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GRAND ORAL HGGSP: la construction d'une mémoire commune argentine passe-t-elle par le traitement juridique des actions de la dictature?

Publié le 12/06/2025

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« GRAND ORAL HGGSP : INTRODUCTION : Le 24 mars dernier, le président argentin Javier Milei a fait scandale en annonçant la déclassification de certaines archives concernant la période de la dictature de 1976, qui impacta fortement la société de ce pays du Cône Sud. Le retour à l’actualité de cette période qui s’est pourtant déroulée il y a pourtant bientôt 50 ans nous amène à nous demander si la construction d’une mémoire commune argentine passe par un traitement juridique des actions de la dictature. Dans un premier temps, nous étudierons la dictature de 1976 à 1983, qui a fracturé la société entre répression militaire violente et résistance au régime. Ensuite, nous verrons que des choix furent faits pour préserver l’intégrité nationale, notamment dans les traitements juridiques des actions de la dictature. Enfin, nous étudierons la construction de la mémoire qui reste conflictuelle et au cœur de débats. Pour commencer, à partir de 1976 jusqu’en 1983, se mit en place un régime autoritaire qui brisa la société. I) Un régime autoritaire ayant fracturé la société : le processus de Réorganisation nationale (1976-1983) 1) Une dictature répressive et violente En effet, le 24 mars 1976, le général Jorge Rafael Videla instaura le processus de Réorganisation Nationale, aujourd’hui appelé « Guerre Sale ». Celle-ci impactait tous les pans de la société pour une réformation globale de celle-ci selon la morale chrétienne. Dans un contexte de Guerre Froide, le général Galtieri parlait en 1974 de la « subversion » et utilisait le terme de « cancer » devant être éradiqué pour justifier l’élimination des opposants au régime et préserver l’intégrité de la société argentine occidentale. Pour imposer ses réformes, le gouvernement instaura un régime de terreur. Les militaires du régime institutionnalisèrent ainsi la répression usant systématiquement de la disparition de personne. Les victimes de celles-ci furent appelées les DESAPARECIDOS. Elles étaient secrètement arrêtées et tuées pour motifs politiques et religieux. Cette méthode répressive se fondait essentiellement sur l'absence de connaissance des faits par les populations. L’armée utilisait donc des méthodes discrètes pour éliminer les preuves de ses crimes, tels que les escadrons de la mort, los vuelos de la muerte. Ces avions étaient chargés de dissidents qui étaient ensuite précipités vivants et drogués dans l’Atlantique sud. Jusqu’à 3 000 opposants ont ainsi été assassinés. Cette répression fit entre 10 et 30 000 disparus ouvriers et étudiants. Les hommes furent les plus touchés bien que 30% des disparus furent des femmes. De plus, les forces armées nationales pratiquèrent également des vols d'enfants, aujourd’hui appelés l’affaire des enfants volés. Il existait deux types de vol d'enfants : les enfants en bas âge qui étaient arrêtés en même temps que leur parent et ceux qui naissaient en captivité. Dans les deux cas, les enfants étaient le plus souvent donnés à des familles de militaires. Il existait à l’Ecole Mécanique de la Marine une salle spéciale pour les femmes enceintes. Celles-ci gardaient l'enfant avec elles durant environ cinq jours, puis on leur demandait de « donner » leur enfant à leur famille. Or, l'enfant n'était pas rendu à la famille comme il le devait, et la mère était « transférée », c'est-à-dire tuée. L'objectif d'une telle pratique s'inscrivait bien sûr dans le processus de rééducation de la société, afin de former une nouvelle jeunesse élevée par les militaires. Ces agissements firent quelque 500 bébés volés, regrettés par tout autant de familles, qui protestèrent leur mécontentement aux côtés de groupes de résistance armés. 