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INDOCHINE FRANÇAISE

INDOCHINE FRANÇAISE Issue du projet français des années 1860 de capter le commerce intérieur chinois par la prise de contrôle des grands axes fluviaux censés en commander l’accès méridional (Mékong, fleuve Rouge), l’Indochine française s’est formée en deux grandes étapes : d’une part l’annexion du sud du Vietnam entre 1858 et 1867 (prise de Saigon en 1859), la création de la colonie de Cochinchine et l’établissement du protectorat sur le Cambodge (1863) ; d’autre part la conquête de l’Annam et du Tonkin, devenus eux aussi protectorats français par le traité de 1884, et l’occupation des pays du Moyen-Mékong, regroupés dans le protectorat du Laos en 1895. En 1887 est officiellement créée l’Union indochinoise. Colonie et protectorats. Elle rassemble des territoires de statut différent : la colonie de Cochinchine, soumise à l’administration directe, les quatre protectorats où les résidents français, dirigés par un résident supérieur, détiennent le pouvoir réel et exercent un contrôle étroit sur les anciennes monarchies et leurs hiérarchies administratives, telle la monarchie vietnamienne, désormais privée de souveraineté, et ses mandarins. L’ensemble est subordonné au puissant appareil du gouvernement général, organisé par Paul Doumer (1857-1932) de 1897 à 1902, installé à Hanoi et doté d’une fiscalité productive (grâce aux régies de l’alcool, du sel et de l’opium). Celle-ci va permettre, par l’emprunt, le développement jusqu’en 1929 des trois principales filières de l’économie coloniale : la riziculture capitaliste du delta cochinchinois, deuxième exportatrice au monde à partir des années 1900 ; les mines (charbon de Hon Gai) et les plantations (boom de l’hévéa en 1926-1930, puis 1934) ; les premières industries de transformation nées dans la phase de croissance 1895-1930. Un capitalisme indochinois dynamique voit le jour grâce à de considérables investissements publics et privés (plus de six milliards de francs-or entre 1896 et 1940, dont trois milliards et demi à cinq milliards d’investissements privés) en partie contrôlés par la puissante Banque de l’Indochine. En 1939, l’Indochine est bien la plus rentable des colonies françaises. L’ébranlement des sociétés colonisées est multiple, en dépit du faible effectif des Français (34 000 en 1940), mais inégal : essor des villes coloniales (Hanoi, Saigon, Phnom Penh, Haïphong), formation dans les pays vietnamiens d’une riche bourgeoisie commerçante et, au sud, terrienne, émergence d’une intelligentsia formée en France ou dans les écoles coloniales et d’un prolétariat misérable, tandis que progressent rapidement la paupérisation de la paysannerie et le sous-développement rural, dans un contexte de vive croissance démographique (25 millions d’habitants en 1945) et de surpeuplement des deltas. Agitation nationaliste et communiste. Avec la grande crise de 1929 qui va durer jusqu’en 1934 et avec le mouvement des grèves ouvrières et des révoltes paysannes de 1930-1931 dans les provinces vietnamiennes, s’ouvre la crise de la colonisation indochinoise. La réponse du pouvoir colonial est triple : répression implacable de l’agitation nationaliste et communiste, coûteux sauvetage budgétaire des grandes entreprises coloniales et de la riziculture cochinchinoise, et mise en œuvre d’une stratégie de développement rural pour enrayer la crise des campagnes vietnamiennes, notamment grâce à de vastes programmes hydrauliques (plus de 600 000 hectares concernés en 1945). Complétée par les réformes sociales du Front populaire (début d’une législation ouvrière, mais refus du droit syndical), cette stratégie exclut toute réforme du statut politique de l’Indochine. En porte-à-faux avec la montée des nationalismes, elle perd toute pertinence historique lorsque les Japonais renversent, le 9 mars 1945, l’administration française restée jusqu’alors fidèle à Vichy, en prélude à la révolution vietnamienne d’août 1945 et à la prise du pouvoir à Hanoi par les communistes. Le projet français de Fédération indochinoise de 1945-1947, fondé sur l’octroi du self-government aux cinq territoires et sur le plan d’industrialisation de l’Indochine de 1947, n’est qu’une tentative de revenir sur le fait accompli des indépendances de 1945. Pendant la guerre d’Indochine, tout en faisant fonctionner les institutions économiques et financières fédérales, Paris doit finalement se résigner à l’indépendance des trois États associés (accords de 1949 avec le Vietnam de Bao Dai, de 1953-1954 pour le Cambodge et le Laos). La défaite militaire française de Dien Bien Phu (7 mai 1954) et les accords de Genève (21 juillet 1954) mettent fin à l’Indochine française.


INDOCHINE FRANÇAISE. Nom donné à l'ensemble des colonies et des protectorats français de la péninsule indochinoise. Elle comprit d'abord la Cochinchine, l'Annam, le Tonkin, territoires conquis sous le Second Empire, puis le Cambodge et le Laos. Voir Indochine (Guerre d'), Viêt-nam (Guerre du).

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