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Husserl et l'intersubjectivité + Critique du solipsisme

On ne peut douter de l'existence d'autrui (+ critique du solipsisme)


· Critique du solipsisme (1): L’expérience de la joie communicative. De la pitié. De la sympathie. De la fusion amoureuse : « Sentiment océanique »: https://fr.wikipedia.org/wiki/Sentiment_oc%C3%A9anique

· Critique du solipsisme (2) : Le solipsisme est une thèse intenable. Quand on écrit c’est toujours à qqu’un. L’écriture implique une étrangeté, une altérité. Un journal intime comporte toujours une part d’extimité. Etre pour celui qui se saisit comme étant (l’existant), c’est être dans le monde. L’existant n’est pas un « Je » auquel il serait donné de entrer par ailleurs et secondairement en relation avec le monde. Pour le « je », le monde n’est pas optionnel. Exister, c’est être dans le monde. Pas de position de surplomb sur le monde. On n’est jamais hors-du-monde. De sorte qu’ôter le monde, c’est ôter l’existence toute entière. Etre privé du monde, être privé des autres, c’est être privé de soi.



C’est seulement dans quelques occasions privilégiées ou déceptives que l’existant déserte le monde pour se rapporter à lui-même comme intériorité. Le dedans n’advient qu’après un retrait du dehors.

Exister, c’est être hors de soi (« ek-sistere ») dans un monde qui précède l’apparaitre de l’intériorité. L’extériorité, l’altérité (le monde et les autres) sont premières et l’intériorité est seconde = c’est là l’erreur de Descartes. Corrigeant Descartes et son « je pense donc je suis », Sartre dira: « Je pense donc les autres sont ».

Exister, c’est littéralement co-exister. Le monde est transi d’autrui. Le monde est un sujet de préoccupations qui nous renvoie constamment à l’autre: le livre offert par X, le vélo de Y, le cours pour Z, etc. Le monde dans lequel j’existe apparaît comme monde commun et manifeste autrui en chacun de ses lieux. Autrui est constamment à l’horizon du monde. Mon monde transpire d’autrui par tous ses pores. Cette présence d’autrui constante de l'autre s'impose à moi jusque dans les lieux les plus privés, là où précisément je cherche à lui échapper. Elle se manifeste alors à travers ces voitures qui passent, radio tonitruante, sous mes fenêtres, ce bruit de perceuse qui traverse le mur, ces pas d'enfants qui martèlent le plafond, etc. Je suis tout sauf une singularité pour laquelle cela aurait un sens de se demander si vraiment autrui est. L’être-pour-soi (conscience de soi) est un être-pour-autrui (Sartre). Être seul est une manière d’être-avec-autrui sur un mode privatif, d’un autrui manquant. Autrui est là dans son absence même. C’est dans son absence même qu’autrui se fait de plus en plus insistant. « Ce soir, j’attends Madeleine…. » et qui ne viendra pas. Je suis auprès de celui qui est mort et qui ne viendra plus.


Sous la subjectivité du cogito de Descartes se dissimule l’intersubjectivité qui la porte et la cautionne. C’est cette intersubjectivité qui est première et qui constitue l’objectivité de notre expérience du monde. Un enfant répond au sourire d’un proche alors qu’il est incapable encore de raisonner, voire de parler! L’expérience (de la présence) d’autrui est une expérience vécue, irréfléchie mais fondamentale, une donnée primitive de notre insertion dans le monde. 


Qu’est-ce que l’ « INTERSUBJECTIVITE »? 
- Contre la tradition classique, la philosophie moderne pose que l'existence d'autrui n'est pas déduite, mais saisie dans une certitude originaire préréflexive. Ainsi, pour Husserl, la conscience « reconnaît l'existence d'autres consciences dans un sentiment originaire de coexistence ». - La conscience de soi, dans ces conditions, se constituerait dans et par sa relation avec la conscience d'autrui, dans et par l'intersubjectivité.


Ce que la philosophie moderne nous fait découvrir, c'est le monde de l'intersubjectivité, le monde où les consciences sont plurielles, un monde où je suis véritablement soudé aux autres et à leur présence. Le plus isolé des Robinson découvre ainsi autrui en chacun de ses fantasmes et de ses rêves.


Avec le « cogito » phénoménologique (Husserl) et existentialiste (Sartre, Merleau-Ponty), en posant le « je pense », je ne m’atteins pas seulement moi-même mais aussi les autres: « Je pense donc nous sommes ». Les autres sont toujours déjà là. Autrui conditionne le sujet, le « je ». Le sujet n’est plus, comme dans les philosophies traditionnelles, un absolu, un alpha et un oméga, il n’est que relativement par rapport à autrui. Je ne suis pas le centre du monde. Je suis totalement dépendant d’autrui, de son existence, de son jugement. Etre jaloux, être intelligent, être méchant, être beau n’est pas une propriété, une nature intrinsèque mais une caractéristique pour et par autrui. Autrui est la condition de mon existence. Je ne peux me connaître moi-même. Autrui est le médiateur indispensable pour que le moi puisse atteindre une quelconque vérité sur lui-même, « pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l’autre. » (Sartre). Le sujet n’est sujet que par et pour autrui: « La découverte de mon intimité me découvre en même temps l’autre. » Autrui est donc nécessaire à la fois à mon existence et à la connaissance que j’ai de moi.
// Les recherches menées en psychologie de l’enfant semblent corroborer les thèses de Husserl, Sartre et Merleau-Ponty:
a) Wallon (†1962), psychologue français, a remarqué que les nouveau-nés savaient très vite se reconnaître par la voix et communiquer par les pleurs.
b) Dolto († 1988), psychanalyste lacanienne, constate que l'enfant « sent » instantanément la présence de l'autre, en particulier de sa mère.





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