Databac

La liberté (cours)

Publié le 20/03/2024

Extrait du document

« LA LIBERTÉ Deux directions de recherche : définir la liberté et vivre libre ! Le concept apparaît comme à la fois proche et lointain : • Proche parce que la liberté a un goût familier.

Nous la rencontrons dans de nombreuses occurrences de la vie : quand le travail est fini, on se sent libre ; dans la discussion avec un ami (un vrai…), on se sent libre de tout dire sans fausse pudeur, sans gêne ; dans un débat en classe, parce que les conditions sont réunies, on livre sa position sans se censurer, sans être censuré.

On se sent alors libre.

Ici la liberté s’oppose à la contrainte qu’elle soit physique, psychologique ou intellectuelle.

Être libre, c’est ne pas être empêché, ne pas être contraint : pouvoir bouger comme bon nous semble, pouvoir penser comme on le veut.

La liberté peut se concevoir comme absence de contrainte étrangère.

Les Grecs opposaient d’ailleurs l’homme libre à l’esclave.

L’homme libre jouissait d’un statut privilégié dans la société, il avait des droits tandis que l’esclave était prisonnier, appartenait à un autre : il était considéré comme une « machine animée » privée de droits et forcée de produire pour le maître. • Lointain parce que dire que la liberté est absence de contrainte ou qu’elle est un sentiment intérieur n’est pas suffisant.

Il s’agit d’une définition trop vague.

A quoi renvoie précisément l’absence de contrainte alors que nous vivons au milieu des autres dans une société où la règle est omniprésente ? Cet état est-il atteignable ? Et ce sentiment intérieur est-il une garantie de liberté ? Se sentir libre, est-ce être effectivement libre ? D’où la question de savoir comment vivre pour être effectivement libre ? Y a-t-il une recette particulière ? S’en tenir à l’absence de contrainte et multiplier les expériences les plus insolites pour s’extraire du quotidien normatif ? Chercher refuge en soi, construire une citadelle intérieure qui garantisse la distance avec autrui sans laquelle la liberté se perd ? Les pistes semblent nombreuses mais ce qui apparaît c’est que la liberté est une affaire humaine.

L’homme est l’être qui pose la question de la liberté, de sa liberté dans la nature et dans la société. I Une affaire humaine Parler de liberté, c’est parler de l’homme.

Seul l’homme est jugé capable de liberté alors que les autres vivants sont réputés déterminés par la nature c’est-à-dire par ses lois.

L’opposition entre liberté humaine et déterminisme animal est classique.

L’homme est ainsi investi d’une faculté que les autres n’ont pas. Déterminisme : principe scientifique selon lequel un phénomène de la nature est conditionné par des causes nécessaires et immuables, et qu’il est donc possible de le prévoir pourvu qu’on en connaisse les lois. • Une faculté exceptionnelle Rousseau ne déroge pas à la tradition, il la confirme en opposant « la machine animale » et « la machine humaine ». « Je ne vois dans tout animal qu'une machine ingénieuse, à qui la nature a donné des sens pour se remonter elle-même, et pour se garantir, jusqu'à un certain point, de tout ce qui tend à la détruire, ou à la déranger.

J'aperçois précisément les mêmes choses dans la machine humaine, avec cette différence que la nature fait tout dans les opérations de la bête, au lieu que l'homme concourt aux siennes, en qualité d'agent libre.

L'un choisit ou rejette par instinct, et l'autre par un acte de liberté ; ce qui fait que la bête ne peut s'écarter de la règle qui lui est prescrite, même quand il lui serait avantageux de le faire, et que l'homme s'en écarte souvent à son préjudice.

C'est ainsi qu'un pigeon mourrait de faim près d'un bassin rempli des meilleures viandes et un chat sur des tas de fruits, ou de grains, quoique l'un et l'autre pût très bien se nourrir de l'aliment qu'il dédaigne, s'il s'était avisé d'en essayer.

C'est ainsi que les hommes dissolus (1) se livrent à des excès, qui leur causent la fièvre et la mort ; parce que l'esprit déprave (2) les sens, et que la volonté parle encore, quand la nature se tait.

» Jean-Jacques Rousseau, Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, première partie, 1755. 1) Dissolus : débauchés. 2) Déprave : pervertit. 1.

Expliquez : « Je ne vois dans tout animal qu'une machine ingénieuse ». Rousseau parle de l’animal comme d’une machine ingénieuse.

Il signifie par-là que le comportement animal est mécanique et instinctif.

L’animal ne décide pas de ce qu’il fait, c’est la nature qui s’en occupe.

