Databac

MAI 68

La crise de Mai 68, en France, est restée comme le symbole d’un moment contestataire, à la fois phénomène de génération et confrontation sociale. Commencé au printemps 1968 par une révolte étudiante sur le campus de l’université de Nanterre, laquelle est fermée le 2 mai, le mouvement gagne rapidement toutes les facultés. La contestation touche aux conditions d’études, mais exprime aussi l’aspiration à des changements plus radicaux. De nombreux étudiants se sont « politisés » dans les luttes contre la guerre d’Algérie et contre la guerre du Vietnam. Les manifestations enflent, vivement réprimées pour certaines par les forces de l’ordre. Le 13 mai, les grandes organisations syndicales de salariés, d’enseignants et d’étudiants déclenchent une grève nationale générale « contre la répression » et « contre la politique scolaire et économique du gouvernement ». À Paris se déroule une manifestation réunissant environ un million de participants. Le général de Gaulle, revenu au pouvoir dix ans plus tôt, tente de ramener le calme par une allocution télévisée. En vain. Le pouvoir gaulliste semble désemparé.
Le 27 mai, le Premier ministre Georges Pompidou (1911-1974) signe avec l’organisation syndicale patronale et les grandes confédérations de salariés les accords dits « de Grenelle ». Le salaire minimum dans l’industrie est augmenté de 35 %, les libertés syndicales sont élargies dans l’entreprise. Mais la base ouvrière considère ces concessions comme insuffisantes. La grève générale, qui immobilise tout le pays, se poursuit. Après un sensible flottement, le chef de l’État organise la reprise en main. Le 30 mai, il annonce la dissolution de l’Assemblée nationale. Le même jour, une manifestation géante d’un million de partisans est organisée sur les Champs-Élysées à Paris et dans différentes villes de France. Les élections donnent une forte majorité à la droite conservatrice. Le mouvement de contestation s’essouffle.
Mai 68 ne saurait être réduit à un mouvement étudiant libertaire, ayant aussi la dimension d’une confrontation sociale historique. Ses effets se mesureront avec retard, dans les profonds changements culturels qui marqueront bientôt la société française, et dans l’expression des aspirations nouvelles en matière sociétale. La gauche traditionnelle (socialiste et communiste) s’est trouvée largement dépassée par ces événements qu’elle n’aura pas su contrôler. Une nouvelle génération de cadres politiques va bientôt émerger.
Mai 68 est resté emblématique d’une époque - par la suite mythifiée par les uns et minimisée par les autres - qui a vu fleurir d’importants mouvements dans d’autres pays avant ou après les « événements » français : sur les campus des États-Unis, dans le contexte de la contestation de la guerre du Vietnam ; en Allemagne, à l’initiative notamment de la « opposition extra-parlementaire » ; au Japon ; en Italie (l’« automne chaud » de 1969) ; au Mexique, tragiquement marqué par les massacres de la place des Trois-Cultures à Mexico. Enfin, l’année 1968 voit l’écrasement du printemps de Prague en Tchécoslovaquie.
MAI 1968 (Événements de). Vaste mouvement de contestation politique, sociale et culturelle, qui se développa en France et en Europe au printemps 1968. La contestation française prit naissance dans le milieu étudiant dès 1967 avec une violente critique de la guerre du Viêt-nam et, à travers elle, des États-Unis, symbole d'une « société de consommation » déshumanisée. Ce malaise étudiant se précisa au début de 1968 avec la création du Mouvement du 22 mars, animé par Daniel Cohn-Bendit, qui remit radicalement en question l'université « bourgeoise », fabrique de « chiens de garde » du système capitaliste. L'agitation à l'université de Nanterre, fer de lance de la révolte, gagna bientôt la Sorbonne et aboutit rapidement à leur fermeture, aussitôt contestée par une occupation. La semaine du 3 au 10 mai fut marquée par de nombreuses manifestations et un impressionnant déploiement des forces de l'ordre. L'agitation culmina dans la nuit du 10 au 11 mai (nuit des barricades) au Quartier latin, marquée par des centaines de blessés et d'arrestations. Le mouvement gagna le milieu ouvrier et la France fut bientôt paralysée par la grève générale (20 mai). Cependant, d'importantes divergences apparurent entre la révolte des étudiants, issus pour la plupart de la bourgeoisie, qui aspiraient à une révolution « radicale » et le mouvement ouvrier, représenté par la CGT et le parti communiste qui condamnèrent tout aventurisme « gauchiste » et souhaitaient inscrire la lutte sur le terrain des revendications sociales. Le gouvernement Pompidou tira habilement profit de ces dissensions, en suscitant la signature des accords de Grenelle (25-27 mai 1968), acceptés par les dirigeants syndicaux mais rejetés par la base ouvrière qui organisa, avec la gauche socialiste, plutôt favorable aux « gauchistes » et prête à assumer le pouvoir, une manifestation au stade Charléty. Le 30 mai 1968, de Gaulle, après s'être assuré du soutien éventuel de l'armée (entrevue avec le général Massu en Allemagne), décidé à dénouer la crise, annonça la dissolution de l'Assemblée nationale et des élections anticipées. Une imposante manifestation sur les Champs-Élysées (30 mai 1968) s'organisa pour soutenir le régime. Les élections législatives (23 et 30 juin) apportèrent une écrasante majorité à l'UDR, soutien du régime, montrant ainsi la lassitude de l'opinion publique. La crise de mai 1968 laissa d'importantes empreintes par la réforme de l'université et surtout par une révolution des mentalités (droits des femmes, etc.).

Liens utiles