Philo: LE TRAVAIL cours
Publié le 21/06/2025
Extrait du document
«
LE TRAVAIL
Introduction :
Selon une définition très large, le travail peut désigner toute activité de production,
supposant la mise en oeuvre de moyens techniques et permettant d'atteindre un certain but.
Cette activité est organisée, déterminée par des règles et des principes d'action.
Le travail produit
quelque chose en procédant à une transformation : il transforme la nature de manière générale,
en donnant une certaine forme à une matière préexistante.
Cette matière peut être naturelle –
inerte ou vivante –, mais peut aussi consister en une matière déjà transformée par d'autres êtres
ou de l'information (la matière devient alors synonyme de medium).
Ce faisant, il transforme aussi
le travailleur lui-même, non seulement parce qu'il doit acquérir des compétences pour effectuer
efficacement sa tâche, mais parce qu'il les développent dans et par son activité de production.
Cependant, parmi les diverses activités de production, toutes ne sont pas pensées, ni vécues
comme un travail.
Le travail renvoie à une activité présentant un caractère laborieux : il ne va pas
sans peine, car on doit faire appel à ses forces physiques et intellectuelles, ce qui provoque au
bout d'un certain temps une fatigue, il accapare un certain temps qui pourrait être destiné à des
activités apportant plus de plaisir immédiatement.
Il a donc un caractère sacrificiel.
Il exige des
efforts.
Si on s'y adonne pourtant, c'est donc parce qu'on le veut bien.
En ce sens, il implique de la
volonté.
On ne travaille pas sans le vouloir.
Dire qu'il est volontaire ne signifie pas qu'il soit
nécessairement motivant (un travail peut être répétitif et ennuyeux), ni qu'il ne peut pas être
„forcé“ (comme le travail de l'esclave dans les champs de coton), mais simplement qu'il est
intentionnel et plus ou moins consenti et conscient , même si on l'accomplit par nécessité pour
rester en vie.
Mais cela suffit-il à justifier la volonté de travailler ? Toutes les raisons de travailler
se valent-elles ? A quelles conditions peuvent-elles l'être ?
A première vue, le travail ne semble pas avoir en effet de sens ni de valeur en lui-même : il vise
toujours autre chose que lui-même.
Autrement dit, on ne travaille pas pour travailler, mais pour
atteindre une fin que l'on vise.
Il est le moyen d'atteindre cette fin.
Il tire alors sa valeur d'autre
chose que lui-même.
Mais de quoi le travail tire-t-il sa valeur ? La tire-t-il seulement de la fin qu'il
vise ? du résultat qu'il produit ? ou bien de sa capacité à l'atteindre ? Mais toute fin est-elle
propre à justifier le travail qu'on fait ? Et tout travail „bien fait“ valide-t-il la tâche accomplie ?
Par exemple, il paraît difficile moralement de justifier le „travail“ du tueur à gages, même s'il est
efficace et s'il lui permet de bien gagner sa vie...
Pour en juger, il faudrait considérer non seulement les moyens utilisés, la fin visée, mais aussi les
effets réellement produits par le travail.
Mais tous ses effets sur la réalité extérieure sont-ils
véritablement désirables ? Les effets d'un travail humain peuvent être ambivalents.
Par exemple,
l'extraction de charbon ou de pétrole permet certes de satisfaire plusieurs besoins humains –
produire et distribuer de l'énergie pour faire fonctionner des machines, des véhicules, s'éclairer, se
chauffer, etc.
– mais elle compromet aussi la survie de l'humanité par ses effets sur le milieu
physico-chimique nécessaire à la préservation de la biosphère dont les humains dépendent euxmêmes.
Peut-on valoriser toute transformation de soi produite par le travail ? Un travail forcé par
exemple produit une aliénation du travailleur, il le rend étranger à lui-même, en l'empêchant de se
développer en tant qu'être proprement humain dans des activités non contraintes et sources de
plaisir.
Il peut transformer l'homme en bête de somme.
Il prend alors un caractère déshumanisant.
Ne faut-il pas alors également prendre en compte les conditions de travail pour déterminer la
valeur du travail ?
Ainsi, tout travail comporte trois faces:
– une face consumante: il implique une dépense d'énergie, de temps, des efforts;
– une face contraignante: il exprime une dépendance subie;
– une face développante: il trouve sa signification dans le résultat recherché et il
transforme celui qui transforme une réalité donnée par son travail.
Ces trois aspects du travail peuvent être à l'origine de conflits entre des individus ou entre des
groupes, conflits résultant de la division du travail dans la société, dans la famille et même entre
les diverses sociétés dans le monde, notamment pa rce que le travail humain ne consiste pas dans
l'exécution d'un programme de manière mécanique, comme pour la machine.