C’est par nature qu’il se comporte et la nature pourvoit à sa survie. Tout comme la machine est produite pour accomplir des tâches dont elle ne peut s’affranchir, l’animal est doté d’un instinct efficace mais limité qui déroule un programme dont l ‘animal n’a pas conscience et qu’il ne peut modifier.

Certes, l’instinct est merveilleusement réglé et peut frapper l’observateur par sa perfection mais il n’en demeure pas moins qu’il est immuable et sans surprise.

La machine et l’animal sont prévisibles et ne s’appartiennent pas.

L’homme en revanche agit librement. 2.

Relevez et analysez les exemples évoquant les animaux. Rousseau parle du pigeon et du chat pour bien mettre en évidence les limites de l’instinct.

L’un comme l’autre est incapable de diversifier sa nourriture pour assurer sa survie.

L’instinct qui les règle leur interdit toute adaptation.

C’est une mécanique très performante mais bornée.

Le chat ne peut devenir frugivore et le pigeon ne peut devenir carnivore.

A contrario, l’homme est omnivore et peut affronter toutes les situations. 3.En analysant la dernière phrase, expliquez quelle est l’ambiguïté de la liberté humaine. L’homme contrairement à l’animal n’est pas borné ; il fait preuve d’une grande capacité d’adaptation.

Il s’ingénie même à construire son milieu en produisant de la culture.

Ainsi l’homme peut s’écarter de la nature : il a la capacité de choisir et ainsi d’agir librement. Dans un autre passage du Discours, Rousseau affirme que l’homme est perfectible. Toutefois la liberté et la perfectibilité ne constituent pas que des avantages.

L’homme en effet n’en use pas toujours pour tendre vers le bien et s’améliorer.

Cette capacité à refuser l’instinct et à agir par soi-même, c’est-à-dire librement, peut se retourner contre lui-même.

Si l’animal est contenu par la nature, l’homme est capable des pires excès qui le détruisent. Ainsi Rousseau a raison d’insister sur les dangers de la liberté et, ce faisant, il en montre l’ambiguïté. Nous venons de montrer qu’il n’y a pas de liberté sans homme.

Nous allons désormais mettre en évidence qu’il n’y a pas d’homme sans liberté ! • Une raison de vivre Le poème d’Eluard, Liberté, s’inscrit dans un contexte particulier : la France est occupée par l’Allemagne nazie.

Des millions de Français n’ont qu’une seule idée en tête : chasser l’occupant pour recouvrer la liberté.

Ce poème exprime et propage cette idée.

Il appelle à résister. Liberté Paul Eluard Sur mes cahiers d’écolier Sur mon pupitre et les arbres Sur le sable sur la neige J’écris ton nom Sur toutes les pages lues Sur toutes les pages blanches Pierre sang papier ou cendre J’écris ton nom Sur les images dorées Sur les armes des guerriers Sur la couronne des rois J’écris ton nom Sur la jungle et le désert Sur les nids sur les genêts Sur l’écho de mon enfance J’écris ton nom Sur les merveilles des nuits Sur le pain blanc des journées Sur les saisons fiancées J’écris ton nom Sur tous mes chiffons d’azur Sur l’étang soleil moisi Sur le lac lune vivante J’écris ton nom Sur les champs sur l’horizon Sur les ailes des oiseaux Et sur le moulin des ombres J’écris ton nom Sur chaque bouffée d’aurore Sur la mer sur les bateaux Sur la montagne démente J’écris ton nom Sur la mousse des nuages Sur les sueurs de l’orage Sur la pluie épaisse et fade J’écris ton nom Sur les formes scintillantes Sur les cloches des couleurs Sur la vérité physique J’écris ton nom Sur les sentiers éveillés Sur les routes déployées Sur les places qui débordent J’écris ton nom Sur la lampe qui s’allume Sur la lampe qui s’éteint Sur mes maisons réunies J’écris ton nom Sur le fruit coupé en deux Du miroir et de ma chambre Sur mon lit coquille vide J’écris ton nom Sur mon chien gourmand et tendre Sur ses oreilles dressées Sur sa patte maladroite J’écris ton nom Sur le tremplin de ma porte Sur les objets familiers Sur le flot du feu béni J’écris ton nom Sur toute chair accordée Sur le front de mes amis Sur chaque main qui se tend J’écris ton nom Sur la vitre des surprises Sur les lèvres attentives Bien au-dessus du silence J’écris ton nom Sur mes refuges détruits Sur mes phares écroulés Sur les murs de mon ennui J’écris ton nom Sur l’absence sans désir Sur la solitude nue Sur les marches de la mort J’écris ton nom Sur la santé revenue Sur le risque disparu Sur l’espoir.... »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles