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Un romancier à qui l'on demandait pourquoi il n'écrivait pas de poésie répondit: Parce que je déteste parler de moi-même. La distinction entre poésie et roman que cette déclaration semble établir vous paraît-elle justifiée ?

Publié le 09/12/2021

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« Quoique l'époque actuelle se préoccupe moins d'établir des distinctions formelles entre les genres littéraires que lesdoctes des siècles passés, les différences subsistent.

Un romancier moderne interrogé expliquait sa répugnance àécrire des poèmes par le fait qu'il « déteste parler de soi-même ».

L'impersonnalité caractériserait donc le roman etla confidence serait au contraire l'apanage de la poésie.Ce critère qui délaisse les définitions habituelles (présence d'une histoire, de personnages, utilisation de la prosepour le roman et, au contraire, caractéristiques formelles pour la poésie classique et d'un certain style pour la poésiemoderne) est-il pertinent ?Nous verrons en quoi effectivement le roman repose sur une certaine mise à distance de l'auteur, en quoi la poésieincline au contraire à plus de confidences et enfin nous montrerons que le fait de parler de soi-même ne suffit pas àdéfinir et à opposer ces deux genres. Le roman, par sa définition, accrue par certaines techniques, apparaît en effet au premier abord comme un genre oùl'écrivain ne parle pas explicitement de lui.Sa définition même s'oppose à des confidences directes de l'auteur vers le lecteur.

Le roman est un genre narratifqui raconte une histoire, où la pensée de l'auteur est réfractée et divisée à travers plusieurs personnages.

Ceux-ci,comme les protagonistes de la pièce de théâtre, parlent, pensent, agissent sans refléter entièrement etexclusivement l'auteur.

La technique d'écriture la plus fréquente du roman, soit le recours aux temps du passé et àla troisième personne, reflète cette distance.Certaines caractéristiques d'écriture augmentent encore la distance entre l'auteur et le contenu immédiat du livre.Quelques romans rompent par exemple avec l'emploi traditionnel de la troisième personne pour adopter soit le « je »soit la deuxième personne (dans La Modification de Michel Butor), soit le roman épistolaire {Les Liaisons dangereusesde Laclos).

Mais les cartes sont brouillées ; si le roman épistolaire éloigne apparemment le romancier de sespersonnages (ainsi, nul ne cherchera à identifier Laclos à l'un de ses personnages), le « je » est égalementtrompeur.

Umberto Eco n'est pas à l'évidence Adso, le narrateur du Nom de la Rose et le « je » d'Adieu de DanièleSallenave est un homme...L'éloignement dans le temps, qu'il s'agisse de romans historiques plongeant dans le passé ou de romansd'anticipation, empêche également une confidence explicite et directe : où se situent Victor Hugo dans Notre-Damede Paris, dans Quatre-vingt-treize et H.

G.

Wells dans La Guerre des Mondes ? La volonté de peindre une grande fresque, d'opposer des milieux sociaux, des êtres dont les pensées divergent, secomplètent ou se juxtaposent, montre* que l'opinion du romancier ne se donne pas directement.

Elle se déduitprogressivement par touches, par un système de contrepoints.

Ainsi doit-on bâtir au fil de la lecture et aprèsréflexion la position de Malraux au sein des différents membres des Brigades internationales dans L'Espoir.Enfin l'utilisation et, éventuellement, la modification d'un mythe, donc d'une donnée qui n'est pas propre à l'auteur,accentue ce travail de décryptage.

Que veut dire Gide dans Le Prométhée mal enchaîné ? Anouilh soutient-il sansréserve Antigone ? Pourquoi ne rend-il pas Créon et Ismène résolument antipathiques ?Il convient donc de ne pas assimiler abusivement l'auteur à l'un de ses personnages.

Le romancier se méfie à bondroit de cette fausse sincérité qui consisterait à plaquer la vérité dans l'œuvre de fiction.

Il a toute liberté pours'inspirer certes du réel, mais également pour le déformer et brouiller les pistes.

En dépit d'un « je » trompeur, lenarrateur d'A la recherche du temps perdu n'est pas Proust, Claudine n'est pas Colette, Bel-Ami n'est pasMaupassant et Le Sagouin (malgré les ressemblances avec le roman autobiographique Vipère au poing) ne raconteabsolument pas l'enfance de François Mauriac.A ce stade, nous pouvons dire, en accord avec le romancier interrogé, que le romancier ne parle pas, du moinsdirectement et implicitement, de lui.

Qu'en est-il en poésie ? La poésie par sa définition la plus large et selon les catégories et les mouvements littéraires est, en effet, plusorientée vers la confidence.Si l'on reprend les éléments définissant le roman, soit la présence d'une histoire et de personnages qui ont pourrésultat d'éloigner l'auteur, il apparaît que ce n'est pas le cas pour la poésie.

Hormis la poésie épique et certainespoésies narratives (comme Jocelyn de Lamartine), la stricte narration, conçue comme une fin et non comme unmoyen, est rare en poésie, particulièrement en poésie moderne.

De même, la présence de personnages, par exempledans La Légende des siècles de Victor Hugo, donne une cohésion plus forte au poème, l'oriente vers l'auteur au lieud'entretenir l'ambiguïté.

Pensons aux différents personnages convoqués dans Amers de Saint-John Perse qui tous, àl'unisson du poète, célèbrent la mer.Certaines catégories de poèmes revendiquent cette personnalisation.

C'est le cas des poèmes de circonstance, ausens restreint ou plus large du terme, où le poète prend comme point de départ un événement personnel qu'ilévoque très clairement dans son poème.

Le poète lyrique prône l'inspiration personnelle, c'est le sens del'exclamation de Musset : « Ah ! Frappe-toi le cœur - c'est là qu'est le génie.

» La Nuit de Décembre du mêmeauteur est un exemple achevé de poésie lyrique puisque s'y juxtaposent des souvenirs (évocation d'orgies, de «l'affreux Lido » de Venise où G.

Sand aurait avoué à Musset sa trahison avec Pagello) et des hantises personnellescomme le thème du double attestant de la déchéance, également présent dans Lorenzaccio.

Les événements sontdes catalyseurs pour les poètes lyriques.

Les incidents familiaux fournissent à Hugo les poèmes désespérés relatifs àla mort de Léopoldine dans Les Contemplations ou, dans un registre différent, les poèmes légers de l'Art d'êtregrand-père.

La vie amoureuse, ses espoirs et ses déboires, constitue un sujet de prédilection : pensons à Baudelairecélébrant Jeanne Duval, sa « Vénus noire », à Verlaine espérant en la figure rédemptrice de sa fiancée Mathilde deMauté, au désespoir d'Éluard après la mort de sa seconde femme Nush.

L'histoire, quand le poète en est un témoinprivilégié ou même un acteur, explique le ton de témoignage que revêt la poésie 'engagée, celle de Victor Hugo dans. »

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