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analyse linéaire pascal Imagination

Publié le 21/07/2025

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« Pascal, Imagination Mouvement 1 : (ne diriez-vous pas – sénateur) : Une démonstration par l’exemple : un appel à l’imagination du lecteur et pour lui montrer que même l’homme le plus raisonnable voit sa raison ployer. Dans ce passage, Pascal opère une démonstration par l'exemple.

De manière presque scientifique, il rend le lecteur témoin de l'expérience qu'il imagine, afin de le persuader, en marquant précisément son imagination, que l'homme le plus raisonnable voit sa raison ployer sous la puissance des apparences. Dès le début du texte, Pascal entame un dialogue avec son destinataire libertin, et bien entendu, avec son lecteur.

Il use ainsi d'apostrophes à l’impératif « ne diriez vous pas », « voyez le entrer » qui créent immédiatement une relation de complicité avec le lecteur, qui devient plus à même d'adhérer à son propos. Pour persuader son lecteur, Pascal fait appel à son imagination, cette même imagination qu'il dénonce dans le fragment, est utilisée ici comme moyen pour atteindre son objectif et conclure sa démonstration.

En cela, Pascal opère un véritable tour de force.

Il a donc recours dès le début du passage à une hypotypose.

Le lecteur a ainsi le sentiment que la scène décrite du magistrat qui entre dans un sermon, se déroule sous ses yeux.

Le présent de narration dans les verbes « impose » « se gouverne » « juge », le déterminant démonstratif à valeur déictique « ce », le présentatif « le voilà », les compléments qui précisent le portrait du prédicateur : « voix enrouée » « tour de visage ». A travers la scène du magistrat, Pascal offre au lecteur une preuve par l'exemple et nourrit sa démonstration entamée au début du fragment.

Alors qu'il incarne respectabilité et raison, il se laisse comme le reste du peuple, séduire et distraire par les apparences. La présentation que nous fait Pascal nous montre un magistrat que l'on ne pourrait soupçonner de céder aux séductions des apparences.

D'abord, tout en lui semble vénérable, respectable : le rythme ample de la question oratoire posée dès le début du texte (« ne diriez vous pas que… »), donne un ton solennel et sentencieux au récit de Pascal et donc à la présentation du magistrat. La proposition relative « dont la vénérable vieillesse impose le respect à tout un peuple », le place au dessus du peuple et au dessus de tout soupçon.

Le prédicateur est également ennobli par une allitération en V avec les termes « voyez » « dévot » « voilà » « vienne » « visage ». Toutefois, ce n'est que son apparence qui impose le respect.

C'est donc bien cette faculté d’imagination, pour reprendre le début du fragment, qui dispense la réputation et donne le respect et la vénération aux personnes.

Par ailleurs, ce magistrat semble insensible aux vaines circonstances, par opposition à ceux qui s'arrêtent « à ces vaines circonstances qui ne blessent que l'imagination des faibles » et il semble ne s'attacher exclusivement qu'à la nature des choses, à leur essence (et non à leur apparence), comme l'indiquent les adjectifs hyperboliques « pure et sublime » qui qualifient la raison dont il est doté. Enfin, sa piété est un autre gage de sagesse, puisqu'il apparaît comme un modèle de vertu, entrant au sermon avec « un zèle tout dévot ».

Cependant, le choix de l'adjectif qualificatif « dévot », souvent employé dans un sens péjoratif, laisse poindre l'ironie de Pascal, et laisse deviner la chute de la saynète racontée.

En effet, par ce choix, l'auteur dénonce tout en subtilité une religiosité ostentatoire, qui joue le jeu de l'apparence précisément. Toutes ces raisons énoncées renforcent l'exemple choisi par Pascal.

Le magistrat a toutes les qualités présumées pour rester maître de son esprit et de sa raison. Mais devant l'éventualité de raisons insignifiantes, toutes ces qualités ne font pas le poids. La proposition subordonnée circonstancielle de temps au subjonctif « que le prédicateur vienne à paraître...

», permet une entrée abrupte, théâtralisée de notre prédicateur, un peu comme un élément perturbateur d'une saynète, sur le point d'advenir, et de faire basculer le récit vers une suite inattendue. L'enchainement de deux propositions subordonnées circonstancielles d’hypothèse montre le caractère aléatoire et contingent de ces cas de figures. Ce sont des éventualités parmi d'autres.

Qu'il s'agisse d'un défaut physique « tour de visage bizarre », d'un problème de voix ou d'apparence « voix enrouée », « mal rasé », ces cas se soldent par la même conclusion : le sénateur perdra de son sérieux, sera distrait par ces vaines circonstances, et n'écoutera pas.

L'ironie de Pascal s'exprime à travers la tonalité basse, la trivialité des situations choisies « une barbe mal rasée », une salissure quelconque, qui contraste avec les « grandes vérités annoncées par le prédicateur » et avec la raison « pure et sublime » dont le sénateur était affublé au début du paragraphe. L’ironie s'exprime également à travers le déterminant possessif « notre sénateur », qui lui ôte cette vénérable respectabilité dont il était auréolé au début. Le sénateur perdra donc son sérieux, et cela n'est pas discutable selon Pascal.

La conviction engagée par le choix du verbe « parie », l'implication de l'auteur à travers l'emploi du pronom personnel sujet « je » sont des marqueurs de la certitude de Pascal. Mouvement 2 : Poursuite de l’entreprise de persuasion : choix de la figure du philosophe, incarnation de la raison (le plus grand – suer). Dans les lignes qui suivent, Pascal poursuit son entreprise de persuasion et la renforce en choisissant cette fois, la figure d'un philosophe.

Si la raison était affaiblie dans le premier paragraphe, elle signe sa défaite dans le second. Pascal radicalise ici sa position, et intensifie sa démonstration.

Il prend l'exemple d'un philosophe, qui par définition, est habitué à exercer sa raison et attaché à saisir l'essence des choses.

Comment le soupçonner de se laisser dominer par son imagination ? D'autant que la formule hyperbolique de « plus grand philosophe du monde », accentue la gradation : on passe du magistrat au philosophe, cela lui confère une place suprême au dessus de ses confrères. Cet homme, le plus rationnel qui soit, va pourtant céder à une peur irrationnelle lorsqu'il éprouve du vertige.

Sa raison, ancrée et solide, vacille pourtant face au vide, bien que l'auteur prenne soin de préciser à travers la tournure comparative de supériorité que la planche sur laquelle il est placé est « plus large qu'il ne faut ».

Pascal emprunte cet exemple à Montaigne, qui dans ses Essais, livre II, chap.

12, montrait déjà que la raison d'un homme bascule face à la peur du vide.

Pascal s'empare d'un exemple ancré dans les consciences.... »

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