2) La résistance au régime Les années 1970 furent une période durant laquelle les organisations « révolutionnaires » se tournèrent définitivement vers la lutte armée. Nous pourrions citer de nombreuses organisations de révolte telles que les Montoneros, ERP (Ejercito Revolucionario del Pueblo), Union des Etudiants du Secondaire… Celles-ci s’étant constituées avant le Processus de Réorganisation Nationale, elles envoyèrent leurs leaders respectifs en exil pour assurer leurs protections. Les résistants qui restaient furent éliminés par le régime, au moyen des méthodes citées juste avant. La Nuit des Crayons, le 16 septembre 1976, fut donc un exemple de répression militaire des opposants de l’UES, par l’assassinat d’une dizaine d’étudiants mineurs. Une résistance pacifique était ainsi privilégiée, notamment par l’Association des Mères de la Place de Mai. Leur nom est issu de la Plaza de Mayo, où elles manifestaient dans le but d’obtenir une entrevue avec Jorge Rafael Videla. Celles-ci protestaient contre la disparition de leurs enfants en portant des foulards blancs dans leurs cheveux. Elles se rassemblaient également tous les jeudis après-midi et tournaient sur la place pendant une demi-heure, dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, remontant ainsi symboliquement le temps et critiquant l’impunité des militaires responsables des massacres et des tortures. Cette organisation devint célèbre en 1978, lors de la Coupe du Monde, grâce à la télévision hollandaise, ce qui lui permit de voyager à travers le monde notamment aux côtés d’Amnesty International. A partir de 1981, elles commencèrent les Marches de la Résistance afin de défendre et réclamer le respect des droits de l’Homme. Ainsi, suite à ces évènements et mouvements de résistance, la société dut agir lors de la transition démocratique, et concilier jugements des auteurs et pérennité de la société argentine. II) Jugement ou amnistie pour reconstruire l’identité nationale commune ? 1) Jugement Dans le but d’établir des listes de profils des disparus et, par conséquent des bourreaux, le président Raul Alfonsin crée la CONADEP ( Commission Nationale sur la Disparition de Personnes) le 15 décembre 1983, seulement 5 jours après son arrivée au pouvoir. Cette commission consultative dirigée par Ernesto Sabato eut pour but d’enquêter sur les cas de disparus à partir de plaintes et de témoignages déposés par les survivants. La CONADEP est, par cela une forme de Commission Vérité et Réconciliation, qui vise à comprendre les évènements afin de mieux les juger dans l’intérêt de tous. Elle permit ainsi de vérifier l’existence de centaines de lieux de détentions clandestins après une enquête de 280 jours. Au moment de la remise du rapport appelé Nunca Mas (Jamais Plus), la commission avait ainsi démontré 8 961 disparus et 380 centres clandestins, au vu des documents dont elle disposait. Le 22 avril 1985, s’ouvre le Procès de la Junte prévu et anticipé en même temps que la CONADEP. Au terme de celui-ci, le 9 décembre 1985, Jorge Videla et d’autres de ses collaborateurs sont condamnés à la prison à perpétuité ou à des peines de prison plus courtes. Ce procès démontre ainsi une première volonté de punir les responsables des crimes contre l’Humanité perpétués sous la dictature. Cependant, ces procès condamnèrent également des membres des forces résistances, conformément à la théorie des deux démons, qui tentait d’assimiler les actions terroristes des groupes révolutionnaires à celles de l’Etat argentin. Cette volonté de juger est également partagée à l’international, notamment comme conséquence des actions des Mères de la Place de Mai. Ainsi, en Italie, en France ou encore en Espagne s’ouvrirent des procès, car des citoyens de ces Etats furent aussi victimes des Forces Armées argentines durant la dictature. 2) Amnistie En dépit des premiers désirs de jugement généralisés dans le monde entier, l’amnistie reprend le dessus. Ainsi, le 24 décembre 1986 est votée la loi du Point Final, par le gouvernement de Raul Alfonsin, le premier président à la suite de la dictature. Celle-ci interdit.... »

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