MONTESQUIEU
Publié le 15/05/2020
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MONTESQUIEU
Le profane est généralement surpris lorsqu'il apprend que le juriste Charles de Secondât, baron de la Brède et deMontesquieu, président du Parlement de Bordeaux à vingt-sept ans, a écrit non seulement Les lettres persanes etL'esprit des lois, mais aussi des études sur le flux et le reflux, l'écho, la transparence des corps, les maladies desglandes rénales, parmi de nombreux écrits d'économiste, tel le Mémoire sur les dettes de l'Etat...
C'est dans deux ouvrages, Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence (1734) etL'esprit des lois (1748), qu'il expose sa conception politique et historique, le premier de ces ouvrages représentantune enquête historique de base, fondant et illustrant les réflexions générales du second.
A regarder d'un peu haut la conception de Montesquieu, on pourrait dire que, sans connaître le mot, il est «structuraliste ».
En effet il étudie la logique interne du système des lois et des institutions dans leurs rapports avecles conditions réelles (et réalistes) de leur existence historique, sans référence à des principes transcendants sur lesens de l'histoire ni métaphysiques comme la loi universelle ou le droit naturel.
Les lois ne sont ni déduites d'à prioriidéalistes ni dues à la fantaisie ou à l'arbitraire des hommes, « elles sont, dans la signification la plus étendue, lesrapports nécessaires qui dérivent de la nature des choses » et il y a entre les lois positives, celles que nous apportel'enquête historique, des relations naturelles d'exclusion ou d'inclusion, commandées non par l'arbitraire d'un hommeou d'une assemblée mais par la nécessité des choses.
Il s'agit d'une « nécessité rationnelle » dit encore Montesquieu « et non d'une fatalité aveugle ».
Que cettestructure existe n'empêche pas non plus que la responsabilité des hommes soit en cause : il en est des systèmes delégislation comme des combinaisons mécaniques de la technique qui, réglée par les lois éternelles du mouvement,attendent pourtant l'inventeur qui les réalise.
On constate, dit notre auteur, que telle forme de gouvernement dans tel pays à tel moment implique telle législationpolitique, telles lois sur l'éducation, tel code civil, criminel, privé, telles lois économiques, telles décisions concernantla guerre etc., et toutes ces lois sont fonction les unes des autres par rapport à la forme de gouvernement, laquelleest fonction d'un contexte historico-socio-géographique et humain.
C'est la théorie des « climats ».
Montesquieu cherche donc à formuler les modèles mécaniques qui pourraient inspirer les législateurs, et pour lesconcevoir il part des faits sociologico-historiques disponibles c'est-à-dire des système d'institutions connus, dupassé ou du présent, autant de cas particuliers dont se dégagent par induction les formes générales.
Le maximum de liberté se produit lorsque les pouvoirs publics se contrôlent mutuellement grâce à leur indépendancerespective : le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif, le pouvoir judiciaire (on ne peut pas encore dire à son époque,le pouvoir économique) doivent être indépendants les uns des autres et s'équilibrer en s'entre-1 imitant.
Plus cespouvoirs sont confondus, moins il y a de liberté.
Mais par ailleurs il y a un optimum de liberté compatible avec lasituation historico-sociale du moment.
La réflexion de Montesquieu est donc originale à plus d'un titre, quoique les législateurs révolutionnaires n'aientretenu de lui que les passages où il démontre l'inefficacité de l'absolutisme.
Son analyse des types de gouvernementsort des chemins battus de la description des trois fameux genres, et sa conception du progrès, s'il en a une, nesuppose pas du tout un prétendu « sens de l'histoire ».
Echappant à toutes les formes du millénarismeeschatologique et à tous les messianismes, qui vont retrouver tout leur élan au XIXe siècle, il envisage le progrèscomme l'invention de la « mécanique politico-administrative » qui fonctionne le mieux dans le contexte humainconcret qu'elle concerne.
En ce sens, il est lui aussi à placer parmi les fondateurs d'une sociologie scientifique, intégrant la connaissancehistorique, la géographie humaine, la géographie économique, la démographie, la psychologie,...
et à partir desconclusions de laquelle on doit calculer la politique..
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