Jean Corvisart
Publié le 16/05/2020
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Jean Corvisart
Jean-Nicolas Corvisart des Marets naquit le 15 février 1755 à Dricourt.
Son père, procureur au parlement de Paris, voulait le retenirdans la basoche ; le jeune homme objectait sa vocation médicale.
Brouillé temporairement avec sa famille, il trouva un humble emploià l'Hôtel-Dieu, et se mit enfin sur les bancs de la Faculté de Paris.
Il obtint le premier lieu à la licence (2 septembre 1782) et, le 7 dumême mois, reçut le bonnet doctoral.
En 1783, il devint médecin des pauvres de la paroisse Saint-Sulpice.
Mme Necker, qui avaitfondé en 1778 un hospice de charité à la barrière de Sèvres, lui en proposa le service ; mais elle entendait que son obligé usât de lapoudre et portât perruque ! Rebelle aux exigences mondaines, le postulant se déroba.
Il connut la gêne des débutants, emprunta,donna à la Charité quelques cours sous le patronage du chirurgien Desault, mais s'attacha préférablement à Desbois de Rochefort quiavait inauguré dans cet hôpital un enseignement clinique très suivi.
Desbois mourut le 26 janvier 1786.
Son disciple et substitut luisuccéda non seulement dans ces fonctions nosocomiales (1788), mais encore à la Faculté, comme professeur des écoles, charge àlaquelle il fut nommé par acclamation le 4 février 1786.
Lorsque la nouvelle École de santé remplaça la vieille Faculté, il fut pourvu dela première chaire de clinique interne créée par l'arrêté du 14 frimaire an III dans la ci-devant maison de la Charité, devenue Hospicede l'Unité.
Il en prit possession le II ventôse an III, embrigada, organisa ses étudiants sur le modèle de la clinique de Stoll.
Il leurdispensa un enseignement inspiré des doctrines du Viennois, de Boerhaave, et aussi d'Auenbrügger, précurseur oublié, et par luiréhabilité, de la percussion.
Ce nouveau mode d'exploration renforçait de précisions objectives les données de l'observationhippocratique en laquelle Corvisart excellait, et sa rare intuition de clinicien prenait parfois quelque apparence de divination.
Rénovantla cardiologie attardée de Sénac, il publia en 1806, par les soins de son élève Horeau, un Essai sur les maladies du cOeur et des grosvaisseaux.
Il professait encore au Collège de France où, d'abord suppléant de Raulin (an III), il devint titulaire de la chaire demédecine pratique (1796-1804), dont il garda ensuite l'honorariat par décret du 24 pluviôse an XIII.
Enfin, il patronnait le vieux Journalde médecine, chirurgie, pharmacie, ressuscité en Vendémiaire an IX par Boyer et Leroux.
Président de la Société de l'École demédecine (11 novembre 1804), il fut élu le 20 mai 1811 membre de la première classe de l'Institut national (section de médecine et dechirurgie).
Avec les honneurs, la fortune était venue.
Présenté par Barras à Joséphine de Beauharnais, par Joséphine à Bonaparte, il conquitl'estime du général et fut nommé médecin du gouvernement (arr.
du 23 messidor an IX).
L'Empereur se souvint des amitiés duPremier Consul.
Corvisart devint premier médecin de LL.
MM.
l'Empereur (messidor an XII) et l'Impératrice ; Joséphine d'abord, Marie-Louise ensuite.
Chargé d'organiser le service de santé de la Maison impériale, il apporta dans ses choix la conscience, dans sesfonctions l'autorité.
Les malveillants disaient que ses subordonnés n'étaient que les bas-reliefs de la statue de Corvisart.
Antoine Dubois briguait la place de premier chirurgien : l'archiatre fit nommer Boyer.
"Pourquoi ? lui demanda l'évincé.
Parce que jevoulais être le maître", répliqua l'autre.
Cependant, à la mort de Baudelocque, Dubois fut nommé accoucheur de l'impératrice et, deson forceps, amena au jour le roi de Rome.
Pendant l'opération, Corvisart maintint la parturiente ; c'est lui qui ranima le nouveau-né.
Il soignait la cour et la ville ; Louis Bonaparte fit de lui son premier médecin honoraire, premier médecin consultant, commandeur del'Ordre royal de Hollande.
Corvisart avait encore la confiance de Joséphine, de la reine Hortense et de Pauline Bonaparte.
Mêlé auxincidents du divorce impérial, il sut garder l'amitié de l'épouse répudiée, imposer ses verdicts aux jérémiades de Marie-Louise et auxcaprices des dames de la nouvelle noblesse : les duchesses d'Abrantès et de Montebello.
A son tour, il porta blason : le citoyen Corvisart devint baron de l'Empire (1808), officier de la Légion d'honneur (1803), commandeurde l'Ordre de la Réunion (1811).
Dans des conjonctures souvent délicates, il conserva l'estime du Maître, qui appréciait sondésintéressement.
Avec le despote qui, aux heures d'expansion familière, le traitait d'assassin et de grand charlatan, il gardait sonfranc-parler, et tant, que son interlocuteur le trouvait parfois "un peu brusque".
"Sire, arrêtez-vous, lui disait-il, la Fortune peut selasser, vous n'auriez plus qu'à descendre !" Et la chute arriva.
A son départ pour la Russie, Napoléon avait demandé à Corvisart un poison.
Il y recourut à Fontainebleau (nuit du 12 au 13 avril1814), après son abdication ; mais le toxique était éventé.
Pendant ce temps, Corvisart escortait l'impératrice-régente dans sa fuite à Blois, à Rambouillet, à Bâle, à Vienne où il la quitta le 30mai.
Il la vint retrouver à Aix-les-Bains dont il lui avait prescrit les eaux, puis s'éclipsa.
Aux Cent Jours il reconquit le titre de premiermédecin de LL.
MM.
impériales.
Après Waterloo, il accourut à la Malmaison (27-28 juin 1815) pour revoir l'Empereur et confia àMarchand un autre toxique que le valet de chambre eut ordre de dissimuler dans les vêtements du souverain proscrit.
Corvisart cachait, sous des saillies narquoises et des propos caustiques, un fond de mélancolie désabusée, qui s'accentua avec letemps.
Sa santé fut ébranlée par les désastres français, et sa fortune sombra dans une faillite.
Abandonnant son hôtel de la rue Saint-Dominique pour une maison de la rue Vendôme, il renonça à la clientèle et passa ses dernières années dans une retraite morose, seconsolant dans la lecture de Virgile, de Molière et de Voltaire dont il avait acheté la canne.
La Restauration lui laissa son fauteuil dans la section de médecine de l'Institut, désormais incorporée à l'Académie-royale des sciences(ordonnance du 21 mars 1816) et lui conféra le titre de membre honoraire de l'Académie royale de médecine, créée en 1820.
Ilmourut à Paris le 18 septembre 1821.
Son exécuteur testamentaire lui assura les dernières prières de l'Église que, touché par le ventdu siècle, il n'avait point sollicitées.
Après les obsèques et les discours, son corps fut transporté au Père-Lachaise, puis dans sondomaine d'Athis.
Son cOeur, prélevé à l'autopsie, resta oublié chez un pharmacien chargé de l'embaumer..
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