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Jean-Jacques ANNAUD

Jean-Jacques ANNAUD

Né le 1er octobre 1943 à Draveil (Essonne).

La Victoire en chantant (1976, ressorti sous le titre Noirs et Blancs en couleur), Coup de tête (1979), La Guerre du feu (1981), Le Nom de la rose (1986), L'Ours (1988). En quatre films seulement, Jean-Jacques Annaud est devenu un des cinéastes français les plus cotés à l’étranger. Ce sont en effet les Américains qui, les premiers, braquèrent les projecteurs du succès sur celui qui depuis toujours se disait «fasciné par ces machines qui servent à faire des spectacles magnifiques». La Victoire en chantant, son premier film, se voit décerné l’Oscar du meilleur film étranger au printemps 1977. Il faudra attendre la sortie de La Guerre du feu pour qu’il soit vraiment considéré comme un auteur dans son propre pays. Jean-Jacques Annaud s’est orienté très vite vers la carrière de cinéaste. Le bac A, Vaugirard (B.T.S. cinéma), un premier court métrage intitulé Les 7 Péchés capitaux du cinéaste et une licence de lettres le conduisent directement en deuxième année de l’IDHEC (section réalisation). Il trouve une place d’assistant sur un film publicitaire, travaille comme grouillot à Paris-Match et part faire son service militaire au Cameroun. Il y réorganise le département cinéma, forme des techniciens et réalise des documentaires éducatifs. Ce séjour en Afrique lui laissera un souvenir très fort dont des films comme La Victoire en chantant ou La Guerre du feu sont empreints. Lorsqu’il rentre en France, la publicité vient d’être autorisée à a télévision. Au rythme de quatre-vingts films par an pendant au moins six ans, Annaud devient le grand homme du spot publicitaire, comme Ridley Scott ou Alan Parker en Grande-Bretagne. Il accumule prix et récompenses mais surtout fait ses classes, car, dit-il, «cette école de la pub apprend à travailler vite et avec efficacité tout en restant à sa place sans jamais se prendre pour un artiste». Toutefois, l’envie de passer au long métrage le taraude depuis longtemps. En 1974, le scénario de La Victoire en chantant, écrit avec Georges Conchon, est prêt. Il s’agit de l’histoire d’un comptoir français en Afrique en 1915. Il faudra plus d’un an à Jean-Jacques Annaud pour monter une coproduction germano-franco-ivoirienne. Le film est très bien accueilli par la critique, mais le public ne suit pas. Rebaptisé Noirs et Blancs en couleur après son succès américain, il n’attirera guère plus les spectateurs. Annaud reprend ses publicités et met en chantier un deuxième long métrage (Coup de tête) en compagnie d’un scénariste «grand public», Francis Veber. Ils concoctent un petit chef-d’œuvre d’humour féroce et décapant sur les coulisses du football, 1 imbécillité des supporters et le jeu du pouvoir dans une petite ville de province. Fable caustique qui laisse percer derrière son ironie cinglante la dénonciation d’un système social et politique déjà apparent dans le premier film d'Annaud. Mais ici le réalisateur a opté pour un style plus proche de la comédie satirique italienne, ce qui devait lui valoir un franc succès et le mettre sur la voie de sa première superproduction: La Guerre du feu (Annaud a toujours conçu sa carrière sur un plan international, refusant de se laisser enfermer dans un schéma trop hexagonal). Avec ce film tiré du livre de Joseph-Henri Rosny Aisné, financé en partie par les Américains, sans dialogue ni voix off, il rencontre le succès dans le monde entier. Avec Gérard Brach, son scénariste, il n’a conservé de l’ouvrage que les grandes lignes, supprimé de nombreux passages, accentué le point de vue documentariste au détriment du lyrisme épique du roman, créant ainsi une discontinuité narrative qui paradoxalement renforce l’unité et la force dramatique du film. La Guerre du feu avait coûté douze millions de dollars, Le Nom de la rose allait en coûter dix-sept. L’adaptation et le financement du premier avaient été longs et difficiles, ceux du second le seront tout autant. Annaud retrouve donc Gérard Brach pour tenter et réussir l’adaptation d’un autre roman considéré comme «inadaptable», Le Nom de la rose d’Umberto Eco. Cette magistrale mise en scène d’une enquête «policière» au sein d’une communauté monastique au début du XIVe siècle montre bien que l’Histoire est pour Annaud une source d’inspiration fascinante. Comme il le dit lui-même, il s’est senti aspiré par le Moyen Âge comme il avait été englouti par la préhistoire, et a éprouvé le besoin de transporter les spectateurs vers l’objet de toutes ses préoccupations: la trame de l’ouvrage d'Eco. En choisissant Conchon, Veber et Brach, Jean-Jacques Annaud, qui se déclare «adepte d’un cinéma-récit-spectacle à travers lequel se profile une réflexion morale», ne pouvait que s’orienter encore plus dans cette voie difficile. La Victoire en chantant, La Guerre du feu et Le Nom de la rose sont à l’opposé des films historiques traditionnels, rigides et pesants. Le souci d’une authenticité totale, la recherche d’un réalisme pointilleux ne masque jamais les multiples pistes réflexives (politiques, culturelles, morales ou sociales), loin de tout didactisme et avec un humour omniprésent. Jean-Jacques Annaud fait un intelligent cinéma de qualité qui s’adresse au grand public et rend compte d’une certaine réalité sociale à travers le parcours initiatique de ses personnages. Il rêvait, il y a quelques années, de faire aussi bien que Tavernier ou Miller. On peut dire aujourd’hui qu’il a atteint ce but.

— Dossier sur Le Nom de la rose par Danièle Parra et Jacques Zimmer, La Revue du cinéma, n° 422, décembre 1986. — Propos de Jean-Jacques Annaud (et texte de Gaston Haustrate) sur Coup de tête, Cinéma, n° 243, mars 1979.

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