En effet, le travail
est une activité consciente et réfléchie, il est l'activité d'un être doté d'intelligence et de force
physique, mais il est également lié à l'affectivité : il suscite des émotions et des sentiments, il peut
engendrer parfois du plaisir mais aussi de la souffrance physique et morale.
Il peut être doté de
sens et de valeur, en étant lié à un projet mais le travail peut être vécu aussi comme une activité
dépourvue par elle-même de sens et d'intérêt, épuisante, méprisée par les autres, ennuyeuse.
Cependant, cela ne suffit pas pour rendre compte de ce que représente le travail pour nous.
En
effet, les sociétés modernes peuvent être définies comme des sociétés fondées sur le travail.
Cela
veut dire que le travail est au fondement de l'ordre social ; il détermine la place des individus
dans la société, il est le principal moyen de subsistance et il occupe un part essentielle de la vie
individuelle.
Le travail est une norme.
Cette importance du travail dans notre existence est telle que nous attendons du travail qu'il ait
un sens, et même qu'il donne par lui-même du sens à notre existence : il tend même à être pensé
comme une valeur qui constitue une fin en soi, nous permettant de nous réaliser.
Nous ne
concevons pas de pouvoir nous réaliser pleinement sans travailler.
Mais la réalité du travail est souvent loin de pouvoir répondre à nos attentes; il est alors source
de souffrances, qui dépassent la simple fatigue physique que peut engendrer la dépense
d'énergie dans une activité quelconque.
Il peut être en effet aliéné, au sens où nous nous sentons
étrangers à nous-mêmes quand nous travaillons.
Comme le fait remarquer Marx, un travail
apparaît comme aliéné „lorsqu'on fuit le travail comme la peste“, si l'occasion se présente de
pouvoir y échapper.
Est-il alors vraiment raisonnable d'attendre du travail qu'il donne un sens à
notre existence ? Le sens de la vie, le bonheur et l'affirmation de sa liberté ne se trouvent-il que
dans le travail ?
On peut en douter car notre concept du travail n'est pas universel: il a existé et il existe encore
des sociétés qui ne sont pas fondées sur le travail au sens où nous l'entendons.
Or, nous avons
tendance à croire qu'il y a un idéal du travail qui aurait été défiguré : il y aurait eu ainsi un âge d'or
où le travail était comme il devrait être et qu'il faudrait retrouver.
Mais il s'agit d'une illusion qu'il
convient de dénoncer : notre concept de travail n'a pas toujours existé et il n'est pas figé, il
s'enrichit sans cesse de nouvelles dimensions.
Notre concept de travail est ainsi plus ambigu
qu'on ne le croit : il est constitué de plusieurs couches de significations qui se sont sédimentées
au cours de notre histoire, comme le rappelle la sociologue Dominique Méda dans son essai
intitulé Le travail.
Nous projetons souvent sur le passé ou d'autres sociétés notre catégorie
moderne de travail, qui leur est étrangère, en quoi nous sommes victimes d'une illusion
rétrospective ou ethnocentrique.
Les enjeux du travail sont donc déterminés historiquement,
économiquement, socialement et culturellement.
En ce sens, il n'est pas si naturel de travailler...
I) Le travail comme activité de subsistance.
Le travail peut être défini comme un ensemble d'activités qui permettent à l'origine de produire
ou d'obtenir de quoi assurer sa subsistance, il vise à prélever dans la nature de quoi satisfaire
des besoins vitaux.
Dans les sociétés préhistoriques – avant le néolithique – ou les sociétés
premières, on assure sa survie en s'adonnant à des activités de chasse, de pêche et de cueillette
ou de jardinage pour se nourrir mais aussi pour construire des abris ou élaborer des remèdes, par
exemple.
En tant que tel, le travail paraît répondre à une nécessité naturelle, biologiquement
déterminée.
Les hommes ont dû se confronter à la nature (leur milieu de vie) pour survivre, car la nature peut
être hostile, elle n'est pas toujours généreuse dans les biens qu'elle peut offrir aux hommes pour
satisfaire leurs besoins.
Les hommes ont ainsi transformé leurs conditions d'existence
notamment par des activités techniques.
Les plus anciennes traces d'humanité (plus exactement
d'un processus d'hominisation) sont des pierres taillées qui servaient d'outils ou d'armes pour la
chasse.
Pourtant, on peut affirmer que toute société humaine n'est pas fondée sur le travail.
Cela ne veut
pas dire que le travail n'a pas toujours existé et qu'il serait brutalement apparu à....
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Cours de philo sur la conscience - Chapitre 1 : Que-ce qu’un sujet ?
- Cours de philo: la justice-
- cours de philo (notes de cours)
- Cours ses quels mutations du travail et de l'emploi
- Cours 4 philo morale et politique: Descartes et la liberté d'indifférence