Une ténébreuse affaire d'Honoré de BALZAC, 1841
Ce roman est classé dans les Scènes de la vie politique de La Comédie humaine. Balzac y a transposé l'affaire assez obscure du sénateur Clément de Ris qui avait été enlevé dans son château, près de Tours, le 23 octobre 1800, peut-être par des agents du ministre de la Police Fouché qui aurait désiré récupérer des documents. La première partie de l'action, intitulée Les Chagrins de la police, se déroule sous le Consulat, près de Troyes, sur un fond de manoeuvres concernant le château de Gondreville. Vendu comme bien national après l'exécution du marquis de Simeuse et de sa femme en 1793, ce château a été acquis, sous le couvert d'un prête-nom, par l'ancien Conventionnel Malin. Le garde Michu voue à celui-ci une haine mortelle, car il avait dessein de racheter le domaine pour les fils de ses maîtres auxquels il est fidèle en dépit de sa conduite apparente de Jacobin. En novembre 1803, les policiers Corentin (cf. Les Chouans) et Peyrade enquêtent sur les liens possibles de Malin avec la maison de Bourbon et sur quatre gentilshommes, les jumeaux Simeuse et leurs cousins Hauteserre, soupçonnés d'être rentrés clandestinement en France pour se joindre à une conspiration royaliste. Leur cousine Laurence de Cinq-Cygne les cache avec l'aide de Michu et obtient du Premier Consul leur radiation de la liste des émigrés. La deuxième partie, Revanche de Corentin, se déroule en 1806. Le sénateur Malin est mystérieusement enlevé à Gondreville. Corentin arrête les quatre jeunes royalistes et Michu en les accusant du coup qu'il a sans doute lui-même organisé. La troisième partie, Un procès politique sous l'Empire, retrace les circonstances de la libération du sénateur Malin et de la condamnation à mort des cinq accusés. Mlle de Cinq-Cygne va jusqu'en Prusse solliciter leur grâce auprès de l'Empereur, la veille de la bataille d'Iéna. Elle obtient celle des gentilshommes contre leur entrée dans l'armée impériale, mais Michu est guillotiné. Bien plus tard, au début de la Monarchie de Juillet, dans un salon que fréquente aussi le comte de Gondreville qui a servi tous les régimes comme Talleyrand, le comte de Marsay, devenu président du Conseil, révèle la clef de l'affaire : Malin était complice d'un complot monté par Talleyrand, Sieyès et Fouché contre le Premier Consul Bonaparte pendant la campagne d'Italie de 1800, à la veille de Marengo, et Fouché voulut ensuite faire disparaître les papiers qu'il détenait. Le meilleur de ce roman est la peinture de l'atmosphère sociale et politique dans les années qui ont suivi la Révolution.