Canada (1989-1990): Le désaccord du lac Meech
Publié le 13/09/2020
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Rien ne va plus au Canada.
L'accord du lac Meech a sombré le 22 juin
1990.
Cet accord, signé le 3 juin
1987, visait à réintégrer politiquement le Québec dans la Co
nstitution canadienne qui lui avait été
imposée en 1982 par Pierre Elliott Trudeau et les neuf autres provinc
es et qu'il avait refusé d'entériner.
Cet accord concédait certains pouvoirs aux provinces et accordait au
Québec le statut de société distincte,
sans qu'en soient vraiment précisées les conséquences juridique
s.
Il étendait également le droit de veto
des provinces à toute modification des institutions fédérales.
Pour entrer en vigueur, cet accord devait être ratifié par toutes
les provinces avant le 23 juin 1990.
Mais
en mars 1990, trois provinces, le Nouveau-Brunswick, le Manitoba et Terr
e-Neuve, réclamaient toujours
des modifications majeures.
Elles pouvaient d'ailleurs s'appuyer sur l'o
pinion publique au Canada anglais,
devenue majoritairement hostile à un accord accusé de favoriser le
Québec et qui engagerait le pays sur
la voie de la décentralisation.
Jean Chrétien lui-même, issu du
Québec et grand espoir du Parti libéral
fédéral, dont il est devenu le chef le 23 juin 1990, s'est longtem
ps opposé au libellé de l'Accord.
Une difficile gestion économique
Mais ce n'était pas le seul motif d'insatisfaction à l'égard du
gouvernement de Brian Mulroney, au plus bas
dans les sondages au printemps 1990.
Au reniement des promesses élect
orales de novembre 1988 sont
venus se greffer des restrictions budgétaires (dont l'élimination
de la moitié des trains de passagers) et le
projet d'introduire, au début de 1991, une taxe de 7% sur les produit
s et services, sorte de taxe à la
valeur ajoutée ; celle-ci n'épargnerait que les produits alimentai
res, les loyers et la vente de logements
usagés.
L'on se doute bien que cette taxe sera également mise à
contribution dans la lutte contre le
déficit budgétaire du gouvernement central, qui est resté, à
4,6% du PIB, l'un des plus élevés d'Occident.
Le financement de l'imposante dette publique résultant de cette accum
ulation de déficits devait absorber,
en 1990, 35% des recettes budgétaires.
Cette situation financière fédérale hypothèque grandement la
conduite de la politique macro-économique:
ne pouvant réduire suffisamment ses dépenses pour des raisons poli
tiques, le gouvernement est
contraint, face aux pressions inflationnistes, à ne jouer que de la p
olitique monétaire, c'est-à-dire hausser
encore et toujours les taux d'intérêt.
En juin 1990, ceux-ci non s
eulement avaient retrouvé, compte tenu
de l'inflation, les sommets qui avaient provoqué la dure récession
de 1981-1982, mais dépassaient
également de cinq points les taux américains, ce qu'on n'avait jam
ais vu.
Ces taux d'intérêt attirent les liquidités étrangères et
gonflent artificiellement la valeur de la devise
canadienne, au désespoir des exportateurs.
Cela accentue les risques
de récession: le tassement de la
croissance économique en 1989 (2,6%) s'est prolongé au cours du
premier semestre de 1990.
La question de l'avortement est demeurée d'actualité.
L'absence de
loi à ce propos n'a fait qu'enflammer
le débat.
On a même vu à l'été 1989 un amant éconduit
obtenir une injonction pour interdire le recours à
l'avortement à son ancienne compagne.
La Cour suprême finit par é
liminer l'injonction.
Cette affaire incita
le gouvernement à présenter une nouvelle loi qui permettrait l'avo
rtement si un médecin le juge
nécessaire.
Le débat n'a certes pas été clos.
La saga constitutionnelle
Mais au printemps 1990 il n'y en avait que pour la saga constitutionnell
e, fertile en rebondissements.
Le
Québec ne voulait accepter aucune modification substantielle à l'A
ccord.
La situation semblait figée.
Un
échec constitutionnel pouvait pousser le gouvernement québécois
à réviser en profondeur son option
fédéraliste, et à lorgner du côté de la souveraineté p
olitique doublée d'une association économique avec
le Canada anglais.
Le climat politique s'était d'autant plus détérioré qu'une v
ague d'antibilinguisme venait de secouer.
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