Platon et la tripartition de l'âme humaine dans « Phèdre »
Platon et la tripartition de l'âme humaine dans « Phèdre » :
- « Epithumia » = ventre = passions, pulsions, désirs => peuple au niveau de la cité.
- « Thumos » = coeur = courage, volonté => guerriers au niveau de la cité.
- « Logos » = cerveau = intelligence, raison => rois-philosophes.
Une âme juste est celle où le « logos » se sert du « thumos » pour diriger l' « épithumia ».
Une cité juste est celle où le roi/philosophe (Logos) s'allie avec les militaires (Thumos) pour diriger le peuple.
Figure 1: La tripartition de l'âme chez Platon
« Elle [l'âme] ressemble, dirai-je, à une force à laquelle concourent par nature un attelage et son cocher, l'un et l'autre soutenus par des ailes. Or donc, dans le cas des Dieux, les chevaux, aussi bien que les cochers, sont, eux-mêmes, tous bons comme ils sont faits de bons éléments, (b) tandis que, dans le cas des autres êtres, il y a du mélange : premièrement, chez nous l'autorité appartient à un cocher qui mène deux chevaux attelés ensemble ; secondement, en l'un d'eux il a un beau et bon cheval, dont la composition est de même sorte, tandis qu'en l'autre il a un cheval noir dont les parties composantes sont contraires à celles du précédent, comme est contraire sa nature. Dans ces conditions, c'est nécessairement, par rapport à nous, une tâche difficile, une tâche peu plaisante que de faire le cocher! ... » Extrait du Phèdre de Platon.
L’âme est comparable à un attelage ailé céleste : le cocher est la raison, l’intellect qui gouverne et l’attelage est tiré par deux chevaux. Cependant, Platon introduit une différence entre l’âme des dieux et l’âme humaine. Pour l’âme des dieux, la structure de l’attelage et son comportement sont dans une continuité cohérente si bien qu’une fausse manœuvre est, par principe, exclue. L’attelage est porté sans encombre par les ailes au sommet de la voûte céleste dans un mouvement ascensionnel uniforme. Alors que pour l’âme humaine, ce mouvement devient difficile car l’attelage est apparié, les deux chevaux sont de nature différente / dualité
• L’un, blanc et noble, aspire au ciel. Obéissant, il représente le cœur. Cœur = courage. Le cheval de bonne nature représente le thumos, quelque chose comme le cœur, le courage mais aussi la colère et l'agressivité : c'est la faculté de s'enthousiasmer et de s'emporter au service du meilleur. Courage. Volonté. Perversion : la force. Excès de courage : témérité.
Quand le cocher (la sagesse dont l’écueil est l’abus de pouvoir) mène bien son attelage, il trouve en lui un allié essentiel, toujours prêt à aller de l'avant, à combattre pour son idéal, à défendre sa cause.
- Quant au mauvais cheval, il représente la troisième partie de l'âme, l'épithumia, le siège de l'appétit des passions et des désirs charnels. Rétif, toujours prêt à faire dévier l'attelage pour satisfaire ses désirs, il manque sans cesse de le faire chavirer. Noir et massif, est attiré par la terre. Il représente la partie désirante de l’âme. Ce cheval n’en fait qu’ sa tête. Epithumia, le bas-ventre, le charnel, ce qui fuit les lois de l’esprit, de la raison mais aussi celle de la société et des dieux.
D’où la difficulté pour le cocher de mener son attelage, sa vie.
Platon explique que chaque partie de l'âme, et donc chaque classe d'hommes, a une vertu qui lui correspond : la tempérance pour l'âme désirante, le courage pour le cœur, la sagesse pour l'âme raisonnable.
C'est sur cette tripartition de l'âme que Platon dans la République construit le modèle de la cité juste : les hommes se répartissent en trois classes selon que domine en eux l'une ou l'autre partie de l'âme : à ceux en qui domine la partie rationnelle, les philosophes, reviendra la tâche de gouverner la cité ; à ceux en qui domine le cœur, les gardiens ou soldats, reviendra celle de la défendre ; et enfin à ceux en qui domine l'appétit seront confiées les tâches matérielles permettant l'entretien de tous : les artisans et les agriculteurs.
De l'harmonie de ces trois parties de l'âme résulte la justice ; de l'harmonie de ces trois classes résulte la justice dans la société.
Si les artisans, les marchands prennent le pouvoir contre les philosophes, culte de l’argent. Laxisme.
Si les soldats prennent le pouvoir. Culte de la force. Autoritarisme.
Société médiéval et aussi une société ordonnée : théorie des ordres : « ceux qui prient » (oratores), « ceux qui combattent » (bellatores) et « ceux qui travaillent » (laboratores).
Harmonie du Tout. Bonne hiérarchie .
Liens utiles
- Montherlant écrit dans ses Notes de Théâtre (Théâtre, Bibliothèque de la Pléiade, p. 1075) : « Une pièce de théâtre ne m'intéresse que si l'action extérieure, réduite à la plus grande simplicité, n'y est qu'un prétexte à l'exploration de l'homme; si l'auteur s'y est donné pour tâche non d'imaginer et de construire mécaniquement une intrigue, mais d'exprimer avec le maximum de vérité, d'intensité et de profondeur un certain nombre de mouvements de l'âme humaine. » Expliquez et discutez
- Phèdre de Platon
- Un auteur contemporain affirme que le but suprême du romancier est de nous faire connaître et aimer l'âme humaine dans sa grandeur comme dans sa misère, dans ses victoires comme dans ses défaites. Et il conclut : « Admiration et pitié, telle est la devise du roman ». Qu'en pensez-vous ? Vous vous appuierez sur La Bête humaines de Zola, Noeud de vipère de Mauriac, Un roi sans divertissement de Giono.
- Quelles idées sur le théâtre de Racine vous suggère ce jugement de François Mauriac (Mémoires Intérieurs, p. 167) : « L'âme dans Hermione, dans Roxane, dans Phèdre, loin de freiner cet instinct animal et monstrueux qu'elle porte en elles, prête à sa fureur ce qu'il faut d'intelligence et de puissance pour le rendre criminel et pour donner raison à la Grâce de leur avoir manqué ».
- LA CONSCIENCE ET L'INCONSCIENT : LES CONFIGURATIONS DE L'ÂME HUMAINE