CORRECTION DU COMMENTAIRE Maurice Barrès, Les Déracinés, 1897, chapitre premier, « Le lycée de Nancy »
Publié le 01/06/2023
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CORRECTION DU COMMENTAIRE
Maurice Barrès, Les Déracinés, 1897, chapitre premier, « Le lycée de Nancy »
Le roman a pris son essor au XIXème siècle, en affirmant progressivement
une volonté de réalisme, et même de naturalisme, avec Zola, afin de reproduire le
plus exactement possible le fonctionnement de la société.
Or, en 1879, la France,
après la guerre contre la Prusse en 1870, a établi la troisième République, qui
accorde une grande importance à l’enseignement, destiné à former des citoyens
éclairés.
C’est sur ce sujet que s’ouvre le roman de Maurice Barrès, Les Déracinés,
paru en 1897, dont le premier chapitre, « Le lycée de Nancy », dépeint l’existence
des lycéens, en 1879, alors qu’arrive, dans la classe de philosophie, un nouveau
professeur, M.
Paul Bouteiller.
Nous nous interrogerons sur la façon dont cet
extrait met en valeur la façon dont un enseignant peut influencer ses jeunes
élèves.
Notre étude étudiera donc, dans un premier temps, le portrait du
professeur, puis les réactions des lycéens.
Pour observer les quatre étapes de l’introduction
1/ Une amorce : Faute de connaissances sur l’auteur, l’amorce s’appuie ici sur les
connaissances sur l’évolution du roman et les conditions historiques à la fin du XIXème
siècle.
2/ La présentation du texte : Une deuxième étape résume l’idée d’ensemble du texte.
Il est
souvent utile de se servir du paratexte.
3/ La problématique : Sous forme de question, ici indirecte, elle est destinée à guider le
commentaire dont elle pose l’objectif.
4/ L’annonce du plan : Est posé le contenu de chacun des deux axes.
N.B.
: On notera comment une formule ou un connecteur permet d’enchaîner ces quatre
étapes.
Dans cet extrait, le portrait du professeur occupe une place importante.
Il
présente d’abord ses caractéristiques physiques, puis sont explicités ses traits
psychologiques et moraux.
À part le seul fait qu’il soit « jeune », sans autre précision, le portrait
physique met l’accent sur le seul visage du professeur, comme si le reste de son
corps n’avait aucune importance.
Il est pris en charge par un narrateur
omniscient, comme le prouvent les adverbes temporels, « Souvent »,
« tard », « jamais », « le plus souvent ».
Or, ce choix guide le jugement du lecteur,
en mettant l’accent sur la dimension intellectuelle de M.
Bouteiller, qu’il justifie par
son commentaire : « Il avait ce teint d’un seul ton, cette face décolorée fréquente
chez les personnes qui vivent renfermées.
» Cette première image, qui indique déjà
un mode de vie, ôte a priori au personnage toute séduction, de même que « ses
yeux étaient fatigués et légèrement rougis ».
Mais l’image s’inverse ensuite, en
raison de l’explication méliorative posée sous forme de vérité
générale : « La méditation et les soins intellectuels mettent de la gravité sur la
physionomie.
» Le narrateur souligne ainsi le sérieux de ce professeur, qui, de
toute évidence, accorde à son « travail tard prolongé » une place essentielle dans
une vie entièrement consacrée à l’étude et à la réflexion.
Si la suite introduit une
contradiction dans la direction de son « regard », elle n’est, en fait, qu’apparente : s’il
est capable de regarder autrui « en face », c’est qu’il n’est en rien timide, ni
hypocrite, et que le fait de baisser son regard a une autre raison.
Puisque qu’il n’est
« jamais distrait ni vague », c’est une façon de rester concentré sur lui-même, de
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ne pas se laisser détourner par des futilités éventuelles.
Tous les traits physiques
concourent donc à mettre en valeur la dignité de ce professeur.
Cette dignité se retrouve dans son comportement, gestes et paroles, qui
révèle son caractère.
Dès son entrée en classe, il fait preuve, en effet, de retenue
et de dignité, en attendant « jusqu’à ce qu’il jugeât écoulé le délai suffisant pour
l’installation de chacun ».
Aucun énervement de sa part face à un éventuel désordre.
Il semble ne pas y prêter attention, en « examina[nt] un livre », et il obtient le calme
dès qu’« il leva les paupières ».
Il a donc un évident charisme, ou, comme
l’explique le narrateur, « [i]l avait du prestige.
»
Son discours, mis en valeur dans la brève proposition « Il parla », complète
cette image.
Il est d’abord inséré sous sa forme narrativisée : il « sut faire
appel au sentiment de l’honneur » montre qu’il fait de la discipline non pas un
ensemble de règles et d’interdits, mais le respect de hautes valeurs.
C’est ce qui
explique le résultat, immédiatement indiqué par une prolepse : « il n’eut jamais
besoin de punir.
» Puis le récit glisse du discours narrativisé, en ce qui le
concerne, au discours indirect libre pour ce qu’il attend des lycéens.
Or, dans
les deux cas, c’est la notion de devoir qui ressort, pour le professeur, « Il leur dit sa
haute notion de sa responsabilité, étant venu pour faire des hommes et des
citoyens.
», comme pour les lycéens, avec un chiasme qui place en son centre le
rôle de l’école pour servir la république : « Mais eux aussi, ils avaient des devoirs, de
patriotisme et de solidarité.
» Il établit ainsi une réciprocité et une forme d’égalité
entre lui et eux.
Sa dernière intervention, rapportée directement, confirme
l’importance qu’il accorde aux valeurs morales : « plus qu’un diplôme, ceci est
nécessaire : que vous réfléchissiez sur les liens qui nous unissent, afin que vous
ayez une conscience plus nette de votre dignité… » L’aposiopèse est comme une
façon de reproduire le temps de réflexion auquel il les invite.
Mais le choix de
l’énonciation est intéressant ici car, d’une part, le pronom « nous » peut se
limiter à la relation entre un professeur et ses élèves, ou s’élargir à l’ensemble des
relations humaines ; d’autre part, il établit un lien de cause à conséquence
entre ces « liens » qui impliquent de voir en tout homme un semblable et le résultat,
dont le possessif montre qu’il rejaillit sur chacun : avoir « une conscience plus nette
de votre dignité ».
En fait, c’est sa propre dignité qu’il entend bien leur
transmettre.
Ce professeur semble donc tout à fait différent du stéréotype fréquent
dans les romans, soit ridiculisé, soit présenté à travers une autorité affirmée.
Pour observer la structure d’un axe d’étude
1/ Une introduction partielle : Elle annonce, de façon claire et rapide, les sous-axes, c’està-dire les paragraphes, marqués par un alinéa.
2/ Les sous-axes : Ils forment des paragraphes.
Noter qu’un paragraphe peut se
décomposer – en allant simplement à la ligne – quand l’argument posé comporte deux
aspects distinct (cf.
supra : le « comportement » se scinde entre « gestes » et « paroles »).
3/ Une conclusion partielle : Elle ferme l’axe en en dégageant l’essentiel.
Entre les deux
axes, elle permet de former une transition, un enchaînement.
Pour observer la structure d’un paragraphe....
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