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Publié le 22/09/2022
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Lignes d’Horizon
N°001 - Septembre 2020
23
Horizons
Pour un Cameroun indépendant
et souverain, promouvoir le rubénisme
Par Ambroise Kom*
Aujourd’hui comme hier ou même comme avant-hier, pas mal
de Camerounais se demandent pourquoi leur pays avance à tâtons.
Certes, le régime Ahidjo, malgré sa brutalité, nous avait
donné l’impression de veiller à notre bien-être économique tout
en promouvant, à sa manière, l’unité nationale.
Or, depuis 1982,
l’on assiste à un pilotage à vue, générateur du chaos ambiant,
de crash ou d’implosion.
Ahidjo, comme son successeur, sont
pourtant tous les deux sortis du moule d’Aujoulat, leur commun
mentor, et revendiquent l’un comme l’autre leur inféodation
aux leaders métropolitains, des hommes politiques aux visions
et aux idéologies affirmées (libéralisme, socialisme, etc.).
Ahidjo
s’était proclamé gaulliste non Français alors que l’héritier qu’il
s’est choisi se vanta d’être le meilleur élève de François Mitterrand! Mais l’observateur averti aura remarqué qu’aucun de nos
chefs d’État ne fait la moindre allusion aux partis ou aux idéologies politiques de son gourou.
Au Cameroun curieusement, la plupart des hommes politiques
qui revendiquent l’héritage du mouvement nationaliste se réclament assez bruyamment de l’Union des populations du Cameroun (Upc), mais très rarement de Ruben Um Nyobé, son
leader historique.
Tout se passe comme si les prétendus upécistes
camerounais avaient presque tous oublié Um Nyobe alors que
chacun(e) revendique une tendance de l’Upc au contenu incertain! Avec le temps, on se rend compte que pareille posture
n’est pas aussi fortuite qu’on pourrait le croire.
En France, pour
rester dans le pays de référence de la plupart de nos hommes
politiques, les leaders appartiennent à des partis aux idéologies
généralement connues (extrême droite, droite, centre, gauche,
extrême gauche) alors qu’au Cameroun, on sait que l’Upc était
un parti nationaliste certes, mais dont l’idéologie était encore
en construction au moment où Um Nyobe est assassiné, même
si ses adversaires lui ont collé toutes sortes d’étiquettes pour
diaboliser et délégitimer son leader.
C’est en effet Ruben Um
Nyobe qui, en dehors des luttes pour l’Indépendance et pour la
Réunification, était en train d’énoncer le projet de société du
Cameroun indépendant et réunifié.
Et tout indique que ses traits
de caractère et les jalons qui se dégagent de sa démarche révèlent une intégrité personnelle et une rigueur morale qui ne sera
presque jamais prise en défaut.
Il suffit, pour s’en rendre compte, de consulter, entre autres, les
ouvrages qu’Achille Mbembe a consacrés aux écrits du père de
l’indépendance du Cameroun, Ruben Um Nyobe, Le Problème
national camerounais (1984) et Ruben Um Nyobe, Écrits sous maquis (1989).
Il en ressort que Um Nyobe, syndicaliste, était un
meneur d’hommes, un stratège et un inlassable «community organizer», pour emprunter une expression chère aux Américains.
Um Nyobe se forme
comme un militant
Des hommes politiques vendent leur constamment en
quête de la justice et
âme au plus offrant et jouent à se
en lutte contre l’arbicouvrir du manteau de l’Upc pour traire.
Honnête et impartial, il est, écrit
cacher leur visage de renégats.
Mbembe, «une énigme
pour les puissants»
parce qu’«il ne se fait
pas acheter, même à prix d’or» car, pour lui, «l’indépendance passe
avant le pain journalier».
Pour Um Nyobe, l’Upc, en tant que
parti politique, n’est qu’un instrument car l’objectif essentiel n’est
pas la conquête du pouvoir mais la lutte pour l’indépendance
et la réunification du Cameroun.
Pour lui, la lutte de libération
relève pratiquement d’une hygiène mentale, d’une catharsis ou
de ce qu’il appelle «santé spirituelle».
Pour reprendre l’image de
Sartre, lutter pour la libération c’est se guérir des traumatismes
de la colonisation.
Voilà pourquoi dans son engagement, Um
Nyobe «assuma, non seulement la mémoire collective des gens de
sa région natale, mais celle de l’ensemble du Cameroun»(1) et des
peuples asservis du continent africain de manière générale.
Pareille détermination ne pouvait que lui valoir l’ire des colonisateurs et de leurs affidés.
Les démêlés de l’Upc avec l’Église
presbytérienne qui l’excommunie et le radie comme ancien
d’église ainsi que l’Église catholique qui l’accuse d’être la tête
de pont du communisme au Cameroun sont autant d’actes destinés à ruiner son audience.
Le pouvoir colonial, quant à lui,
feint d’ignorer l’engagement anticolonial d’Um Nyobe pour
sinon réduire le leader nationaliste à un violent criminel qu’il
convient de neutraliser, du moins l’assimiler à un fou du fait de
la dissidence affichée.
Cet étiquetage permettra à l’occupant de
croire qu’il a définitivement diabolisé le prestigieux leader et
qu’il a, en le contraignant à la clandestinité, réuni toutes les
conditions pour se permettre de l’accuser de rébellion et de
l’éliminer physiquement pour faire montre de la puissance du
colonisateur.
Ce qu’il fit en septembre 1958.
Les héritiers du pouvoir colonial, poursuivant le travail de leurs
parrains ont, comme on l’a souligné, jeté un voile noir sur le
rôle des militants de la lutte de libération.
