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Analyse linéaire Théodote, La Bruyère

Publié le 02/11/2025

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« Analyse linéaire Théodote (VIII, 61) Texte 2 INTRODUCTION Jean de La Bruyère est un célèbre moraliste du XVIIème siècle dont l’œuvre s’inscrit dans le courant littéraire du classicisme : mouvement littéraire qui se caractérise par la recherche de l’ordre, de la clarté, et de la mesure.

Le XVIIème siècle est marqué par le modèle de l’honnête homme, qui incarne la mesure et la civilité.

Dans son œuvre intitulée Les Caractères, publiée en 1688, Jean de La Bruyère dresse une série de portraits satiriques qui présentent des contre-modèles de cet idéal.

Le portrait de Théodote se situe dans le livre VIII, dans la section intitulée « De la Cour » qui offre une critique des mœurs et des comportements des courtisans à la cour du roi Louis XIV.

Mais alors, comment, à travers le portrait de Théodote, La Bruyère dénonce-t-il les vices des courtisans et l’hypocrisie de la cour ? Au cours de cette analyse, nous découvrirons le portrait de Théodote, l’incarnation du courtisan hypocrite et comédien, puis nous verrons comment La Bruyère élargit ce portait à celui des courtisans de la Cour du Roi. DEVELOPPEMENT Premier mouvement : Ligne 1 à 9 : La Bruyère esquisse le portait de Théodote, qui est l’incarnation du courtisan comédien. On observe une antithèse à la ligne 1 : austère/comique, qui établit un contraste entre la sévérité de l’habit et l’expression comique de son visage ; ce qui illustre un double aspect de la personnalité de Théodote. On observe ensuite, une entrée en scène théâtralisée : en effet, on peut relever le champ lexical du théâtre avec les mots « comique » « scène » « voix » « démarche » « geste » « attitude ».

L’effet de l’utilisation de ce champ lexical est renforcé par l’emploi du présent dans la première ligne « qui entre sur la scène », qui donne l’impression d’être une didascalie, une indication scénique. Les didascalies portent sur les mimiques, la voix, le déplacement sur scène comme on l’a vu avec les termes « voix » « démarche » « geste » « attitude ». Cette théâtralisation apparaît superficielle et sur jouée. Théodote s’invente un personnage pour donner du sens à son existence au sein de la cour, où l’apparence est primordiale.

On peut déjà bien voir que Théodote est un personnage au caractère théâtral.

On observe l’emploi de quatre adjectifs qualificatifs à la suite « fin, cauteleux, doucereux, mystérieux » qui vont nourrir l’existence du personnage et le faire prendre une place.

Le portrait physique est complété par une description de son tempérament, ce qui vient confirmer les zones d’ombres aperçues auparavant.

Ce personnage intrigue par son attitude étrange, en utilisant une fausse douceur et une prudence excessive, tout en cachant ses véritables intentions derrière des apparences trompeuses. Ces quatre attributs du sujet présentent Théodote comme un personnage hypocrite, rusé et fourbe.

L’assonance en « eux » traduit une forme d’hésitation, ce qui crée un sentiment de doute et d’attente.

On est dans l’expectative de la suite.

De plus, ces quatre adjectifs sont formés de trois syllabes, ce qui ralentit le rythme qui devient alors ternaire du texte et crée du suspense.

On peut même penser aux 3 coups de bâton frappés avant le début d’une pièce qui installe le suspense. Par la suite, La Bruyère donne la parole à Théodote, ce qui vient intensifier le mystère qui l’entoure.

On est vite déçu au vu de l’intervention de ce dernier qui va parler de la météo.

On voit donc bien que Théodote dramatise vainement ses propos plein de vacuité, qui sont en réalité banals à travers l’emploi du présentatif « voilà » qui donne un aspect emphatique et anaphorique.

On observe un parallélisme également avec les propositions : « voilà un beau temps, voilà un grand dégel », ce qui rend le propos redondant et répétitif.

En effet, celui-ci est vide, mais dramatisé. A présent, on a une vision des actions de Théodote qui confirment le double jeu auquel il se livre.

L’antithèse entre « petites » et « grandes » manières, nous montre qu’après tout, malgré ses simagrées, Théodote n’est qu’un petit courtisan.

Il ne joue pas encore dans la cour des Grands, dans les deux sens du terme.

Plus loin, il est comparé à une « jeune précieuse ».

On comprend la sophistication extrême des manières de ce courtisan qui est très maniéré. Par ailleurs, Théodote est infantilisé et rendu puéril.

En effet, on le compare à un enfant qui élève un château de cartes et qui saisit des papillons.

Il joue la comédie tout en s’amusant et en recherchant les faveurs.

Les termes « cartes » et « papillon » renvoient une idée de légèreté, d’innocence, d’actions éphémères. Les expressions « affaire de rien » « château de cartes » « papillons » contrastent avec l’idée de mystère, de sérieux, et de fourberie qui entoure Théodote et qu’on relève avec le champ lexical de l’importance, du sérieux avec les termes « capital » « sérieusement » « application ».

Cette pointe d’ironie vient ridiculiser Théodote, si impliqué dans sa comédie.

La Cour est un endroit où l’on fait croire que l’on est investi et impliqué. Deuxième mouvement : Ligne 9 à 16 : La Bruyère élargit le portrait de Théodote à celui, plus général, de tous les courtisans qui sont follement obsédés par l’obtention de faveurs. On observe ici un élargissement et une généralisation du propos de La Bruyère à tous les courtisans, qui sont obsédés par la faveur jusqu’à la folie.

Pour eux, c’est le seul moyen d’exister sur l’échiquier social.

Tous les gestes, mots, pensées sont soumis à ce but ultime, qui tourne à une obsession quasi-pathologique.

Le passage s’ouvre avec à la ligne 9, du pluriel « les gens » ainsi qu’avec le pronom personnel sujet à la 3e personne du pluriel « ils » qui englobent maintenant les courtisans de façon générale. Ils sont décrits comme étant fous, obsédés, aliénés « enivrés » « ensorcelés ».

Ils ont perdu la raison et apparaissent comme des courtisans déshumanisés, mécaniques qui agissent automatiquement, comme s’ils étaient déjà programmés. Ils ne sont plus maîtres d’eux-mêmes et ne sont conduits que par leurs passions.

La place au choix et à la réflexion n’existe plus.

Cette idée se justifie avec la présence de couples de propositions antithétiques comme « jour/nuit » « montent/descendent » « sortent/rentrent » « rien à lui dire/ parlent ».

Ces propositions sont juxtaposées par des points virgules, qui reflète bien l’absence de liens logiques entre ces actions.

L’énumération des actions vides traduisent le caractère absurde et automatique du comportement des courtisans, suggérant leur aliénation face à la quête incessante de faveurs. De plus, l’espace textuel est saturé d’actions, ce qui confirme le caractère maniaque des courtisans qui ne croient exister qu’à travers leurs actions vaines, répétitives et dénuées de sens.

Les antithèses à la ligne 10, « jour/nuit » « montent/descendent » montrent que cette obsession occupe toutes les dimensions qu’elles soient temporelles ou spatiales. La répétition des mots « parlé » et « parlent » qui constitue un polyptote, souligne non seulement la vacuité de leurs discours, mais aussi l’inconsistance de la communication à la cour, où parler devient une fin.... »

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