André Blondel

« André Blondel André Blondel naquit en 1863 d'une famille dijonnaise.

Il fut admis à l'École Polytechnique en 1883, entra à l'École desPonts et Chaussées, passa la licence ès sciences, et fut nommé ingénieur attaché au service central des Phares, situationqu'il conserva jusqu'à l'âge de la retraite, en 1907 ; il mourut en 1938.

Depuis 1913 il était membre de l'Académie desSciences.

Ce bref exposé montre que sa carrière fut brillante et sans accident, à la différence de celle de nombreuxinventeurs qui connurent les hauts et les bas de la fortune. Nous trouvons les principaux travaux de Blondel axés sur son occupation professionnelle d'ingénieur au service des Phares: l'amélioration des projecteurs le conduisit à des travaux d'optique et de photométrie pour guider et projeter la lumière, àdes travaux sur l'arc électrique pour la produire, aux générateurs électriques pour obtenir le courant, à l'étude des moyensd'enregistrement par systèmes oscillants à faible inertie pour analyser les grandeurs électriques intervenant dans lesphénomènes complexes tels que l'arc ; aux radiophares et à la radiogoniométrie. Ses contributions essentielles à l'électrotechnique portent sur : I.

les méthodes de mesure oscillographiques.L'oscillographe électromagnétique qui porte son nom et qui est connu de tous comme un appareil sensible, robuste, etfacile à utiliser dans l'industrie, resta pendant quarante ans pratiquement le seul moyen employé pour enregistrer lesformes des tensions alternatives et des courants correspondant à des variations de l'ordre de quelques périodes àquelques milliers de périodes par seconde ; II.

la théorie industrielle du couplage des alternateurs ; celle de l'alternateur à pôles saillants par la méthode des deuxréactions directe et transversale, méthode qui porte son nom et est classique dans tous les pays ; la théorie du moteurd'induction dont il mit en évidence le diagramme circulaire et précisa une méthode de calcul cohérente montrant le rôle dela dispersion par les coefficients qui portent son nom ; la théorie des machines à collecteur dont il a développé desdiagrammes : Blondel a essentiellement contribué à établir la théorie des machines à courants polyphasés et monophaséssous la forme qui est aujourd'hui classique. Rappelons en outre les travaux divers de Blondel sur la télégraphie sans fil, l'acoustique, la mécanique, toutes questionsqu'il a fait progresser en donnant la preuve des mêmes qualités d'esprit. Comme on le voit, Blondel a laissé une trace profonde dans l'électrotechnique.

L'enseignement moderne des machinesélectriques a reposé pour une part essentielle sur ses travaux.

Si l'électrotechnique des machines a trouvé son langagenaturel dans les représentations d'algèbre symbolique traduites ensuite en diagrammes vectoriels présentation un peudifférente de celle de Blondel qui était essentiellement à base de constructions graphiques par contre les coefficientsd'inductance cycliques qu'il a introduits représentent la conception fondamentale qui est à la base de l'écriture desexpressions symboliques. Le mérite de Blondel n'a pas été essentiellement un mérite d'inventeur, bien qu'il ait imaginé nombre de dispositifsoriginaux, mais plutôt d'appliquer une solide culture mathématique, une grande ardeur au travail et un excellent espritcritique à la création de théories cohérentes groupant un ensemble de questions par un lien logique à la manière, si l'onveut, de Hopkinson, mais avec les nuances particulières à l'esprit français théories qui ont contribué essentiellement à laformation des ingénieurs électriciens en leur donnant le fil conducteur nécessaire pour penser correctement les choses deleur métier.

C'est là un mérite différent de celui de l'inventeur, mais qui n'est pas de moindre qualité et de moindre valeurpour le développement d'une technique. Une originalité profonde de la vie d'A.

Blondel est qu'il passa vingt-sept années consécutives de la période active de sacarrière dans une existence de reclus, ne quittant pas sa chambre et même son lit par suite d'une paralysie partielle ; on arelevé ce paradoxe apparent qu'il fut ingénieur éminent dans le domaine des machines sans avoir vécu autour desmachines, expérimentateur éminent sans avoir mené la vie de laboratoire, professeur éminent sans avoir été en face desélèves ; suppléant ainsi à toutes les réalités par la seule force de son esprit.

Mais cette présentation des faits en est uneimage trop simplifiée, la vérité est tout de même plus nuancée : Blondel ne mena en effet la vie de reclus qu'à partir de 1900, et nombre de ses travaux les plus importants et les plusoriginaux se situent dans les dix années précédentes, au cours desquelles il put connaître les machines, l'activité delaboratoire pour laquelle il avait un goût particulier depuis sa jeunesse, la présence des élèves à son cours, et eutl'occasion de voyager à l'étranger : Russie, Amérique, Allemagne, Suède. Il se trouvait donc vers 1900, à l'âge de trente-six ans, dans les conditions les meilleures pour appliquer sa formationpratique d'ingénieur et d'homme de laboratoire, sa haute culture, et la concentration de sa pensée, à l'avancement desproblèmes qui sollicitèrent dans les trente premières années du siècle l'attention des ingénieurs électriciens.

L'impossibilitéde quitter la chambre lui permit de concentrer ses facultés sur le travail de recherche sans avoir les soucis parasites de laDirection d'un service. Si je crois devoir préciser ici les faits, ce n'est en rien pour diminuer Blondel, mais pour situer le climat dans lequel il lui futdonné de travailler et dans lequel il sut maintenir tous les contacts nécessaires avec ses collaborateurs immédiats et lemonde scientifique de son temps pour travailler sur un plan de recherches réaliste, et mener à bien l'Oeuvre étendue dontnous lui sommes redevables.. »