On pourra certes
nous rappeler que la loi No 91/022 du 16 décembre 1991 réhabilite certaines figures de l’histoire du Cameroun dont Ruben
Um Nyobe, Ernest Ouandié et Félix Moumié.
Peu de militants
politiques osent pourtant prononcer les noms des réhabilités, et
tout se passe comme si le faire pourrait leur attirer quelques ennuis.
Cette loi s’apparente d’ailleurs à l’os jeté à un chien tant
elle a l’air d’un service minimum pour ne pas parler d’entourloupe.
Il est vrai que nombre d’acteurs qui revendiquent bruyamment les idéaux des militants upécistes ne font guère mieux.
En
dehors de certains fidèles tels Ossende Afana, Ndeh Ntumazah
et quelques autres, qui ont poursuivi le combat jusqu’à leur dernier souffle, nombre de figures qui revendiquent l’héritage de
l’Upc le font pour des raisons essentiellement alimentaires.
On
se souvient d’Augustin Frédéric Kodock à qui on attribue la célèbre formule «lorsqu’on se noie dans la rivière, on s’accroche à
tout, même au serpent!»(2).
Ainsi justifiait-il la trahison des rêves
de l’Upc pour un poste de ministre (1992-1997 ; 2002-2007)
dans le gouvernement néocolonial au pouvoir depuis 1960.
On
pourrait en dire autant de Hogbe Nlend qui, lui aussi, brandit
son prétendu upécisme pour se faire nommer ministre (19972002).Robert Bapooh Lipot qui se réclame tout autant de l’Upc,
est considéré par les observateurs avertis comme un «sous-marin
de Biya en pays Bassa»(3).
A preuve, le régime vient de lui offrir,
pour compenser la perte de son siège de député, un juteux strapontin en le nommant président du conseil d’administration de
la Société camerounaise de recouvrement.
Voilà donc une
frange de collabos qui s’inscrivent dans une ligne inaugurée par
Théodore Mayi Matip, qui fut pourtant un compagnon de Ruben
Um Nyobe.
Même s’il ne l’a pas trahi comme certains l’en soupçonnent, il s’est rapidement conformé à l’ordre colonial et néocolonial.
Comme on le voit, des hommes politiques camerounais vendent
leur âme au plus offrant et jouent à se couvrir du manteau de
l’Upc pour cacher leur visage de gangsters et de renégats.
Raison
pour laquelle on entendra à peine prononcer le nom de Ruben
Um Nyobe alors qu’ils usent et abusent de l’étiquette UpcC à laquelle ils donnent des contenus de circonstance et des plus incertains.
C’est dire que pas mal d’imposteurs encombrent aujourd’hui les rangs de l’Upc.
Étant donné qu’ils jouent le jeu du
pouvoir en place, tout se passe comme s’ils mettaient tout en
œuvre pour étouffer la voix de quiconque cherche à leur rappeler que l’Upc était tout de même un mouvement de résistance,
de dissidence, et qu’il convient de rester un tant soit peu fidèle
à cette ligne.
Voilà sans doute qui explique que des voix comme
celles de Basile Louka, Anicet Ekane de l’Upc-Manidem , de Samuel Mackit et quelques autres soient, assez ironiquement, considérées comme des trouble-fête.
Finalement, il y a lieu de douter que l’Upc puisse, dans un
avenir prévisible, retrouver un semblant de cohésion interne
susceptible de lui donner ses marques originelles, ne serait-ce
que le temps d’une campagne électorale quelconque.
D’autant
d’Horizon
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N°001 - Septembre 2020
Horizons
Le rubénisme
ne s’arrête
point à
l’acquisition
de
l’Indépendance,
car celle-ci
n’est que le
début de la
bataille
pour la
construction
nationale.
plus que le parti auquel Ruben Um Nyobe avait donné une dimension nationale même si les membres les plus influents
étaient Bassa et Bamiléké, semble en voie de confiscation par
quelques nombrilistes Bassa.
Et c’est juste si ce n’est pas au
nom de l’upécisme qu’un militant apparemment avisé tel Jean
Bahebeck revendique à cor et à cri la création d’une région
exclusive pour les Bassa.
Incroyable paradoxe.
Heureusement, les artistes camerounais sont restés des promoteurs inlassables du rubenisme.
Il suffira de quelques exemples
pour montrer que la lecture de leur production nous renseigne
sur ce qui pourrait être les jalons d’un récit national.
Ainsi en
va-t-il de Hemley Boum avec Les Maquisards (2015) qu’elle appelle à juste titre «fiction historique».
Le portrait qu’elle nous
donne à lire de Ruben est celui d’un homme totalement voué à
sa patrie.
Pédagogue, il explique au peuple l’histoire récente du
Cameroun et son statut de territoire sous mandat.
Face à la répression coloniale, il oppose la non-violence et restera, jusqu’au
sacrifice suprême, fidèle à son éthique de lutte.
Et ainsi en ira-til de ses disciples, à l’instar de ses intrépides personnages que
sont Amos Manguelé et Likak qui ne reculeront devant aucun
sacrifice pour défendre la cause qu’ils ont embrassée.
Contrairement aux upécistes de circonstance qui encombrent l’horizon
politique du Cameroun d’aujourd’hui, les personnages de Hemley Boum inspirent admiration de par leur courage et la dignité
dont ils font montre devant l’adversité.
Il est d’ailleurs ironique
que l’auteur suggère que son roman est une fable que chacun
doit s’approprier à sa manière.
Comment ne pas penser qu’il
s’agit là d’un clin d’œil à certains acteurs de la scène politique
camerounaise d’aujourd’hui?
Dans le même ordre d’idées, on peut aussi citer Blick Bassy ou
Were Were Liking.
C’est en musique que Bassy nous invite,....
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