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hébraïque.

Publié le 08/12/2021

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hébraïque. Ce récit-là, toutefois, ne nous préoccupera pas dans la mesure où, comme je l'ai dit,
lorsque j'ai brièvement étudié la Torah avant de revenir aux Grecs, je suis allé jusqu'à parashat
Vayeira, et c'est donc là que nous nous arrêterons.
Je reviendrai aux deux histoires plus tard, mais pour l'instant il semble important d'essayer
d'interpréter un des passages les plus connus de Vayeira, ne serait-ce qu'en raison du fait que
les deux commentaires que j'ai étudiés pour éclairer ces textes, l'ancien et le moderne, celui de
Rachi et celui de Friedman, me donnent l'impression d'avoir échoué à élucider le sens de cet
étrange et célèbre incident (ce qui est, cependant, assez mineur pour ne pas nous importuner
quand nous envisageons les implications morales plus vastes des deux histoires auxquelles j'ai
fait allusion). Je fais ici référence à l'histoire bien connue de la femme de Lot - de la façon dont,
alors même qu'elle, son mari et leurs deux filles sont sauvés de la ville condamnée grâce à
l'intervention d'un ange de Dieu, et sont physiquement emportés loin de leur maison par des
créatures célestes, la femme de Lot transgresse l'interdiction formelle transmise par l'ange de
ne pas se retourner pour regarder la ville pendant leur fuite, et à cause de cette transgression
est transformée en statue de sel.
De manière choquante, du moins pour moi, Friedman n'a absolument rien à dire au sujet de cet
épisode fascinant - peut-être parce qu'il épargne ses munitions d'exégèse pour le moment où
c'est vraiment nécessaire, c'est-à-dire pour l'histoire bien plus troublante de la volonté
d'Abraham de tuer son propre fils. L'explication de Rachi ne me semble pas non plus, pour une
fois, très convaincante. L'érudit français du Moyen Age commence par expliquer l'ordre de
l'ange de « ne pas regarder en arrière » comme une sorte de punition : il glose sur le texte « Ne
regarde pas derrière toi » en suggérant que, dans la mesure où Lot et sa famille ont péché
exactement comme l'ont fait les habitants des cités jumelles et où ils ne sont sauvés qu'en
raison de leur relation à Abraham, ce bon prophète, ils n'ont aucun droit d'être les témoins du
châtiment des condamnés depuis le point de vue confortable procuré par leur fuite. « Vous ne
méritez pas de voir leur châtiment alors que vous êtes sauvés », voilà comment l'érudit français
le formule. Quant au sort de la femme de Lot, Rachi explique l'étrange détail de sa
métamorphose d'être humain en minéral en disant qu'elle a « péché avec le sel » et qu'elle est
par conséquent «frappée par le sel ». Ce « péché avec le sel» est une référence à une tradition
midrashique qui dit que la femme de Lot a rejeté la coutume voulant qu'on donne du sel aux
invités (la même tradition soutient que, plus tard, sous prétexte d'emprunter du sel à ses
voisins, la femme de Lot a dénoncé aux autorités sodomites les actions de son mari né à
l'étranger -- ce qui fait penser que, à la différence de son mari, elle était probablement native
de Sodome).
Aussi ingénieuse soit-elle, cette explication me paraît manquer complètement la signification
émotionnelle du texte - sa magnifique, et magnifiquement économique, évocation des
sentiments compliqués que la plupart des gens ordinaires, du moins, éprouvent très
régulièrement : les regrets déchirants pour les passés que nous devons abandonner, la
nostalgie tragique de ce que nous devons laisser derrière nous. Sans doute parce que j'ai fait
des études classiques, j'ai été frappé, à la lecture de l'explication donnée de ce passage, par le
peu d'attention accordée, le peu d'appréciation donnée par le texte judaïque et ses
commentateurs juifs à ce qui me semble être la question évidente posée dans l'histoire de
Sodome et de Gomorrhe, la question de la valeur de la beauté et du plaisir. Abraham, nous ne
devons pas l'oublier, est né dans une ville, mais il a passé l'essentiel de sa vie en nomade,
comme le montre clairement parashat Lech Lecha ; peut-être qu'il a oublié désormais les
plaisirs de l'urbanité. Mais la femme de Lot est profondément attachée à sa ville - Rachi la
qualifie en fait de « métropole » --, et nous pouvons imaginer que c'est parce que, comme

