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Le peuple contre la démocratie

Publié le 01/10/2022

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« Biographie Yascha Mounk est politologue.

En plus d’animer le podcast The Good Fight, il est également reporter indépendant au profit des journaux New York Times, The Wall Street Journal ou encore Die Zeit.

En 1969, ses parents, juifs et polonais, ont dû émigrer en Allemagne à cause d’une purge.

Il naît à Munich en 1982.

À 13 ans, il adhère au Parti Social-Démocrate qu’il quitte en 2015.

Il effectue ses études aux États-Unis où il obtient un diplôme d’histoire à l’Université de Cambridge ainsi qu’un doctorat en sciences politiques à l’Université d’Harvard où il est aujourd’hui professeur de théorie politique.

En 2014, il écrit son premier essai, Stranger in My Own Country : A Jewish Family in Modern Germany, dans lequel il fait le récit de sa jeunesse difficile en Allemagne car rejeté à cause de ses origines.

En 2017, il est naturalisé américain. Contexte historique L’œuvre a été écrite dans un contexte où la démocratie libérale, modèle le plus propagé après la chute de l’URSS, et tout simplement la démocratie (surtout depuis que les États-Unis ont été frappés par les attentats du 11 septembre, preuve de leur impuissance), sont menacées par une forte montée du populisme dans le monde entier.

En effet, plusieurs personnalités populistes se sont emparées du pouvoir dans des États (portés par des élections libres et équitables et donc par la volonté du peuple) pourtant considérés comme « consolidés démocratiquement », du moins, dont on pensait qu’ils étaient dans la bonne voie.

Ainsi, entre autres, l’Italie avec Mario Salvini, la Hongrie avec Viktor Orban (2010), la Brésil avec Jair Bolsonaro (2018) ou encore la plus ancienne et la plus puissante démocratie du monde, les États-Unis avec Donald Trump sont devenus des démocraties antilibérales (2016).

Tous ces chefs d’État ont violé au moins un principe ou une règle démocratique.

Une autre menace pèse sur la démocratie libérale : le libéralisme antidémocratique à travers notamment l’Union européenne et qui s’est révélé flagrant durant la crise grecque en 2010.

Par ailleurs, depuis les années 2000, avec le début du Web 2.0, les réseaux sociaux sont devenus des outils de communication très utilisés dans le monde entier.

Ils ont joué un rôle majeur durant le Printemps Arabe (2011) dans la chute de régimes autocratiques.

Mais ils sont aussi responsables de la diffusion de théories du complot et de fake news qui empoisonnent la démocratie libérale.

À cela s’ajoute une situation économique qui se dégrade par exemple à cause de la crise financière de 2008.

En réalité, cela est dû au choc pétrolier de 1973 qui a mis fin au Trente Glorieuses, une période de croissance économique exceptionnelle.

De plus, l’Europe connaît un fort afflux d’immigrés (syriens par exemple) jusqu’à une crise migratoire en 2015. Synthèse des idées principales Introduction : Perdre nos illusions + Première Partie : La crise de la démocratie libérale Après la chute de l’URSS, la démocratie libérale – système politique qui protège les libertés individuelles pour tous les citoyens (y compris les minorités) et traduit la volonté populaire en politiques publiques – était la forme de gouvernement qui caractérisait beaucoup de pays occidentaux (où on la croyait éternelle car riches et éduqués) et qui se répandait partout dans le monde.

Malgré ses imperfections, la plupart des citoyens y était profondément attaché et rejetait toute alternative autoritaire.

Les forces politiques dominantes respectaient les règles et principes démocratiques (notamment des élections libres et équitables) au nom de l’intérêt général et de la préservation du système.

Ce modèle était donc le seul choix possible et un retour en arrière semblait inconcevable. Pourtant, aujourd’hui en Occident, l’attachement des citoyens à l’égard de la démocratie libérale, comme de leurs dirigeants, s’effondre de plus en plus surtout chez les jeunes, les rendant sensibles aux possibilités autoritaires. Les candidats qui violent ses normes les plus élémentaires gagnent beaucoup en pouvoir et en influence.

Ainsi, tout autour du monde, le populisme se propage et des démocraties tombent en dictature même au XXIe siècle.

La démocratie libérale n’est plus le seul choix possible : elle est en cours de déconsolidation, sa stabilité est menacée.

C’était naïf de croire l’inverse. La démocratie libérale se décompose en deux régimes : 1°) Libéralisme antidémocratique (ou liberté sans démocratie) : dirigée par une minorité d’élites technocrates, elle prétend protéger les libertés individuelles mais ignore la volonté populaire lors de la prise de décision car impossible et dangereux.

De fait, ce sont de plus en plus des institutions démocratiques (tribunaux, banques centrales, traités et organisations internationaux) et des experts non-élus qui prennent les décisions à la place des citoyens et de leurs représentants élus qui voient leur pouvoir confisqué.

Leur rôle d’expertise technique est indispensable pour résoudre des problèmes complexes hors de portée de gens ordinaires.

Mais ils accaparent un grand nombre de sujets qui est écarté du débat politique et public.

Le système est antidémocratique car il ne traduit pas la volonté populaire en politiques publiques.

Le peuple n’a pas son mot à dire et ne peut pas influencer la politique.

C’est pourquoi il réclame sa souveraineté et que le libéralisme antidémocratique ne lui plaît pas.

