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Selon André Breton, un poème doit être une débâcle de l'intellect. Paul Valéry affirme au contraire: j'aimerais infiniment mieux écrire en toute conscience, et dans une entière lucidité quelque chose de faible, que d'enfanter à la faveur d'une transe et hors de moi-même un chef d'oeuvre d'entre les plus beaux. Faut-il donc condamner totalement le surréalisme ?

Publié le 09/12/2021

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Ci-dessous un extrait traitant le sujet : Selon André Breton, un poème doit être une débâcle de l'intellect. Paul Valéry affirme au contraire: j'aimerais infiniment mieux écrire en toute conscience, et dans une entière lucidité quelque chose de faible, que d'enfanter à la faveur d'une transe et hors de moi-même un chef d'oeuvre d'entre les plus beaux. Faut-il donc condamner totalement le surréalisme ?. Ce document contient 0 mots. Pour le télécharger en entier, envoyez-nous un de vos documents grâce à notre système d’échange gratuit de ressources numériques ou achetez-le pour la modique somme d’un euro symbolique. Cette aide totalement rédigée en format pdf sera utile aux lycéens ou étudiants ayant un devoir à réaliser ou une leçon à approfondir en : Littérature
Comme tout mouvement littéraire profondément novateur, le surréalisme suscita de vives réactions d'hostilité. Elles se manifestèrent avec d'autant plus de vigueur que les nouvelles théories esthétiques étaient plus déconcertantes. Ainsi, loin d'accepter avec André Breton que le poème fût une « débâcle de l'intellect », Paul Valéry proclamait : «J'aimerais infiniment mieux écrire en toute conscience, et dans une entière lucidité, quelque chose de faible, que d'enfanter à la faveur d'une transe et hors de moi-même un chef-d'oeuvre d'entre les plus beaux ». Les Surréalistes se flattaient d'avoir trouvé une voie nouvelle, mais bien que ce jugement les condamne, est-il si sûr que leur entreprise ait échoué ?

« INTRODUCTION Comme tout mouvement littéraire profondément novateur, le surréalisme sus cita de vives réactions d'hostilité.

Elles se manifestèrent avec d'autant plus devigueur que les nouvelles théories esthétiques étaient plus déconcertantes .

Ainsi, loin d'accepter avec André Breton que le poème fût une « débâcle del'intellect », P aul Valéry proclamait : «J'aimerais infiniment mieux écrire en toute conscience, et dans une entière lucidité, quelque chose de faible, qued'enfanter à la faveur d'une transe et hors de moi-même un chef-d'oeuvre d'entre les plus beaux ».

Les Surréalistes se flattaient d'avoir trouvé une voienouvelle, mais bien que ce jugement les condamne, est-il si sûr que leur entreprise ait échoué ? I.

LA « DÉBACLE DE L'INTELLECT » Le jugement de V aléry à leur égard s'explique très bien par le caractère révolutionnaire de leurs affirmations.

A u lendemain des bouleversements apportéspar la Grande Guerre, André Breton et ses amis font naître des cendres du dadaïsme une esthétique nouvelle, originale par ses principes.L'opposition Comme le Bateau Ivre de Rimbaud, les Surréalistes dispersent « gouvernail et grappin » en rompant avec l'art traditionnel ; ils lui reprochentd'être soumis à la raison, cette faculté tyrannique qui étouffe les immenses possibilités de l'esprit humain : ses productions sont ternes, ne parlent pasintimement au lecteur.

Le matérialisme, le réalisme surtout ont provoqué, selon A ndré Breton, la déchéance de l'imagination.Il n'oublie pas cependant, malgré sa sévérité, un autre courant littéraire : dans la débâcle générale, quelques oeuvres sont sacrées, celles qui ont su fairepressentir, au-delà du réel, une « surréalité ».

Ainsi Nerval, Rimbaud, A pollinaire sont considérés comme les précurseurs du nouveau mouvement, avecd'autres écrivains, moins connus en France, qui composèrent des oeuvres fantastiques : Lewis, Walpole.

Le surréalisme se situe donc de façon précise parrapport aux mouvements qui l'ont précédé : aucun d'entre eux pourtant ne le satisfait pleinement.Ce que les précurs eurs ont réussi empiriquement sera pour A ndré Breton l'objet de recherches systématiques, dont la méthode s'inspire des travaux deFreud.

L'homme doit parvenir à cette u surréalité », qui est, selon les termes du Manifeste, la « résolution future de ces deux états en apparence sicontradictoires que sont le rêve et la réalité ».

Le but ainsi choisi détermine les moyens à utiliser : tous tendront à remettre l'homme en posses sion de sonsubconsc ient, du « fonctionnement réel de la pensée ».

Les écrivains compos eront en état d'hypnose, les peintres s'inspireront de frottages ou de collages ;les données du rêve, celles du hasard seront ac cueillies par l'artiste « en l'absence de tout contrôle exercé par la raison ».

A première vue, une telle prisede position paraît déconcertante, au pays de Descartes.

Les aspects irrationnels des littératures allemande ou anglo-saxonne n'ont suscité en France quepeu d'enthousiasme.II.

LE VERDICT DE VALÉRY De fait, les héritiers de la tradition classique ne pouvaient que s'insurger, et la conviction de V aléry est solidement étayée par sa formation, par ses goûts etpar sa conception de la création artistique.Il jugeait certes en connaisseur, pour avoir lui-même écrit des vers avant de s'intéresser à la critique littéraire.