toutes les grandes métropoles, celle que nous rencontrons dans parashat Vayeira offre sans
conteste son lot de beauté, de plaisirs rares et compliqués, parmi lesquels, en effet, les vices
mêmes pour lesquels la ville a été châtiée. Toutefois, c'est peut-être le païen, l'helléniste qui
parle en moi. (Le rabbin Friedman, au contraire, ne peut se résoudre à envisager seulement ce
que les gens de Sodome ont l'intention de faire aux deux anges mâles, lorsqu'ils se rassemblent
devant la maison de Lot au début du récit, à savoir les violer, interprétation que Rachi accepte
placidement en soulignant assez allègrement que si les Sodomites n'avaient pas eu l'intention
d'obtenir un plaisir sexuel des anges, Lot n'aurait pas suggéré, comme il le fait de manière
sidérante, aux Sodomites de prendre ses deux filles à titre de substitution. Mais, bon, Rachi
était français.)
C'est cet échec arbitraire à comprendre Sodome dans son contexte, en tant que métropole
ancienne du Proche-Orient, en tant que lieu de plaisirs sophistiqués et même décadents, de
beautés hyper-civilisées, qui aboutit à cette incapacité du commentateur à saisir la véritable
signification des deux éléments cruciaux de cette histoire : le commandement de l'ange à la
famille de Lot de ne pas se retourner vers la ville qu'ils fuient et la transformation de la femme
de Lot en statue de sel. Car si vous voyez en Sodome quelque chose de beau - qui le paraîtra
encore plus, sans aucun doute, du fait qu'il faut l'abandonner et la perdre à jamais, précisément
de la même manière que des parents morts sont toujours plus beaux et meilleurs que ceux qui
sont encore en vie -, alors il me paraît clair que Lot et sa famille reçoivent l'ordre de ne pas
regarder en arrière non comme une punition mais pour une raison pratique : parce que le
regret pour ce que nous avons perdu, pour les passés que nous devons abandonner,
empoisonne parfois toute tentative pour commencer une vie nouvelle, ce qui est ce qui attend
Lot et sa famille, tout comme l'avaient fait Noé et sa famille, et comme doivent le faire d'une
manière ou d'une autre tous ceux qui ont survécu à d'horribles annihilations. Cette explication,
à son tour, permet d'expliquer la forme prise par le châtiment de la femme de Lot - si c'est bien
un châtiment, ce que je ne crois pas personnellement, dans la mesure où, selon moi, cela
ressemble beaucoup plus à un processus naturel, à l'expression inévitable de sa personnalité.
Pour ceux qui sont contraints par leur nature de regarder toujours en direction de ce qui est
passé, plutôt que vers l'avenir, le grand danger, ce sont les larmes, les sanglots impossibles à
contenir dont les Grecs, sinon l'auteur de la Genèse, savaient qu'ils n'étaient pas seulement une
douleur mais aussi un plaisir narcotique : une contemplation endeuillée si cristalline, si pure,
qu'elle peut finalement vous immobiliser.
 

Oh, Daniel, ne te retourne pas ! m'a dit ma mère un soir, quelques mois après les funérailles de
Mme Begley.
Je l'avais appelée pour sonder un peu sa mémoire. A ce moment-là, je réfléchissais beaucoup
au voyage de mon grand-père en Israël en 1956 et je lui avais donc demandé, quelques jours
auparavant, si cela ne la dérangeait pas de fouiller dans les archives familiales pour retrouver
des photos qui, pensais-je, me seraient utiles - non pas, bien entendu, pour réveiller un
souvenir, puisque le voyage avait eu lieu bien avant ma naissance, mais pour fournir une
contrepartie visuelle aux histoires que j'avais entendues tant de fois. A cause du coté
méticuleux de son sang germanique, elle m'avait demandé de la rappeler quelques jours plus
tard ; à ce moment-là, avait-elle dit, elle aurait eu l'occasion de déballer soigneusement les
albums de ce que j'avais considéré, depuis l'âge de huit ans, comme leurs bandelettes de
momies. A présent, alors que j'étais au téléphone avec elle, un jour d'été, il y a un mois, elle
m'annonçait qu'elle avait tout déballé et, toujours au téléphone, elle m'avait décrit les
différentes photos, séparant celles que je voulais de celles qui ne me paraissaient pas

