Spinoza et les affections

« On ne saurait douter en effet (...) que les hommes sont nécessairement en proie aux affections. Du seul fait de leur constitution, ils plaignent leurs semblables malheureux, pour les envier au contraire lorsqu’ils les voient heureux; et ils sont plus enclins à la vengeance qu’au pardon; d’autre part chacun désire que les autres soient dans leur vie affectés de la même manière que lui; qu’ils approuvent ce qu’il approuve, qu’ils rejettent ce qu’il rejette. Or, puisque tous les hommes désirent se pousser à la première place, ils entrent en compétition, et autant qu’ils le peuvent, font effort en vue de s’opprimer les uns les autres. Et le vainqueur, à l’issue de cette lutte, se glorifie plus de s’être heurté aux autres, que d’avoir augmenté sa force. Bien sûr, tous sont persuadés, et la Religion le leur enseigne, que chacun doit aimer son prochain comme il s’aime lui-même, c’est-à-dire défendre le droit des autres comme il défend le sien; mais nous constatons que cette persuasion agit faiblement sur les affections. Elle a une influence au moment de la mort, quand la mort a raison des affections elles-mêmes, et que l’homme gît sans forces; ou bien dans les lieux du culte, là où les hommes suspendent leurs rapports entre eux; mais non dans les tribunaux ni les demeures des puissants, là où elle serait si nécessaire. » SPINOZA QUESTIONNAIRE INDICATIF • Que penser ici sous le terme affections ? • Qu’est-ce qui amène Spinoza à penser que « les hommes sont nécessairement en proie aux affections »? • Comment expliquer que la Religion (hors certain moment et certains endroits) « agit faiblement sur les affections » ? — Peut-on l’expliquer à partir de l’explication des moments et des endroits où la Religion agit sur elles? • Quel est l’enjeu du texte de Spinoza? .— Faire apparaître que l’empire sur les affections est nécessaire mais impossible là où elles ont beaucoup d’effets? — Ou autre chose? Mais quoi? • Ne pourrait-on se demander si ce texte a effectivement un intérêt philosophique?