumission plus qu’à un père, en l’amenant à changer d’idée ou en faisant ce qu’elle ordonne et en supportant sans se révolter le traitement qu’elle prescrit de subir, que ce soit d’être frappé, d’être enchaîné, d’aller au combat pour y être blessé ou pour y trouver la mort; oui, cela il faut le faire, car c’est en cela que réside la justice ; et on ne doit ni se dérober, ni reculer, ni abandonner son poste, mais il faut, au combat, au tribunal, partout, ou bien faire ce qu'ordonne la cité, c’est-à-dire la patrie, ou bien l’amener à changer d’idée en lui montrant en quoi consiste la justice.

N’est-ce pas au contraire une chose impie que de faire violence à une mère, à un père, et l’impiété serait-elle moindre lorsqu’il s’agit de la patrie ? Au début et à la fin du texte, vous dénoncez une attitude qui pose question et soulève un problème. Vous exprimez votre thèse de manière impérative par deux fois Vous illustrez concrètement ce qu’implique une telle thèse Vous justifiez votre thèse et en tirez toutes les implications MACHIAVEL, Discours sur la première décade de Tite-Live (1531) Tous les écrivains qui se sont occupés de politique (et l’histoire est remplie d’exemples qui les appuient) [...] s’accordent à dire que quiconque veut fonder un État et lui donner des lois, doit supposer d’avance les hommes méchants, et toujours prêts à montrer leur méchanceté toutes les fois qu’ils en trouveront l’occasion.

Si ce penchant demeure caché pour un temps, il faut l’attribuer à quelque raison qu’on ne connaît point, et croire qu’il n’a pas eu l’occasion de se montrer ; mais le temps qui, comme on dit, est le père de toute vérité, le met ensuite au grand jour.

[...] Les hommes ne font le bien que forcément ; mais [...] dès qu’ils ont le choix et la liberté de commettre le mal avec impunité, ils ne manquent de porter partout la turbulence et le désordre.

C’est ce qui fait dire que la pauvreté et le besoin rendent les hommes industrieux (1) et que les lois font les gens de bien.

Là où le bien vient à régner naturellement et sans la loi, on peut se passer de loi ; mais dès que viennent à expirer les mœurs de l’âge d’or (2), la loi devient nécessaire. Vous vous appuyez sur les écrivains pour dresser un constat. Vous tirez un enseignement de ce constat : c’ est la thèse que vous défendez. Vous conduisez un raisonnement qui met en évidence la raison qui justifie votre thèse. Vous pouvez alors réaffirmer la nécessité des lois. Et vous pouvez enfin montrer qu’il est faux de prétendre le contraire LOCKE, Deuxième traité du gouvernement civil (1690) Bien compris, le droit consiste moins à restreindre un agent libre et intelligent qu’à le guider au mieux de ses intérêts et il ne commande qu’en vue du bien commun de ceux qui lui sont soumis.

S’ils pouvaient vivre plus heureux sans lui, le droit disparaîtrait de lui-même, comme objet inutile ; ce n’est pas séquestrer quelqu’un que de lui rendre inaccessible les marécages et les précipices.

Quoiqu’on s’y trompe souvent, le droit n’a pas pour fin d’abolir la liberté, ni de l’entraver, mais de la conserver et de l’accroître.

Les créatures capables de vie juridique, quelle que soit leur condition, ne sont jamais libres sans lois.

La liberté consiste à ne subir ni contrainte, ni violence par le fait d’autrui, ce qui est impossible sans lois ; mais elle ne se définit pas, comme on le prétend, par la liberté pour chacun d’agir à sa guise.

Comment être libre, alors que n’importe qui peut vous imposer ses caprices ? Vous affirmez ce qu’est le droit : c’est votre thèse Ce faisant, vous exposez la thèse adverse que vous contestez. En guise d’argument, vous faites une supposition et vous vous appuyez sur une image. Vous construisez une opposition conceptuelle qui vous permet de préciser votre thèse. Vous tirez les conséquence de votre raisonnement. Vous proposez une définition de la liberté. Vous faites apparaître ce que la liberté n’est pas en soulevant une question. ARENDT, Eichmann à Jérusalem (1966) C’était ainsi, c’était la nouvelle loi du pays, fondée sur l’ordre du Führer ; autant qu’il pût en juger, il agissait, dans tout ce qu’il faisait, en citoyen qui obéit à la loi.

Il faisait son devoir, répéta-t-il mille fois à la police et au tribunal ; non seulement il obéissait aux ordres, mais il obéissait aussi à la loi.

Eichmann soupçonnait vaguement qu’il pouvait y avoir là une distinction importante, mais ni la défense ni les juges ne lui demandèrent d’insister sur ce point […] Vu le caractère limité des dons intellectuels d’Eichmann, il était, au procès, certainement le dernier dont on pouvait attendre une élucidation de ces notions et une réflexion autonome.

Toujours très soucieux d’être "couvert”, il n’avait pas seulement accompli ce qu’il considérait comme les devoirs d’un citoyen qui obéit à la loi, mais il avait aussi agi selon les ordres; c’est pourquoi [….] il finit par insister soit sur les avantages, soit sur les inconvénients de l’obéissance aveugle ou “obéissance de cadavre” comme il disait luimême. Vous présentez le contexte historique en produisant une distinction importante. Vous précisez à cette occasion une limite concernant la personne dont vous parlez. Vous avancez une thèse à son propos. Vous montrez les conséquences de la limite évoquée. RAWLS, Théorie de la justice (1971) Pour justifier la désobéissance civile, on ne fait pas appel aux principes de la moralité personnelle ou à des doctrines religieuses, même s'ils peuvent coïncider avec les revendications et les soutenir; et il va sans dire que la désobéissance civile ne peut être fondée seulement sur des intérêts de groupe ou sur ceux d'un individu.

Au contraire, on recourt à la conception commune de la justice qui sous-tend l'ordre politique.

Nous avons fait l'hypothèse que, dans un régime démocratique relativement juste, il y a une conception publique de la justice qui permet aux citoyens de régler leurs affaires politiques et d'interpréter la constitution.

La violation persistante et délibérée des principes de base de cette conception, pendant une certaine période, et en particulier l'atteinte aux libertés fondamentales égales pour tous invitent soit à la soumission soit à la résistance.

En se livrant à la désobéissance civile, une minorité force la majorité à se demander si elle souhaite que ses actions soient ainsi interprétées ou si, se basant sur le sentiment commun de justice, elle souhaite reconnaître les revendications légitimes de la minorité. Vous.... »

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