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Constitution, la norme suprême

Publié le 27/10/2023

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« C, Norme suprême ? L'article XVI de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 est au coeur du constitutionnalisme.

En disposant que toute société dans laquelle la garantie des Droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution », les révolutionnaires ont impulsé la lutte contre l'arbitraire et la protection des libertés individuelles.

Les peuples qui veulent conquérir la liberté réclament de leurs gouvernants une C. La C est l'acte fondamental qui dans un Etat fixe l'organisation des pouvoirs politiques, prévoit comment ils sont désignés, quelles sont leurs compétences et quels rapports s'organisent entre eux.

Par ailleurs, la C moderne précise les droits et libertés considérés comme fondamentaux. Cette primauté de la C sur les autres règles de droit s'explique le plus souvent par le fait qu'il appartient au « souverain », peuple ou Nation, de déterminer les règles constitutionnelles de son État.

La C se présente donc sous la forme d'un acte solennel qui appelle en général une procédure d'élaboration et de révision particulière. Le constitutionnalisme est une théorie juridique qui considère que le pouvoir souverain et les droits fondamentaux doivent être garantis par une C, norme suprême.

Au XVIIIe siècle, le constitutionnalisme correspond à un mouvement d'apparition des C comme moyen de limitation du pouvoir du monarque.

Il se développe dans la seconde moitié du XXe siècle en mettant en avant la C comme moyen d'éviter les dérives totalitaires et les atteintes à la dignité humaine que n'ont pu empêcher les « systèmes légicentristes ».

Il fait de la C l'ultime rempart face à l'arbitraire du pouvoir politique.

Il a fallu attendre le XXème siècle pour que la question de la place de la C dans la hiérarchie des normes soit fondamentalement réfléchie.

La doctrine allemande a voulu mettre en œuvre l'idée d'État de droit et le respect de cette hiérarchie des normes fait partie d'une telle idée. De nos jours, le constitutionnalisme oppose une démocratie constitutionnelle, basée sur le respect d'une C à une démocratie régie par la primauté de la Loi qui est l'émanation de la souveraineté populaire. Pour les constitutionnalistes, la loi ne peut exprimer la volonté générale que dans le respect de la C.

Leurs auteurs ont défendu la nécessité d'un contrôle juridictionnel de constitutionnalité destiné à renforcer l'effectivité des normes constitutionnelles.

Ce courant de pensée juridique s'inscrit dans une conception caractérisée par l'ordre et la stabilité. Au début du XXe siècle, Hans Kelsen, juriste autrichien, a développé, dans son ouvrage Théorie pure du droit, le concept de hiérarchie des normes.

Cette idée selon laquelle une norme n'a de valeur qu'en raison de sa conformité à la norme qui lui est immédiatement supérieure, a fondé la réflexion juridique sur la force et la valeur des normes.

Le modèle de pyramide des normes s'est imposé à des générations de juristes.

La question de la norme qui occupait le sommet de cette pyramide a été longuement débattue.

C'est notamment sous l'impulsion du mouvement des constitutionnalistes que la Constitution s'est trouvée placée au sommet de celle- ci.

Ainsi toute édiction de norme de rang inférieur est censée être directement ou indirectement régie par la Constitution, lui donnant dès lors force contraignante si elle respecte les normes de rang supérieur.

La Constitution est donc vue comme la norme suprême, au sommet de la hiérarchie des normes. Mais cette réflexion se trouve remise en cause par l'irruption du droit international au XXème siècle.

Se pose la question des entre les traités et les normes in- ternes.

Devant le développement du droit de l'Union européenne, la question de la hiérarchie des normes est devenue une question majeure avec en particulier l'interrogation sur la place de la Constitution dans cette hiérarchie dès lors que l'on envisage un ordre juridique global intégrant à la fois les normes internes et les normes internationales.

Cette suprématie classique est aujourd'hui remise en cause par la place de plus en plus importante prise par le droit de l'Union européenne et le droit issu de la Convention européenne de sauvegarde des droits de 'Homme et des libertés fondamentales (Conv.

EDH).

La Constitution semble ainsi être bousculée et le mouvement d'internationalisation du droit laisse incertaine la place réelle de la Constitution au sommet de la hiérarchie des normes. Dans quelle mesure l'idée d'une suprématie de la Constitution demeure valide lorsque la CJUE ou la CourEDH affirment leur primauté sur toute disposition de droit national, fut-elle constitutionnelle ? Si la suprématie théorique de la C a été posée depuis longtemps, ce n'est que depuis peu que la C jouit d'une suprématie effective en droit interne (I).

Toutefois, cette suprématie classique est aujourd'hui sévèrement remise en cause par la place de plus en plus importante du droit de l’UE et du DI.

La C semble ainsi poussée de son piédestal et ce mouvement d'internationalisation du droit laisse incertaine sa place réelle dans la hiérarchie des normes (II). I. La consécration de la suprématie de la Constitution dans la hiérarchie des normes internes Au plan interne, la C a été considérée comme la norme supérieure dans la hiérarchie des normes internes (A).

Cette affirmation a été renforcée par le développement de mécanismes juridictionnels permettant d'en assurer le respect à travers le contrôle de la constitutionnalité des lois (B). A.

Une suprématie constitutionnelle affirmée La Constitution est classiquement considérée comme l'expression principale de la souveraineté des États.

Selon Raymond Carré de Malberg : « la souveraineté est le caractère suprême d'un pouvoir suprême en ce que ce pouvoir n'en admet aucun autre ni au-dessus de lui ni en concurrence avec lui ».

Le pouvoir souverain, qu'il s'agisse de la Nation, du peuple, ou du Roi, peut disposer librement de la manière dont il entend exercer son pou- voir suprême.

C'est l'objet même de la C que de formaliser ces règles.

Dans la pyramide des normes, la C est positionnée au sommet, comme la norme fondamentale, celle dont découlent les autres sources.

Placée au sommet de toutes les normes, la C doit être respectée par les normes placées à une situation inférieure car elles ne sauraient être en contradiction avec elle. Lorsqu'est examinée la hiérarchie des normes, l'un des fondements de la force d'une norme par rapport à une autre vient des conditions de son élaboration en prenant en considération notamment l'auteur de la norme et le mode d'élaboration de celle-ci.

La C est l'œuvre du souverain, peuple ou Nation.

Il s'agit là d'une justification de sa force.

Elle est bien souvent l'œuvre de représentants du peuple ou de la Nation.

Il est alors opportun de se demander comment distinguer la C, norme suprême, de la Loi, expression de la volonté générale, qui peut émaner de représentants identiques.

Il est donc important de retenir des critères de distinction. D'une part, la définition matérielle de la C est essentielle pour savoir ce que doit contenir une C (règles relatives à l'organisation de l'État libertés et principes fondamentaux), et ce qui la distingue de la Loi et de son domaine d'attribution. D'autre part, la définition formelle de la C est une indication supplémentaire pour la distinguer de la Loi.

La procédure d'élaboration d'une Constitution est généralement plus complexe que celle d'une simple Loi (C dite rigide »).

Bien souvent elle est l'oeuvre d'une assemblée constituante.

Le mode de révision nécessite souvent une approbation par voie référendaire.

La C est alors préservée des modifications trop fréquentes.

Elle conserve ainsi un statut spécifique et sa primauté par rapport aux autres règles de droit correspondant à son rang de « pacte fondamental » de la Nation.

En revanche, la contrainte de telles procédures peut engendrer des blocages difficilement surmontables. A l'inverse on parle de C « souple » lorsqu'elle peut être révisée par les mêmes organes et selon les mêmes procédures servant à adoption des lois ordinaires.

L’intérêt de cette procédure est de pouvoir adapter la C aux circonstances sans formalisme excessif et sans blocage politique.

Mais elle risque d'aboutir à une instabilité plus grande du texte constitutionnel qui peut être modifié au gré des circonstances et des rapports de forces politiques, alors même qu'il a pour fonction de mettre en place un cadre institutionnel permettant de surmonter les crises.

La C perd ainsi de sa portée symbolique et sa suprématie par rapport aux autres textes juridiques. B.

Une suprématie constitutionnelle garantie Il ne suffit pas d'affirmer la suprématie de la C, encore faut-il que cette suprématie soit effectivement garantie, Le constitutionnalisme moderne s'est alors proposé d'instaurer un contrôle juridictionnel de constitutionnalité pour conférer aux normes constitutionnelles une plus grande effectivité.

Cette évolution s’appuie sur le précédent de la Cour suprême des EU qui, par un arrêt rendu le 24 février 1803 dans l'affaire Marbury vs.

Madison, a été la premiere juridiction a affirmer son intention de faire respecter la supériorité de la C sur les lois.

Si la C doit être la norme suprême, il n'est pas possible qu'une loi puisse être contraire à la C. En Europe, tout au long du XIXe siècle, il a été observé.... »

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