intéressantes.
Il y avait Nana, disait-elle, assise dans un fauteuil sur le pont du paquebot, elle avait l'air en
bonne santé, cette année-là ; il y avait sa mère au cours de la petite fête organisée au moment
du départ dans leur cabine, souriante et de bonne humeur, un bras sur les épaules de sa bellesoeur, Tante Sylvia, qui avait l'air déçue, comme d'habitude, et l'autre sur celles de Minnie
Spieler qui, conformément à sa réputation bohème, portait un costume d'homme et une
cravate. Il y avait d'autres photos, mélangées à l'album voyage en Israël SS united states,
des photos qui, observait ma mère avec un agacement un peu trouble dans la voix, n'avaient
rien à faire dans cet album. L'unique frère de sa mère, Jack, le beau célibataire blond que son
père n'aimait pas (parce qu'il était, me suis-je dit pendant qu'elle parlait, la compétition), il y
avait la soeur aînée de sa mère, l'instable qui, vers la fin de sa vie, ne se lavait plus parce qu'elle
était convaincue que les Russes avaient mis des électrodes dans ses cheveux, une histoire qui
nous faisait hurler de rire quand nous étions petits ; la même soeur aînée avait, en fait, essayé
d'empêcher mon grand-père d'épouser ma grand-mère. C'était une histoire que je connaissais
par coeur depuis l'âge de dix ans, un classique dans le répertoire de mon grand-père après le
dîner : comment Pauline avait rompu les fiançailles trois fois parce que, insistait-elle, sa petite
soeur, une bonne Américaine née à New York, ne devrait pas se marier à quelqu'un d'inférieur à
sa condition, à un immigrant, à un novice. Mais l'amour avait triomphé de tout ! plaisantait
mon grand-père. Et des années plus tard, quand il avait réussi, racheté l'usine des Mittelmark et
vraiment prospéré, Pauline s'était approchée de lui un soir, à l'occasion d'un seder ou d'une
fête quelconque, une de ces réceptions au cours desquelles ma grand-mère faisait ses célèbres
soupes et les desserts qu'elle ne pouvait pas manger, et avait dit, Tu sais quoi, Abe ? Tu as
toujours été mon beau-frère préféré ! A quoi mon grand-père répondit du tac au tac, Ah,
Pauline... alors maintenant je suis Yenkee Doohddle Dehndee, hein ?
Et de plus, c'était vrai. Personne ne faisait son serment d'allégeance d'une voix plus forte que
lui, n'exhibait un plus grand drapeau pour Mémorial Day, ne distribuait plus de cônes de crème
glacée, le jour du 4 juillet. Il était venu de loin pour tout ça.
Ma mère répétait donc ces histoires tout en feuilletant ses dossiers qu'elle aime, c'est possible,
étiqueter et classer si soigneusement parce que, cent ans avant que nous ayons cette
conversation, une marieuse de Bolechow avait choisi pour le jeune veuf Elkune Jäger une fille
de Dolina, du nom de Taube Ryfka Mittelmark, Mittelmark, une famille dont le sang allemand
s'exprimait, se plaisaient-ils à dire, dans un goût pour l'ordre, de la même façon que certains
gènes se manifesteront dans un nez droit et des yeux bleus, ou dans la tendance à contracter le
cancer de l'intestin. C'était pendant que ma mère feuilletait ses photos soigneusement classées
que je lui ai annoncé que j'avais décidé de retourner en Ukraine, à Bolekhiv (Bolekhiv, comme
je dois l'appeler dorénavant, puisque je sais désormais que je n'y retournerai jamais, jamais n'y
reviendrai, et pour cette raison - et le fait est que, y étant retourné cette dernière fois, je sais
enfin qu'il n'y a maintenant vraiment plus rien à voir, qu'il ne reste plus rien de Bolechow - je
suis enfin prêt à lui laisser prendre sa place dans le présent). Je lui ai dit que même si je ne me
réjouissais pas à l'idée de faire un nouveau voyage - un voyage, de surcroît, vers un endroit où
j'étais déjà allé, où j'avais déjà parlé aux gens et vu ce qu'il y avait à voir -, je pensais à présent
qu'y retourner serait une façon de mettre un terme à une quête qui avait commencé il y avait si
longtemps. Je lui ai dit que je voulais retourner en partie parce que je pensais que, plus que
tout autre chose, un retour à Bolekhiv me donnerait une impression d'achèvement ; je pensais
qu'il serait intéressant, en dépit de tout ce que nous n'apprendrions jamais, d'opposer ce
second et dernier voyage au premier que nous avions fait : marcher de nouveau dans les rues
tordues de la ville, armé cette fois de bien plus d'informations que celles dont nous disposions

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