D’autant plus que les élites politiques se sont éloignées de ceux qu’elles représentent, d’où la grande déception des électeurs qui accusent les élus de suivre des intérêts privés plutôt que général et d’être corrompus par l’argent des lobbies. 2°) Démocratie antilibérale (ou démocratie sans liberté) : gouvernés par un démagogue populiste, elle prétend rendre le pouvoir au peuple, exprimer sa volonté.

Cela suppose d’abolir ou de « réformer » toutes les institutions indépendantes (les médias publiques ou dissidents, les tribunaux, les commissions électorales qui sont assujettis au pouvoir) ainsi que les droits des minorités qui l’entraveraient.

Étant donné que le dirigeant populiste a été généralement élu par le peuple et que ce dernier participe, le régime est démocratique au départ mais sans contrepouvoirs, le chef peut facilement ignorer le peuple et installer une dictature. Deuxième partie : les origines Si le populisme connaît un succès et que la démocratie libérale régresse, c’est à cause de trois facteurs : 1°) Les réseaux sociaux : avant, dans les démocraties libérales stables, les médias de masse étaient réservés aux élites politiques et financières étant donné leurs coûts importants.

Ils pouvaient limiter la diffusion d’images chocs, d’opinions extrêmes et de fausses informations dans la sphère publique.

De fait, la politique était plutôt consensuelle.

Mais depuis quelques décennies, bien que cela ait fait l’objet d’un grand optimisme au départ, l’émergence et la démocratisation des outils numériques ont affaibli ces garde-fous traditionnels au profit de gens « banals », de mouvements et d’hommes politiques auparavant marginaux.

En toute liberté, ces derniers utilisent les « technologies de libération » pour s’attaquer à la démocratie libérale et répandre le mensonge et la haine à une grande vitesse, à une grande échelle et au plus grand nombre.

C’est ce qui leur permet d’atteindre les électeurs et donc de se faire élire. 2°) La stagnation économique : avant, dans les démocraties libérales stables, la croissance économique et la redistribution des richesses ont offert à la plupart des citoyens une augmentation rapide de leur niveau de vie et une mobilité de revenus absolue.

Leur futur, et surtout celui des générations suivantes, semblait s’améliorer encore.

Mais depuis les dernières décennies, la croissance et l’égalité économiques se sont écroulées, responsables d’une stagnation du niveau de vie de la majorité de la population.

Une bonne partie souffre de la précarité ou de la pauvreté : les conditions de vie se détériorent.

Déçus par la démocratie libérale, ceux qui tombent dans cette situation peuvent être amener à voter pour des populistes.

Toutefois, ce ne sont pas forcément les pauvres qui votent pour des populistes.

Il peut s’agir de personnes relativement fortunées qui vivent dans un confort matériel mais dans des lieux dépourvus d’opportunités économiques pour elles et pour les générations futures, et qui assistent aux difficultés de leurs voisins.

Elles craignent que l’avenir leur reprenne tout. 3°) L’identité : avant, dans les démocraties libérales stables, la population était soit homogène, monoethnique, soit hiérarchisée « racialement » de manière stricte.

Mais depuis quelques temps, elles sont confrontées à une immigration de masse à l’origine d’un pluralisme ethnique et culturel.

Les citoyens de l’hémisphère nord (en particulier les ruraux et en Europe de l’Est) doivent apprendre à vivre dans une démocratie rapidement hétérogénéisée et plus égalitaire.

Or, beaucoup ne sont pas habitués à côtoyer des étrangers et, par conservatisme, s’attachent à une conception monoethnique de la population.

Leur quotidien est bouleversé tout comme leur identité.

Partant de leurs préjugés et de leurs craintes (peur plus ou moins exagérée d’être remplacés ou minoritaires), ils développent une xénophobie attisée par les discours anti-immigrés proférés par les populistes d’extrême-droite qui exploitent les peurs suscitées par les minorités ethniques et religieuses.

Et cela paie puisque les individus les plus racistes – et qui paradoxalement n’ont jamais rencontré d’immigrés – ont tendance à voter pour les populistes, d’où leur succès.

En effet, les électeurs accusent les démocraties libérales de favoriser les minorités ethniques, qu’ils regardent d’un mauvais œil, alors qu’eux-mêmes sont victimes d’une stagnation du niveau de vie et de ressources limitées pour leur survie, expliquant leur volonté de changement. Troisième partie : les remèdes Pour empêcher les populistes d’accéder au pouvoir, il faut impérativement se battre dès le début dans les urnes car une fois qu’ils y parviennent, ils tentent de consolider leur pouvoir avec le temps ce qui complique leur délogement.

Même dans les pays conquis par les populistes, les élections restent cruciales puisque qu’une nouvelle victoire les légitimerait et leur permettrait d’établir une dictature. Si un gouvernement populiste attaque la démocratie libérale, les citoyens doivent se battre dans les rues en force et en grand nombre afin de manifester leur colère avec courage et détermination, même si c’est risqué. La démocratie libérale doit se montrer de nouveau à la hauteur des attentes de ses citoyens, garantie de sa sauvegarde contre pop sur le long terme. Les partis de l’opposition doivent mieux s’organiser, s’unir pour barrer leur route et gagner les prochaines élections. Ils doivent prendre au sérieux les préoccupations des électeurs en formulant des promesses réalistes et en réalisant des améliorations réelles pour reconquérir leur confiance. Ces trois problèmes impliquent chacun des solutions différentes.

Pour contrecarrer les effets de : 1°) la montée de l’immigration : il faut domestiquer le nationalisme.

Contrairement aux exigences du nationalisme exclusiviste, la notion de nation doit être ouverte et inclure.... »

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