Mexique (1980-1981) Un géant pétrolier est né

« Mexique (1980-1981) Un géant pétrolier est né Pétrole, agriculture, politique internationale: en 1980, au Mexique, les débats ont tourné autour de ces trois thèmes, la politique intérieure étant traditionnellement un sujet "souterrain".

Quant au redéploiement industriel, lié au boom pétrolier, il fait moins l'objet de discussions que d'une gigantesque foire d'empoigne! Une date résume l'année: 18 mars, 42e anniversaire de la nationalisation des pétroles.

Ce jour-là, le président José Lopez Portillo a annoncé le lancement du "système alimentaire mexicain" (SAM), dont l'objectif est de remédier au déficit alimentaire qui croît alors qu'augmentent les recettes pétrolières.

En effet, l'année 1980 aura été celle du boom des pétrodollars (10 milliards contre 4 en 1979) et celle aussi d'une catastrophe agricole sans précédent: le Mexique a dû importer 10 millions de tonnes de céréales et d'oléagineux.

Pour la première fois sans doute depuis les années noires de la révolution, le pays a eu une balance extérieure agricole à peine équilibrée. Conscientes que l'aisance nouvelle procurée au pays par les excédents tirés de l'or noir risque de déclencher une grave crise sociale (l'exemple de l'Iran est dans tous les esprits), les autorités entendent prévenir, ou du moins limiter, le fossé qui risque de se creuser entre les bénéficiaires de cette manne et ceux, les ruraux notamment, qui en recueillent les miettes.

Cela est d'autant plus urgent que le Mexique est l'un des pays du tiers monde où les écarts entre riches et pauvres sont les plus criants.

L'inflation, corollaire du boom, risque même d'appauvrir encore cette partie de la population qui tire ses modestes ressources de l'agriculture dite de subsistance (un tiers des 68 millions de Mexicains). Le SAM devrait injecter environ 5 milliards de dollars supplémentaires en trois ans (1980-1982) au profit des petits paysans.

Il s'agit, en particulier, de relancer la production des produits alimentaires de base: maïs, haricots et quelques autres céréales et oléagineux.

L'objectif est d'aboutir en 1985 à une autosubsistance alimentaire totale.

Même s'il paraît exagérément ambitieux, ce souci de faire servir à l'agriculture, et aux agriculteurs, une fraction non négligeable de la recette pétrolière est un acte politique important. Ce même 18 mars, une substantielle augmentation des réserves pétrolières prouvées du Mexique était annoncée: 50 milliards de barils.

Plus tard, ces réserves allaient être évaluées à 61 milliards! Un géant pétrolier est né.

En ce qui concerne les réserves, le Mexique se place déjà au cinquième rang mondial et il est le sixième exportateur de la planète, malgré une politique protectionniste: Mexico refuse de livrer à l'étranger des quantités de pétrole telles que son économie soit inondée de pétrodollars! Le Mexique entend également diversifier ses exportations d'or noir: cette mesure vise les États-Unis, de loin son premier client (et aussi son premier vendeur). Le pétrole augmente donc la marge d'autonomie d'un pays qui a longtemps senti la malédiction d'être trop près des États-Unis.

Cette indépendance, le président. »