Marivaux romancier

« Marivaux romancier Si Marivaux s'est illustré surtout par son théâtre, ses romans suffiraient à son renom.

Il parodie d'abord avecdiscrétion le goût précieux (Pharsamon ou les Folies romanesques, 1712; Les Effets surprenants de la sympathie,1713-1714); puis il évolue vers le réalisme (La Voiture embourbée, 1714); il donne enfin, beaucoup plus tard, sesdeux oeuvres maîtresses : La Vie de Marianne (17311741), Le Paysan parvenu (1735-1736). La destinée d'une orpheline La Vie de Marianne. Marianne, à quinze ans, est seule à Paris.

Une religieuse la confie à M.

de Climal, qui la place chez une lingère, MmeDutour.

Elle tombe amoureuse d'un jeune homme fort élégant, Valville, qui l'aime aussi.

Un malentendu les sépare ;en outre, elle est importunée par son protecteur et doit chercher refuge au couvent.

Elle est recueillie par lacharitable Mme de Miran, mère de Valville, qui projette de la marier à son fils ; mais une parente la fait enlever pouréviter une mésalliance.

libérée, elle doit ensuite souffrir l'infidélité de Valville.

Pour la consoler, une religieuse luiconte sa propre histoire.

(Marivaux écrivit onze livres de ce roman ; Mme Riccoboni ajouta un douzième livre ; maiselle laissa l'oeuvre inachevée.) La carrière d'un intrigant Le Paysan parvenu. M.

Jacob, paysan champenois, est venu à Paris pour porter des barriques de vin dans la maison de son seigneur ; ildécide de faire sa fortune ; son charme et sa finesse le serviront.

D'abord domestique d'une coquette, il séduit unejeune chambrière ; puis il s'introduit dans la maison de deux bourgeoises riches et dévotes, plaît à toutes deux,épouse l'une d'elles pour ses écus.

Désormais nanti d'une position sociale, il manoeuvre dans les coulisses de lafinance et de la politique, acquiert une fortune considérable, devient contrôleur général des fermes en Champagne,fermier général et seigneur de son village ; il se consacre alors au bien public.

(Le roman est achevé en huit livres ;seuls les cinq premiers sont de Marivaux.) Par sa manière, Marivaux se rattache à la tradition précieuse.

Il mêle sans cesse au roman portraits et analyses; ilraffine sur les sentiments; il multiplie les péripéties et insère dans son récit des épisodes secondaires; comme lesromanciers précieux, il tient le lecteur en haleine, non seulement par l'intérêt de l'action, mais aussi par l'ingéniositéde son esprit.Cependant, il sait peindre les moeurs telles qu'il les a observées.

L'univers de Marivaux n'est pas chimérique commecelui des précieux.

Le romancier décrit la vie quotidienne à la ville : l'histoire de Marianne est celle d'une fille dupeuple exposée aux misères et aux dangers de la vie parisienne; l'histoire de M.

Jacob est celle d'un roturier quis'élève au sein d'une société en pleine transformation.En outre, il donne beaucoup de vérité à ses personnages.

M.

Jacob impose d'emblée sa personnalité : il surprend parun extraordinaire mélange de naïveté et de ruse, de bonhomie et de cynisme.

Marianne est une création plusintéressante encore : elle allie la profondeur à la frivolité, et la délicatesse de son âme plaît autant que les charmesde son visage.

L'amour est la grande affaire de sa vie, et elle discerne avec lucidité quelles modifications subit sonsentiment lorsque interviennent les scrupules de l'amour-propre, les exigences du devoir ou les tourments de lajalousie.

Comme dans son théâtre, Marivaux intéresse et émeut en découvrant dans leur vérité complexe les secretsdu coeur humain.. »