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antihéros

antihéros

Personnage romanesque en rupture avec l'image triomphante du héros traditionnel.

Commentaire

L'antihéros est la figure moderne du héros. Il résulte d'une transformation du héros traditionnel conquérant, dont il détruit les valeurs (amour, réussite...) et les attributs (beauté, génie...). L’antihéros est un homme ordinaire pris dans un destin qui n’a rien d’exceptionnel. Sa seule « différence » est d’occuper l’espace d'un récit, ce qui, paradoxalement, lui redonne le statut de héros. On observe le même phénomène au cinéma : l’écran sacralise l’antistar autant que la star de jadis, en lui offrant le podium de l’image. Ferdinand dans le Voyage au bout de la nuit (Louis-Ferdinand Céline), Meursault dans l'Etranger (Albert Camus), Molloy dans l’œuvre du même nom (Samuel Beckett) sont des antihéros.

Citation

L’identité de chaque homme est introuvable. Seule la contradiction existe. Le haut est bas, le noir blanc, le oui non. C’est là-dessus que le romancier et l’auteur dramatique engage et poursuit un dialogue qui ne se termine pas. (Claude Mauriac, « Samuel Beckett, prix Nobel de littérature », le Figaro, 24 octobre 1969.)

ANTIHEROS nom masc. - Personnage qui ne présente aucune des qualités exceptionnelles propres d’habitude au héros de théâtre, de roman ou de film. L’antihéros dans le sens qu’on lui attribue d’ordinaire est une création de la littérature moderne. Flaubert, dans le roman français, avec Frédéric Moreau, le personnage central de L'Éducation sentimentale (1869), Gogol, dans le roman russe, avec Le Manteau (1841) centré sur un petit fonctionnaire insignifiant inaugurent ce que Nathalie Sarraute appellera l’« ère du soupçon ». Une ère dont l’antihéros est l’une des principales manifestations. Il ne s’agit pas, bien entendu, de « réalisme » comme on l’a parfois prétendu, mais bien au contraire. L’homme quelconque, l’« homme sans qualités » de Musil, est l’instrument involontaire de la parodie et de l’ironie qui se tournent autant contre les modèles littéraires que contre l’expansion de l’esprit philistin dans une société embourgeoisée et démocratisée. Le déclin de la psychologie accompagne cette évolution qui délaisse les individus pour se tourner vers la création de nouveaux mythes. Comme exemple de héros peu « héroïque », on pourrait citer aussi Meursault, le personnage principal de L'Étranger (1942), et peut-être même le personnage principal de La Chute (1956), du même auteur.

—► Antiroman - Antithéâtre - Nouveau Roman — Personnage

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