Mais il n'avait jamais vu dans c ette activitéqu'une des possibilités de l'esprit humain et l'avait rapidement abandonnée pour y revenir plus tard : les mathématiques lui paraissaient beaucoup plusformatrices pour l'intelligence, et l'on imagine mal, sur ce plan, un accord entre l'admirateur de N adja et l'interlocuteur de M.

Teste.L'un donne libre cours à son imagination, l'autre cultive avant tout sa raison.

A partir de principes opposés, leurs goûts mêmes divergent.

Non que Valérypuisse reprocher aux Surréalistes l'hermétisme dont on leur fait si communément grief.

Disciple admiratif de Mallarmé, il savait que la poésie a besoind'arcanes, mais celle qu'il aimait était de facture classique, et ses préférences le portaient vers La Fontaine ou vers Baudelaire.Chez eux en effet, il retrouve la lucidité que recommandait Boileau et qui reste pour lui la principale qualité de l'écrivain.

Il désigne sous le terme péjoratif de« transe » les procédés surréalistes auxquels il reproche d'enlever à l'artiste sa responsabilité.

C ette responsabilité se situe à ses yeux au niveau du travailpoétique : aucun mérite ne revient, dans ces perspectives, aux hommes qui se laissent dicter de « confuses paroles » ou d'informes visions, dignesd'enfants ou de primitifs.

Disciple de M allarmé, Valéry ne nie pas la nécessité de l'inspiration, mais il lui préfère le travail qui lui succède : « Les dieux,écrit-il, gracieusement nous donnent pour rien tel premier vers ; mais c'est à nous de façonner le second...

C e n'est pas trop de toutes les ressources del'expérience et de l'esprit pour le rendre comparable au vers qui fut un don ».

C'est cette attitude consciente qui lui paraît digne de l'être intelligent, et le butprincipal de son activité poétique fut à plusieurs reprises l'étude même de cette activité : pour lui donner s on prix, il la pare de toutes les contraintes de l'artclassique, bannies par André Breton.

N'affirme-t-il pas d'ailleurs que le poème doit être une « fête de l'intellect » ? L'opposition entre les deux écrivains setrouve ainsi nettement exprimée et l'appel fait par Valéry aux plus hautes facultés humaines confère à la création poétique une dignité supérieure.

III.

LES CONQUÊTES DU SURRÉALISME Il serait injuste pourtant de nier l'apport du surréalisme dans le mouvement littéraire moderne.

En lui-même, et par les oeuvres qu'il a inspirées, il demeurevivant.Le surréalisme pur Valéry lui-même évoque un « chef d'oeuvre d'entre les plus beaux », et certaines oeuvres surréalistes furent d'éclatantes réussites.

Laplupart reposent sur l'effet de surpris e.

Lautréamont déjà définissait la beauté comme étant la rencontre d'éléments apparemment inconciliables : lestableaux de Magritte illustrent parfaitement cette conception, avec leurs étranges personnages, mannequins de cire corrects, évoluant dans des décorsfantastiques.

Est-ce à dire que Lautréamont ait eu pleinement raison, et que de ces alliances insolites jaillisse la beauté ? Le public est déconcerté le plussouvent, mais on ne saurait contester la valeur esthétique que prennent les images de Paris dans Nadja ou dans Le paysan de Paris d'Aragon.

Et si laconception de la beauté est sujette à discussions, du moins ne peut-on nier que les oeuvres surréalistes produisent des impressions intens es.

Le titremême de l'oeuvre d'Eluard, Capitale de la Douleur, les déserts hétéroclites et hallucinants peints par Tanguy, les « montres molles » de Salvador Dalicréent une atmosphère d'angoisse insurmontable.

C ette réussite suffirait à justifier l'aventure sur réaliste : mais elle s'est montrée plus féconde encore ense dépassant. La plupart de nos poètes contemporains y ont participé.

P our les des poètes surréalistes plus grands d'entre eux, ce fut une étape : les nécessités de la viepolitique les firent exclure du mouvement.

M ais ils en gardent la marque.

Aragon il est vrai, dans ses poèmes de la Résistanc e, est revenu à une facture plusclassique du vers, à des formes traditionnelles telles que la ballade.

O n retrouve parfois chez lui la rhétorique de V ictor Hugo, et il choisit les mêmesthèmes que lui : l'amour, le patriotisme animent ses oeuvres.

P ourtant, le jaillissement des images inattendues renforce le sentiment exprimé, lui donnantdes résonances profondément originales.

Prenons-en pour exemple la douloureuse évocation de Juin 1940 : « Mai qui fut sans nuage et Juin poignardéJe n'oublierai jamais les lilas ni les rosesNi ceux que le printemps dans ses plis a gardés ». Eluard, de la même façon, utilise toutes les ressources de l'étrangeté pour évoquer le drame de Guernica, et, tout comme dans le tableau de Picasso, decette réalité disloquée par la volonté de l'artiste monte un cri poignant de douleur.

Ces diverses remarques nous permettent donc d'apporter quelquesnuances au jugement de V aléry. CONCLUSION En fait, nous avons moins tendance aujourd'hui à refuser la beauté sous prétexte qu'elle n'est pas consciemment c réée : le prestige de l'art primitif, ou toutsimplement des dessins enfantins, en est la preuve.

Il est évident d'ailleurs que les poètes surréalistes ont évolué vers une élaboration systématique deleurs oeuvres.

Une synthèse donc s'est réalisée qui pourrait englober des doctrines opposées à l'origine, pour aboutir à une poésie orientée vers le réel,mais chargée de résonances mystérieuses.. »

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