SUBJECTIVITÉ / SUBJECTIVISME / SUBJECTIF
- SUBJECTIF, adj. (lat. subjectus «placé sous ou auprès de», «sujet»). Qui est propre au sujet, ne se conçoit que par rapport à un sujet. S'oppose à «objectif». ♦ 1° Qui appartient à un sujet seul, par opposition aux autres sujets et à l'objet {opinions subjectives, évaluation subjective). Ici, subjectif veut dire personnel, individuel. — Kant {Critique de la Raison pratique) parle des principes subjectifs : ceux que le sujet considère comme valables pour sa seule volonté. En ce sens, un jugement subjectif est celui qu'un sujet personnel porte en fonction de ce qu'il est, de ce qui le distingue des autres par ses goûts, ses habitudes, ses désirs. On parlera aussi en ce sens d'impressions subjectives pour désigner des impressions qui ne sont ressenties par un sujet qu'en raison de son état ou des impressions subies antérieurement. Par exemple, impression de froid, de chaleur, sensations de couleurs complémentaires. ♦ 2° Ce qui ne peut exister que pour un être conscient, par opposition aux phénomènes du monde physique. Par exemple, les qualités secondes sont subjectives au sens où elles impliquent un sujet humain pour les ressentir. Objectivement, il y a des mouvements, des ondes. — Ce qui concerne le sujet pensant. Ici, subjectifs pour synonyme «mental», «psychologique», «moral». Il ne peut y avoir de pensées, de sentiments, de préoccupations morales que pour un sujet conscient et pensant. Auguste Comte utilise fréquemment le mot subjectif en ce sens. Pour lui, la synthèse subjective est celle qui s'effectue dans une conscience humaine, l'existence subjective est le souvenir que les morts ont laissé d'eux-mêmes dans la pensée des hommes. ♦ 3° Qui tient à la structure de l'esprit humain, mais n'appartient pas aux choses en soi. Par exemple, dans le système kantien, la représentation de l’espace et du temps. ♦ 4° Méthode subjective. En psychologie, observation du sujet par lui-même, introspection. - Juger ou se décider en fonction de ses désirs, ou de ses sentiments intimes. — N.B. Tous ces sens sont postérieurs à Descartes. Pour les scolastiques, objectif avait un sens très différent et presque opposé. La lecture de Descartes présente, à ce sujet, une difficulté. Il utilise souvent la terminologie scolastique, notamment à propos des idées.
- SUBJECTIVISME. n.m. (lat. subjectus «placé dessous»). Toute théorie, toute position tendant à privilégier non seulement le subjectif sur l'objectif, mais surtout le personnel, l'individuel aux dépens de l'universel peut s'appeler subjectivisme. ♦ 1° Métaphysique. Le subjectivisme ramène le monde non seulement à une représentation, mais à ma représentation. ♦ 2° Logique. Le subjectivisme ne reconnaît pas l'objectivité du vrai et du faux. Il réduit la certitude à l'assentiment individuel. ♦ 3° Morale. Il nie également l'objectivité du bien et du mal, l'objectivité des valeurs. Les principes du jugement moral sont, pour lui, les réactions de la conscience personnelle (approbation, ou indignation et rejet). ♦ 4° Psychologie. C'est le refus ou l'incapacité d'adopter un point de vue objectif, de se détacher d'une manière personnelle de juger et de sentir. ♦ 5° Esthétique. Un bon exemple est l'impressionnisme.
- SUBJECTIVITÉ, n.f. (lat. subjectus «placé dessous»). Caractère de ce qui est : ♦ 1° Relatif à un sujet personnel. ♦ 2° Relatif au sujet, pris en général, c'est-à-dire comme représentatif de l'esprit humain {subjectivité transcendantale). ♦ 3° Domaine des réalités qui n'existent que dans une conscience. La souffrance, l'amour, le sentiment d'existence et tous les aspects qu'il peut revêtir, mais aussi la vie intellectuelle sont du domaine de la subjectivité.
SUBJECTIF, SUBJECTIVISME, SUBJECTIVITÉ ♦ Est subjectif ce qui appartient à un sujet : en tant qu’il est conscient (on peut ainsi nommer psychologie subjective celle qui procède par introspection) ; en tant qu’il diffère des autres (le terme peut alors être péjoratif). Chez Kant, en tant que transcendantal : le subjectif qualifie alors les propriétés de l’entendement humain par opposition aux choses en soi ; ou en tant que moral : le principe subjectif, dans la mesure où il n’est valable que pour une seule volonté, ne permet pas à celle-ci d’accéder à l’universalité de la loi. ♦ Toute tendance ou théorie privilégiant le subjectif sur l’objectif est appelée subjectivisme. Fréquemment péjoratif, le terme peut s’appliquer à différents domaines : en métaphysique, où il évoque l’idéalisme absolu ; en logique, où il nie que la différence entre le vrai et le faux existe objectivement ; en morale, en esthétique et en psychologie. ♦ Au sens ordinaire, la subjectivité couvre l’ensemble des particularités psychologiques n’appartenant qu’à un sujet. Plus philosophiquement, « subjectivité » est synonyme de vie consciente, telle que le sujet peut la saisir en lui, et où il cerne sa singularité.
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