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Jean HAMBURGER, Un jour, un homme, 1980. « Et l'homme dépend aussi des autres hommes. » Explication et discussion de cette phrase lapidaire de Jean HAMBURGER.

Publié le 30/06/2020

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« Dans la tragédie grecque, le chœur commentait l'action en vers lyriques, que déclamaient les choreutes tout en dansant. Quel commentaire entendrait-on aujourd'hui si l'on représentait, sur la scène d'un théâtre à l'antique, la récente épopée des sciences de la matière et des sciences de la vie? La conclusion la plus générale, l'idée commune, la règle universelle que découvre, année après année, l'effort scientifique de décryptage (1) du monde où nous vivons, c'est, me semble-t-il, que ce monde représente un ensemble indissociable. La roche solitaire comme l'animal ou la plante isolés n'ont de sens que par une abstraction analytique artificielle. Tout, matière inerte ou matière vivante, est fait des mêmes matériaux. Et chacun dépend rigoureusement des autres. Il n'y aurait pas de vie sans eau, sans air, sans soleil. Et, parmi les êtres vivants, il n'y aurait pas de lion sans troupeau d'antilopes, de gazelles et autres ruminants; pas de ruminants sans savanes et- prairies; pas d'herbes sans sol productif et sans humus; pas d'humus sans germes microbiens; pas de microbes sans l'azote, le carbone ou les minéraux du sol de la terre. Les mêmes végétaux dont se nourrissent les animaux herbivores ou frugivores ont, à leur tour, besoin d'autres espèces animales pour se reproduire : la pollinisation se fait par une sorte de mariage entre la fleur et un animal transporteur : insecte, oiseau ou chauve-souris. On raconte même que certaines de ces unions sont si nécessaires que la plante peut disparaître si elle est transplantée en un lieu où manque son partenaire du règne animal : la vanille du Mexique fut frappée de stérilité lorsqu'on l'introduisit à l'île de la Réunion, car la vanille, pour être fécondée, a besoin d'un insecte, le mélipone, et dans l'île cet insecte manquait. L'homme aussi ne vit que grâce à l'harmonie du royaume qui l'entoure, objets inertes et êtres vivants. Il faut même, pour que l'homme vive, que ce royaume regorge de vies visibles ou cachées. Pour ne parler que de la vie végétale, on aurait calculé que, sous nos climats européens par exemple, vingt-sept mille grains de pollen aériens se déposent en moyenne chaque année sur un centimètre carré de sol. Au sein même de notre appareil intestinal vit une flore microbienne innombrable et nécessaire : bousculant cette flore par certains antibiotiques, on est allé jusqu'à entraîner dans quelques cas des accidents mortels. En découvrant les lois du monde et les mécanismes de la vie, l'homme a découvert en vérité qu'il dépendait des autres, de la terre, du soleil, des fleurs, des fruits et des colibacilles. . Et l'homme dépend aussi des autres hommes. Je l'ai dit à propos du langage : ce qui fait un homme, c'est un mélange inextricable du bagage inné dont il hérite et de l'apport acquis dont le dotent les femmes et les hommes qui l'entourent depuis le jour de sa naissance. Les preuves de cette empreinte humaine, que j'ai rappelées à propos du développement du langage et de l'intelligence au cours des jeunes années, peuvent à l'évidence s'étendre à presque tous les autres domaines de l'activité de l'homme. De même que l'harmonie des êtres vivants est fondée sur un mélange singulier d'intérêts communs et contraires, de voisins propices et de voisins ennemis, d'êtres qu'on mangera et d'êtres à qui on servira de nourriture, de même l'homme est cerné d'hommes nécessaires et d'hommes nuisibles. Sa vie est en équilibre entre ces forces tiraillantes. Bénéfiques ou maléfiques à nos yeux d'hommes, ies liens sont là. L'homme isolé apparaît comme un être fictif sans réalité possible. II n'a de vie que collective et cette collectivité s'étend de la matière inanimée à la flore et à la faune du monde, hommes compris. Ayant dit ces évidences, le chœur de notre théâtre antique ne pourrait manquer de proclamer sur un ton de surprise que les hommes paraissent les oublier complètement dans leur vie quotidienne. Ils font semblant d'ignorer que leur vie n'a de sens que comme partie d'un ensemble, visible ou invisible, bien élucidé par l'enquête scientifique des derniers siècles. Un ensemble férocement interdépendant. . Et pourant les scientifiques ne sont pas les seuls pour qui cette interdépendance est sensible. De plus en plus, les hommes d'aujourd'hui découvrent en eux-mêmes les racines profondes de ce sentiment. Dans une civilisation qui a piagnifiquement glorifié l'individu, commençaient à s'atrophier la connivence avec le décor où les hommes évoluent, la complicité avec les autres habitants de ce décor, la magie de la pierre, de l'arbre et de l'oiseau, le sens du lien secret qui nous unit au reste du monde. Ce sens suscite à nouveau aujourd'hui, me semble-t-il, des élans passionnels, presque esthétiques, qui naissent peut-être en réaction contre la sécheresse des systèmes voués au seul culte de l'individu : le fait scientifique rejoint ici le sentiment intuitif. Jean HAMBURGER, Un jour, un homme, 1980. ...»

« Dans la tragédie grecque, le chœur commentait l'action en vers lyri­ ques, que déclamaient les choreutes tout en dansant.

Quel commentaire entendrait-on aujourd'hui si l'on représentait, sur la scène d'un théâtre à l'antique, la récente épopée des sciences de la matière et des sciences de la vie? La conclusion la plus générale, l'idée commune, la règle universelle que découvre, année après année, l'effort scientifique de décryptage (1) du monde où nous vivons, c'est, me semble-t-il, que ce monde représente un ensemble indissociable.

La roche solitaire comme l'animal ou la plante isolés n'ont de sens que par une abstraction analytique artificielle.

Tout, matière inerte ou matière vivante, est fait des mêmes matériaux.

Et cha­ cun dépend rigoureusement des autres.

Il n'y aurait pas de vie sans eau, sans air, sans soleil.

Et, parmi les êtres vivants, il n'y aurait pas de lion sans troupeau d'antilopes, de gazelles et autres ruminants; pas de rumi­ nants sans savanes et· prairies; pas d'herbes sans sol productif et sans humus; pas d'humus sans germes microbiens; pas de microbes sans l'azote, le carbone ou les minéraux du sol de la terre.

Les mêmes végé­ taux dont se nourrissent les animaux herbivores ou frugivores ont, à leur tour, besoin d'autres espèces animales pour se reproduire : la pollini­ sation se fait par une sorte de mariage entre la fleur et un animal trans­ porteur : insecte, oiseau ou chauve-souris.

On raconte même que certai­ nes de ces unions sont si nécessaires que la plante peut disparaître si elle est transplantée en un lieu où manque son partenaire du règne animal : la vanille du Mexique fut frappée de stérilité lorsqu'on l'introduisit à l'île de la Réunion, car la vanille, pour être fécondée, a besoin d'un insecte, le mélipone, et dans l'île cet insecte manquait.

L'homme aussi ne vit que grâce à l'harmonie du royaume qui l'entoure, objets inertes et êtres vivants.

Il faut même, pour que l'homme vive, que ce royaume regorge de vies visibles ou cachées.

Pour ne parler que de la. »

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