Databac

Epicure et le souverain bien dans le plaisir

Publié le 16/05/2020

Extrait du document

Ci-dessous un extrait traitant le sujet : Epicure Ce document contient 2620 mots soit 6 pages. Pour le télécharger en entier, envoyez-nous un de vos documents grâce à notre système gratuit d’échange de ressources numériques. Cette aide totalement rédigée en format pdf sera utile aux lycéens ou étudiants ayant un devoir à réaliser ou une leçon à approfondir en Philosophie.

« Epicure Peu de doctrines autant que l'épicurienne ont fait l'objet d'appréciations aussi divergentes.

Le paradoxe n'est pasqu'elle ait provoqué tant d'éloges et de blâmes, mais plutôt qu'elle justifie et les uns et les autres.

" On trouvetoujours dans cette doctrine, écrit un de ses meilleurs connaisseurs, je ne sais quoi d'étriqué et de mesquin quiarrête l'esprit au moment même où il est le plus disposé à l'admirer.

" Ce contraste que V.

Brochard découvre au coeur même du système se retrouve jusque dans le détail des thèses.

Peut-être pourrait-on trouver dans l'opposition toute formelle entre éléments antiques et traits déjà modernes ce qui donne à l'épicurisme son caractère unique et irréductible.Les philosophes de l'Antiquité ne le prennent pas toujours au sérieux.

Quand, vers le milieu du premier siècle avant notre ère, un Académiciens'efforce de mettre fin à l'anarchie et à la lutte des écoles par un syncrétisme largement ouvert, l'épicurisme est exclu de cette tentative deconciliation.

En revanche, on a pu faire d'Epicure le précurseur de doctrines spécifiquement modernes, comme l'utilitarisme anglais ou lematérialisme marxiste.

Ces rapprochements, jusqu'à un certain point, sont soutenables.

Ils ne le sont sûrement pas jusqu'au bout, et en raisonprécisément de l'idéal antique que se fait Epicure du sage, vivant dans une indépendance entière et, en l'espèce, retiré de la société et se souciantfort peu des déshérités et des pauvres.

Un des traits les plus modernes de cette philosophie est une certaine tonalité de bon goût et de raffinement que Nietzsche , qui y a été fort sensible, décrit dans une page qui mérite d'être citée : " L'Épicurien choisit lui-même la situation, les personnes, voire les événements quiconviennent à son caractère intellectuel, irritable à l'extrême ; il renonce à tout le reste, c'est-à-dire à presque tout, car ce serait pour lui unenourriture trop forte et trop lourde.

Le Stoïcien, en revanche, s'exerce à avaler pierres et vermines, éclats de verre et scorpions sans faire ledégoûté ; son estomac doit finir par être indifférent à l'égard de tout ce qu'y déverse le hasard de l'existence...

Pour des hommes soumis auximprovisations du destin, pour ceux qui vivent dans des époques violentes et qui dépendent de la brusquerie et de l'humeur changeante d'autrui,il se peut que le stoïcisme soit fort à recommander.

Mais celui qui croit à peu près savoir que le destin lui permet de filer un long fil, fait bien des'installer à l'épicurienne ; tous les hommes qui se destinent au travail intellectuel l'ont fait jusqu'ici Pour eux, en effet, ce serait la perte des pertes,que d'échanger l'irritabilité délicate contre la peau dure des Stoïciens, avec ses piquants de hérisson.

" Le parallèle est joli, et l'essence intemporelle de l'idéal épicurien ne saurait être mieux vue.

On ne chicanera pas sur l'idée de " travail " qui, à traversle stoïcisme, remonte à l'école cynique et qui, s'agissant du travail intellectuel, convient bien mieux aux activités scientifiques des disciples deChrysippe qu'aux Épicuriens, réputés pour leur inculture et qui en faisaient gloire à leur maître : " Devait-il employer son temps… soit à lire les poètes, où il n'y a aucune utilité substantielle et où tout n'est bon qu'à charmer les enfants, soit, comme Platon , étudier la musique, la géométrie, l'arithmétique, l'astronomie, toutes sciences qui, parties de principes faux, ne peuvent être vraies et, le fussent-elles, ne donneraient aucun résultatpropre à rendre la vie plus agréable et meilleure ; devait-il, dis-je, s'attacher à tous ces arts, et l'art de vivre, cet art qui est si important, si difficile etprofitable à proportion, le délaisser ? Il ne faut donc pas dire d'Epicure qu'il manque de culture ; les vrais ignorants sont ceux qui se croient obligésd'apprendre jusqu'à la vieillesse des choses qu'il est honteux de ne pas avoir apprises quand on était enfant.

" ( Cicéron , De fin., I, XXI, 72. ) Ainsi le Calliclès du Gorgias veut bien que l'adolescent ait des éléments de philosophie, à condition de ne s'occuper, à l'âge mûr, que de choses sérieuses.

Mais Calliclès renonce aux études pour conquérir le monde.

L'Épicurien rejette,tout ensemble, la vie active et la vie intellectuelle, pour vouer tout son soin et son sérieux à cet " Art de vivre " quin'exige pas, comme chez les Stoïciens, " la science des choses divines et humaines " ; cet art est à lui-même sonpropre contenu et s'isole de tous les autres arts, comme le sage épicurien se retranche dans la " cachette " duJardin et " renonce à tout le reste, c'est-à-dire à presque tout ".

Ce retranchement, cette séparation des choses et des hommes est au fond de la vision épicurienne du monde.

De la physique atomistique,l'individualisme moral ne reçoit pas seulement une garantie extérieure et une preuve rapportée ; il y reconnaît sa propre condition.

Cet universacosmique qui le repousse et que visiblement nul dieu n'a conçu et réalisé dans l'intérêt des humains, lui renvoie son image et l'éclaire sur sasolitude.

On a pu dire que Démocrite H1064 fragmente la " sphère bien arrondie " de l'Être de Parménide H036 .

Mais Epicure ne morcelle pas le Tout : il a le sentiment aigu, non pas même de la multiplicité des choses, mais de leur extrême isolement.

Chaque parcelle d'être est une totalitéclose sur son propre dénuement.

De l'une à l'autre, ce n'est plus, comme chez Démocrite H1064 , la nécessité et la raison qui déterminent les liens et ajustent les assemblages (l'héritage des grands atomistes, sur ce point, passe dans la loi de causalité, énoncée par Chrysippe H011 ).

C'est par l'action du hasard que, de toute éternité, les atomes sont amenés à former des mondes, périssables d'ailleurs et en nombre infini.

La réussitetemporaire de ces combinaisons cosmiques ne prévaudra pas contre l'indépendance native de leurs éléments qui retomberont dans leur étatoriginaire d'isolement et d'anarchie.

Ni providence ni destin ne président à la formation des mondes ; aucun droit naturel ne fonde les unionshumaines.

" Il n'y a, par nature, chez les êtres raisonnables, aucun sens social qui les unisse entre eux.

" Les lois de la cité ont pour origine " uneconvention sur ce qui est utile ", d'où cette différence avec le stoïcisme, parfaitement formulée par Sénèque L198 : " Epicure dit : " Le sage ne mettra point la main aux affaires, à moins d'une circonstance exceptionnelle.

" Zénon H051 dit : " Il mettra la main aux affaires, à moins d'une circonstance qui l'en empêche.

" De même, " il n'y a en nous aucune affection naturelle pour nos enfants ", " le mariage n'est jamais avantageux ; heureux même celui à qui il ne nuit pas ; le sage ne doit ni se marier ni avoir d'enfants ". Cette vision du monde, on l'a dit avec raison, est foncièrement pessimiste.

On pourrait ajouter qu'elle n'est pas, dans son principe, sans héroïsmeou plus simplement, qu'elle ne manque pas de ce courage intellectuel toujours nécessaire pour savoir refuser, à des désolations présentes, descompensations cosmiques et intemporelles.

" Il vaut encore mieux, dit Epicure, accepter les fables relatives aux dieux, que de se soumettre audestin des physiciens.

" Mais avec le destin, on rejette la providence.

La recherche du bonheur est une entreprise humaine et affaire de l'individuseul ; aucune aide extérieure, naturelle ou surnaturelle, ne vient à sa rencontre.

L'univers d'Epicure ne favorise pas, comme celui deChrysippe H011 , le bonheur humain ; seulement, il le permet, il le rend possible, surtout : il n'y fait pas obstacle.

Destitué de toute finalité, le monde ne nous est pas bienveillant et n'a rien à nous offrir.

Au moins est-il privé, par là même, de toute intention de nuire.

Rejetant " les fables relativesaux dieux ", on désarme la foudre de Zeus, on fait rentrer dans le néant le tribunal des enfers ; la terre et le ciel cessent de fournir un vaste décoraux pérégrinations des âmes des défunts.

Il y a un point cependant où le désordre du monde convient entièrement avec la condition humaine,c'est la contingence.

Niée par les Stoïciens et restreinte par Platon H038 et par Aristote H002 à l'imperfection des régions sublunaires, elle est, dans. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles