Carlo Gozzi1720-1806Pointilleux, emberlificoté, glapissant et violemment pittoresque, bref, un de
Publié le 23/05/2020
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Carlo Gozzi
1720-1806
Pointilleux, emberlificoté, glapissant et violemment pittoresque, bref, un de ces
personnages comme on en trouve chez Dickens ou chez Dostoïevski, le comte Carlo Gozzi
a tout fait pour se présenter à la postérité sous un aspect avenant et philosophique, avec
des traits d'ingénu et le rire cristallin de l'innocence.
Néanmoins, et malgré tous ses efforts,
il n'a pu empêcher que la lecture de son autobiographie, à laquelle il a donné le titre
engageant de Mémoires inutiles , nous laisse de lui une image où ingénuité et douceur de
caractère se teintent fortement de l'humeur et même de l'aigreur des originaux apparentés
à l'illustre Donald Duck.
Était-il vraiment Vénitien ? Était-il vraiment patricien ? Oui ; ou plutôt, pas tout à fait, car il
est aussi de ceux que le sort met toujours un peu en marge.
Certes, il est né à Venise, en
1720, mais sa famille est originaire du Frioul, où elle possède de petites terres.
Certes, il y a
parmi ses ancêtres un Gozzi qui, au XIVe siècle, fut un fameux guerrier, mais ses parents
peuvent tout au plus être rangés dans une bonne et simple noblesse campagnarde.
En tout
cas, durant les quatre-vingt-huit ans de sa longue vie, il se situera toujours, socialement
parlant, parmi les réactionnaires intégraux — réaction et non-conformisme vont, on le sait,
souvent de pair — et cet irascible et éternel enfant, qui verra s'écrouler devant Napoléon la
République Sérénissime et s'élever sur les ruines de sa patrie un monde incompréhensible,
ne retiendra de ces nouveautés que le mot “ démocratie ”, pour le prononcer, du reste, sur
le mode sardonique, et, s'il lui arrive d'écrire “ Liberté ” et “ Égalité ” en tête de ses
préfaces, “ Fraternité ” n'y figure jamais...
Mais ce ne sont ni les droits de l'homme et du citoyen, ni les sursauts d'agonie d'une
société sur son déclin qui occupèrent l'existence de Carlo Gozzi.
Non, celle-ci fut tout
entière remplie, successivement et le plus souvent concurremment, par trois grands sujets.
Premier sujet : les histoires de famille, et il faut entendre par là les incompatibilités
d'humeur, les conflits d'intérêts, les maladies, etc.
Sixième de onze enfants, Carlo est en
paix armée avec les uns et les autres, mais en butte à l'hostilité de la femme de son frère
aîné (celui-ci aussi fameux écrivain que Carlo, et même plus fameux à en croire les auteurs
de manuels, mais à la vérité polygraphe aussi fade qu'invertébré, avait pris pour épouse
une poétesse répondant au nom d'Arminda Partenide qui, s'autorisant de la
primogéniture, ruinait calmement les Gozzi).
Il s'en va à vingt et un ans guerroyer en
Dalmatie, où il semble surtout avoir joué la comédie (en travesti) et caressé quelques filles
sales et mineures (treize ans, précise-t-il lui-même).
Trois ans plus tard, il rentre à Venise
pour se consacrer à ses démêlés familiaux, et cette activité le retiendra jusqu'à sa mort ou,
du moins, jusqu'au moment où, en 1796, il met la dernière main à ses mémoires
faussement désabusés.
Second sujet : la persécution qu'il fait allégrement subir à Goldoni et à l'abbé Chiari, et qui
l'amènera à composer pour le théâtre.
Jusque-là, il avait taquiné la Muse comme le peut un
homme du monde — sonnets de circonstance et autres babioles — mais c'est seulement
vers 1747 qu'il deviendra membre de l'une des Académies vénitiennes du temps, celle des
Granelleschi.
On y daube fort les deux auteurs à la mode : Goldoni qui divertit le public en.
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