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FRAGMENT

FRAGMENT nom masc. - 1. Elément extrait ou conservé d’une œuvre complète et achevée. 2. Élément d’une œuvre involontairement ou volontairement non achevée. ÉTYM. : se rattache au verbe latin frangere = « casser » tout comme « fraction » ou « infrangible ». Le texte peut tout d’abord se présenter de manière fragmentaire pour des raisons indépendantes de la volonté de l’auteur. C’est le cas lorsqu’un texte, complet à l’origine, a été pour l’essentiel perdu. Il n’en subsiste alors que des fragments. Ainsi de nombreuses tragédies grecques ne nous sont parvenues que sous cette forme. Il peut arriver également qu’une œuvre se présente sous une forme fragmentaire parce que son auteur n’a pas pu lui donner une forme définitive : ne nous restent alors que les brouillons, ébauches plus ou moins abouties, passages non coordonnés. Il en va ainsi des Pensées de Pascal qui sont en fait la publication posthume des notes de l’auteur. Le fragment peut cependant relever d’une stratégie délibérée d’écriture. Plutôt que de développer en discours sa pensée, l’auteur choisit de juxtaposer des textes brefs. On se trouve alors très proche de l’aphorisme, comme en témoigne, par exemple, Le Gai Savoir de Nietzsche. C’est dans le même esprit que le philosophe Georges Bataille a écrit sous forme fragmentaire des textes comme L’Expérience intérieure ou Le Coupable : l’éclatement du texte renvoie à ce qu’il nomme la « déchirure du non-savoir ». Roland Barthes a poussé plus loin la théorie et la pratique du fragment. Dans la dernière partie de son œuvre, il en a fait sa forme propre d’écriture avec son Roland Barthes par Roland Barthes et Fragments d’un discours amoureux. Faire éclater le texte en fragments qui sont classés dans l’ordre le plus arbitraire qui soit - l’ordre alphabétique - permet d’interdire que l’autoportrait ou le récit amoureux ne constitue une « histoire » dans le sens traditionnel du terme. Cette procédure empêche que le sens ne se fixe en une signification unique.

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