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ROUSSEAU ou Les principes du droit politique par Lucien Jaume

Publié le 17/06/2020

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« L'irréel est produit hors du monde par une conscience qui reste dans le monde et c'est parce qu'il est transcendantalement libre que l'homme imagine. Sartre, L'Imaginaire, « Idées », p. 358. Une méditation politique Comment méditer sur la politique ? S'il est vrai que méditer c'est rentrer en soi vers l'homme intérieur et se saisir en tant que sujet de pensée, peut-on méditer sur la politique ? L'ordre social et politique (qui concerne l'institution d'une vie commune et d'une souveraineté) n'est peut-être pas conciliable avec ma condition de sujet moral que je découvre dans la méditation. En effet, selon Machiavel, cet ordre politique a ses règles propres : elles gèrent la ruse, la violence, le cynisme. Par contre, comme sujet moral, j'ai la capacité de suivre une loi universelle que je me suis fixée. Dans ces conditions, puis-je concilier morale et politique, ce qui serait proprement méditer sur l'institution politique ? Cette exigence, chez Rousseau, de ne pas séparer morale et politique, s'accompagne logiquement d'une autre : si je me conçois comme individualité, un « soi » qui médite et s'interroge (et même, si je me revendique comme singularité : par les Confessions}, puis-je trouver en moi-même le principe d'une loi universelle qui me fasse intégrer une communauté raisonnable sans cependant renoncer à moi-même ? Car ce que je veux en tant que sujet moral libre, Kant dira ensuite « autonome », c'est n'obéir qu'à moi-même. Raison et faits Mais alors, ces deux exigences, concernant la morale et la liberté en politique, rencontrent une formidable objection : l'expérience historique des hommes. Machiavel le savait bien, qui s'attachait par principe à la « vérité effective » (« verità effettuale ») de la chose politique. Ce sujet moral que je veux retrouver dans l'ordre des sociétés, comment en rendre compte, si rien ou presque dans les faits ne montre une société et un gouvernement où l'individu est traité comme tel ? Si je pose que « l'homme est né libre » (Contrat social, I, 1) comme sujet apte à se gouverner moralement et politiquement, comment résister à ce que m'opposent les faits : « partout il est dans les fers » (ibid.) ? Ici, il faut désarmer, ou philosopher. Le coup de génie de Rousseau fut de traiter cette opposition en cherchant justement la clef dans l'opposition : ce qui est de l'ordre du rationnel et du raisonnable n'a pas à être déduit de l'expérience, mais de la raison elle-même ; Kant dira ensuite : c'est du domaine de l'a priori, et non de celui de l'empirique. Ainsi Machiavel devient-il non pas « faux » (qui pourrait le prétendre ?), mais plus sociologue que philosophe, grâce à Rousseau. Machiavel, théoricien de la pratique des « princes » ; Rousseau, théoricien de l'institution du social. Machiavel étudie la politique, Rousseau le politique. Ecartons les faits Il s'agit donc, comme disait déjà le Discours sur l'origine de l'inégalité (1755), d'« écarter tous les faits », pour aller droit aux exigences pures de la raison : le livre I du Contrat social (1762) entame une recherche de légitimité sur l'ordre politique, qu'il ne dissocie pas du lien social avec autrui : « Comment ce changement s'est-il fait ? Je l'ignore. Qu'est-ce qui peut le rendre légitime ? Je crois pouvoir répondre à cette question. » (I, 1). Il ne s'agit donc pas de se laisser décourager par le manque de connaissances sur le passé des sociétés et la formation des Etats, ni inversement de se laisser intimider par l'abondance des témoignages sur les systèmes oppressifs dans l'histoire : les faits ne donnent raison à quiconque, les faits ne font pas droit, la force ne fonde pas la justice. D'où l'ironie de Rousseau envers les théoriciens comme Grotius : « Il cite l'esclavage en exemple. Sa plus constante manière de raisonner est d'établir toujours le droit par le fait. On pourrait employer une méthode plus conséquente, mais non plus favorable aux Tyrans. » (I, 2). Souvenons-nous ici de Platon : déjà Thrasymaque, au Livre I de la République, objectait à Socrate que « la justice n'est rien d'autre que ce qui profite au plus fort », par « les lois tyranniques en tyrannie, les lois démocratiques en démocratie », etc. L'Idée de contrat S'il peut y avoir un absolu, ce que demande la raison, le relativisme tiré des expériences sociales peut être contourné : il y a, en droit, un sujet moral qui à la fois fait l'ordre social et politique, et y obéit. Reste à déterminer la nature exacte de cet absolu que requiert la raison : il nous faudra examiner l'idée de contrat entre les hommes. L'homme et le citoyen Reste également la seconde question : l'individu peut-il être en harmonie avec l'universel ? Peut-on faire que l'ordre politique ne soit pas oppressif, ni à travers une tyrannie certes, ni non plus à travers une majorité de fait, car il y a des tyrannies de la majorité ? La réponse de Rousseau sera qu'il faut choisir : pour devenir citoyen, et « associé » (car «société» vient du latin « socius », l'associé), il faut renoncer à l'homme naturel : « Il faut opter entre faire un homme ou un citoyen : car on ne peut faire à la fois l'un et l'autre. » {Emile, liv. I). Faire un citoyen Reprenons notre problème : si nous voulons que l'origine des sociétés soit fondée en raison, c'est-à-dire ni dans les faits historiques, qui ne prouvent rien, ni dans un type de pouvoir de quiconque sur quiconque, qui serait une domination de fait, c'est notre propre conscience qu'il faut interroger ; sera juste un ordre social où l'égalité et la liberté seront garanties contre toute oppression, et tel que chacun « n'obéisse pourtant qu'à lui-même » (I, 6). Mais qui est donc ce «lui-même»? Ce ne sera pas l'homme de « l'amour-propre » qui ne vit que dans le paraître, l'opinion, et qui est déjà une fabrication des sociétés injustes (thème du « Discours » de 1755). Cet homme se désintéresse de ses semblables et il est intérieurement captif de son image. Cet homme est le complice des maux des sociétés où le droit est oublié : « Tel se croit le maître des autres, qui ne laisse pas d'être plus esclave qu'eux. » (I, 1). Mais ce ne sera pas non plus l'homme naturel, du premier état de nature, et que le « Discours » avait étudié : vivant encore au stade animal, borné, et séparé de ses semblables, cet homme ne peut rien concevoir qui le dispose à une loi commune. Mais alors, pouvons-nous nous représenter comme un « nous-même » qui soit entre ces deux hommes-là ? Entre la pure nature animale et la culture de l'Europe raffinée, y a-t-il quelque facteur qui puisse faire que j'obéisse à tous pris comme corps social et politique, sans que j'obéisse à quelqu'un en particulier ? Oui, un tel facteur existe, si nous rentrons en nous-même, et c'est la voix que consulte la véritable « philosophie » (que Rousseau oppose à celle des Encyclopédistes) : la raison. Elle est à la fois développée (mais aussi étouffée ou dévoyée) par les sociétés, et virtuellement présente dans l'animal béat de l'état de nature (ignorant de sa « perfectibilité »). ...»

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