PÉRIGORD -La foire de Saint-Alvère.

« 1 / 2 PÉRIGORD -QUERCY La foire de Saint- Al v ère 24 -Dordogne Lettre de voyage Chère'", Je suis à Bergerac, dans le Périgord ; je reviens à l'instant de Saint-Alvère, un village situé près du château de Gaubertie.

Tu connais ma passion pour les documents anciens ; eh bien, imagine-toi qu'il y avait, à J'occasion de la foire annuelle, une vente de "vieux papiers" comme ils disent.

Étrange coïncidence, j'ai trouvé un texte daté de 1762 sur J'organisation des foires dans la région.

Il s'agit d'une sorte de lettre publique, signée d'une certaine comtesse de la Feuillade, demandant aux paysans et commerçants de bien vouloir se rendre à une foire nouvelle­ ment créée.

Ce n'est pas vrJiment une invi­ tation, mais plutôt une convocation ; écoute plutôt : "Je vous prie de faire avertir tous les habitants de vos environs de ne point man­ quer de se trouver à notre marché avec tous leurs cochons, moutons, poulets, œufs et autres biens.

Il y aura beaucoup de blé.

On tiendra une note de tous ceux qui man­ queront.

Et si quelqu'un manque, il aura la visite d'un sergent royal, quand il ne devrait que cinq sols d'arréages et ne pourra tenir aucun chien." j'imagine que cette dernière expression est une interdiction de chasser, qui, hier comme aujourd'hui, devrait être dissuasive.

Et comme un bonheur ne vient jamais seul, j'ai trouvé chez un bouquiniste une édition originale du Colosse de Maroussi d'Henry Miller.

Il ne s'agit pas d'une édition ancienne - elle date de 1948 -mais c'est un livre que j'avais prêté et que l'on ne m'a jamais rendu.

Cette nouvelle n'aurait aucun intérêt s'il n'y avait dans cet ouvrage des lignes admirables sur la région où je me trouve.

Miller parle du Périgord comme d'un paradis et il dit : "Rien ne m'empêchera de croire que si l'homme de Cro-Magnon s'ins­ talla dans ce coin, c'est qu'il était extrême­ ment intelligent et que le sens de la beauté était en lui très développé." Lisant ces lignes, 1e me suis senti très proche de l'homme des cavernes et, si j'avais eu un quelconque talent, j'aurais aimé écrire ces autres lignes de Miller : "Cette visite à la Dordogne fut pour moi, je le répète, d'une importance capitale : il m'en reste un espoir pour l'avenir de la race, pour celui de la terre même.

Il se peut qu'un jour la France cesse d'exister, mais la Dordogne survivra, tout comme les rêves, dont se nourrit l'âme humaine." Quant à moi, pour fêter ces bonheurs, je me suis offert une omelette aux truffes.

A bientôt.

P.S.

Je te signale que l'on a pris la mauvaise habitude de "masculiniser" sainte Alvère ; il s'agit en réalité d'une femme martyr, et on doit donc écrire Sainte-Alvère.

Photo Bordes 1 Explorer C MClvlXC, Edito-Serviœ S.A.

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