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Cours sur la liberté

Publié le 22/05/2025

Extrait du document

« LA LIBERTE A propos de notre nouvelle notion, la LIBERTE, je vous rappelle que nous avons déjà avancé beaucoup sur cette notion pendant l’année, et ceci depuis nos premiers cours à propos de la VERITE, considérée par Aristote comme cherchée par liberté.

Révisez aussi notamment le cours sur la CONSCIENCE morale où la liberté joue aussi un rôle central : nous pouvons obéir ou ne pas obéir à la voix de la conscience selon Rousseau.

Enfin, lisez les quatre textes sur la liberté que je vous envoie avec ce cours, nous allons les commenter dans notre cours et nous allons expliquer en profondeur celui de Spinoza.

Tout ce que nous discuterons ici tient compte de ce travail que vous devez effectuer à la maison, indispensable pour comprendre ce qui suit. A présent je vous propose donc comme sujet de réflexion : La liberté consiste-t-elle à faire ce que l’on veut ? Faire ce que l’on veut, voilà la première idée qui nous vient à l’esprit lorsqu’il s’agit de dire en quoi consiste la liberté.

On pourrait appeler cela une définition naïve de la liberté.

Pourquoi naïve ? C’est ce que nous nous proposons d’expliquer ici.

Comme d’habitude, l’opinion est à dépasser par une réflexion qui aspire à une connaissance plus précise, moins trompeuse, plus proche peut-être d’une vérité, cet idéal que nous cherchons toujours sans jamais être assurés de l’atteindre entièrement.

La liberté n’est pas ce qu’elle semble être à première vue. En effet, le problème vient de ceci que nous possédons sans doute une forte impression de liberté, justement quand nous croyons faire ce que nous voulons. Cependant, il ne s’agit peut-être que d’une impression.

Et nos impressions ne correspondent pas toujours à la vérité, mais au contraire elles sont souvent des illusions. Par exemple, quand nous nous rebellons contre des ordres, des règles, des lois qu’une autorité, parent, professeur, représentant du pouvoir politique, ou même contre la volonté que n’importe qui voudrait nous imposer par la persuasion ou par la force, en disant : « non, je ferai ce que je veux », nous avons là un fort sentiment de liberté, certes.

C’est comme si en nous libérant de ces ordres, règles, lois ou volontés provenant de l’extérieur, notre liberté consistait alors à ne faire que ce qui provient exclusivement de nous, de notre propre volonté, sans écouter aucune volonté étrangère qui prétendrait surpasser la nôtre. Mais en rester à cette impression, ce serait naïf.

A cette impression de liberté, qui est sans doute vraie mais seulement en tant qu’impression, s’oppose peutêtre une réalité de la liberté qui va faire apparaître l’idée de faire ce que l’on veut comme moins simple et voisine plutôt d’une illusion que d’une vérité sur la liberté. Précisons alors le problème : d’une part, la liberté nous apparaît sans doute comme une impression très forte lorsque l’on croit faire ce que l’on veut. Cependant, cette impression peut se révéler une illusion.

Cette définition naïve 2 doit alors être soumise à examen.

Et cela pour trois raisons, trois soupçons que nous devons explorer. Tout d’abord, en morale, faire ce que l’on veut peut conduire, paradoxalement, au contraire de la liberté, à devenir esclaves de nous-même, de nos désirs (voir cours sur le DESIR). Deuxièmement, en politique, si chacun fait ce qu’il veut en société, nous trouvons un nouveau paradoxe : la liberté s’autodétruit à cause du chaos résultant du heurt des libertés des uns et des autres. Enfin, une troisième dimension de la liberté que nous allons appeler, nous verrons pourquoi, métaphysique, semble également nous obliger à repenser la définition naïve.

Faire ce que l’on veut correspond peut-être à une liberté possible, mais celle-ci suppose, troisième paradoxe, de se libérer de l’illusion de la liberté comme faire ce que l’on veut.

C’est fort étrange, à expliquer ! I) Certes, la liberté consiste à faire ce que l’on veut au sens courant de cette expression, mais seulement à première vue, parce qu’au fond ce comportement nous rend au contraire esclave de nos désirs. a) La définition naïve de liberté provient de l’impression de liberté que l’on éprouve à faire ou imaginer faire tout ce que l’on veut. Reprenons donc pour commencer l’impression de liberté la plus naïve et évidente, et encore la plus réelle en tant qu’impression : on se sent libre quand l’on peut faire ce que l’on veut.

Sans écouter ni règles ni préceptes moraux, ni lois ni personne, cette situation ressemble presque à un rêve où tous nos désirs nous guideraient dans une recherche effrénée de ce qui nous donne envie, de ce qui nous tente, sans aucune réserve, censure, sentiment d’inhibition, de transgression, de péché ou de culpabilité.

La liberté consisterait alors à pouvoir agir comme si la conscience morale n’existait pas, ou au moins, comme si on pouvait la réduire à un mutisme temporaire ou définitif.

Voici une expérience de pensée, une situation que nous pouvons concevoir et analyser, même si dans la réalité elle peut bien être impossible à expérimenter.

C’est pourquoi intervient ici le mythe.

PLAT0N, au livre II de sa République, nous raconte le mythe de l’anneau de Gygès, quelqu’un qui serait en possession d’un anneau qui le rend invisible et lui permettrait ainsi de commettre le mal impunément.

Serait-il amené à assouvir tous les désirs que seule la peur du châtiment le retenait jusqu’alors de réaliser sans aucun frein ? Ou bien écouterait-il tout de même une voix intérieure, sa conscience morale, ce témoin qui voit toujours ce qui peut rester invisible aux autres ? Nous nous rendons compte que faire ce que l’on veut en ce sens-là équivaut à se libérer de la conscience morale, comme si la morale, la notion du DEVOIR, nous empêchaient d’être libres et d’atteindre le BONHEUR en réalisant tous nos DESIRS. b) Mais le rêve de liberté en faisant ce que l’on veut mène à son contraire, l’esclavage. Cependant, nous l’avons vu quand nous avons traité le désir : en fait le rapport entre DESIR, LIBERTE et BONHEUR est tout autre dès qu’on l’examine de plus près.

Pourquoi ? C’est qu’écouter ses désirs sans réserve mène forcément à tout 3 le contraire de la liberté.

L’illusion d’atteindre le bonheur par la réalisation débridée de tous nos désirs mène facilement, non pas à la liberté, mais à l’esclavage.

Voilà un excellent exemple du proverbe déjà commenté : Perversio optimi pessima (« la perversion du meilleur donne le pire »).

Si nous cherchons le bonheur sans sagesse, les désirs, au lieu de nous fournir la liberté promise, nous plongent dans un esclavage par rapport à nous-même, ou si l’on veut, à la partie de nous-même qui échappe, en partie, à notre contrôle rationnel, au corps, à l’animalité en nous-même.

C’est pourquoi EPICTETE, dans le texte commenté la dernière fois en classe virtuelle, nous rappelle, avec les autres Stoïciens en général, que sans liberté nous ne pouvons pas être heureux et que la liberté exige d’être maître de soi, définition stoïcienne de la liberté morale. c) Toutefois, la liberté consiste bien à faire ce que l’on veut si on entend ici le verbe vouloir au sens fort et propre de « volonté », et non pas au sens affaibli et habituel de purement « désirer ». A présent nous sommes à même de reconnaître que la liberté ne consiste pas à faire ce que l’on « veut » au sens où vouloir équivaudrait à désirer.

Nous pensons ici au désir associé aux instincts et non pas au désir comme une dimension profonde de nous-même revendiquée surtout par la pensée contemporaine.

Il est évident que se laisser tirailler par toutes les tentations n’est pas un état libre.

Au contraire, si nous accordons au terme vouloir le sens fort de volonté, alors la liberté consiste bien, certes, à mettre en œuvre notre volonté, qui est plus que le désir, pour réaliser ce que notre liberté a choisi et se propose d’accomplir : « Je le veux, je le ferai ».

Quelle est la clé pour comprendre cette idée ? Elle est double : 1.

La première clé : révisez la distinction conceptuelle déjà étudiée entre « désir » et « volonté ».

Cette dernière, rappelez-vous, peut être définie comme un désir auquel s’ajoute la raison (Cicéron et les Stoïciens : « désir raisonné »).

Celui qui désire peut désirer tout et n’importe quoi sans se donner les moyens d’obtenir l’objet de ses désirs (velléité) ; mais celui qui veut véritablement, celui-là est déjà sur le chemin d’obtenir parce qu’il réfléchit, applique sa raison, se donne les moyens d’obtenir l’objet.

Désirer une mention très bien au Bac sans travailler, c’est purement désirer ; mais si on fait des efforts réfléchis pour l’obtenir, cela s’appelle vouloir. 2.

La deuxième clé : nous présupposons ici que nous nous identifions à ce qu’on a pu concevoir comme la partie rationnelle en nous, parce que c’est nous-même qui raisonnons quand nous pensons et réfléchissons à nos actions ; par contre, le corps agit et décide en grande partie indépendamment de.... »

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